mardi 11 octobre 2011

Le compromis à la belge existe encore

Quatre cent quatre-vingt-cinq jours après les élections, un compromis institutionnel a été annoncé aujourd’hui officiellement, dessinant une nouvelle Belgique, où chaque Communauté et chaque Région sont censées s’y retrouver. Cela ne nous donne pas encore un gouvernement, car après avoir discuté pendant tout ce temps de problèmes périphériques, il faut maintenant que les négociateurs abordent les vraies questions, celles qui auront un impact direct sur la vie des gens : le budget, les orientations socio-économiques, les mesures d’austérité ou de solidarité face à la « crise », les pensions, etc. Ce n’est pas encore gagné, mais on retombe dans des négociations normales et j’imagine qu’on devrait pouvoir déboucher plus ou moins rapidement sur un nouveau gouvernement.

Un nouveau gouvernement ne signifie pas, comme certains l’ont trop souvent répété, que la Belgique n’avait pas avant celui-ci de gouvernement. Il y a un gouvernement central « d’affaires courantes »… qui durant tout ce temps a dû gérer pas mal de situations, y compris « non courantes ». Il l’a bien fait et aujourd’hui, globalement, la Belgique s’en sort bien dans le contexte de la crise mondiale. C’est peut-être dû aux 5 autres gouvernements (Région-Communauté flamande, Région de Bruxelles-Capitale, Région wallonne, Communauté française de Belgique, Communauté germanophone), de plein exercice quant à eux.

Le compromis qui a été officialisé aujourd’hui est ce qu’il est… Je ne me prononcerai pas sur le fond, mais il me semble a priori un compromis « équilibré » comme les négociateurs l’ont souvent mis en avant : chacun y gagne un peu, chacun y perd un peu… et au total tout le monde est content (sauf les extrémistes évidemment).

Au-delà du résultat, qui s’est fait attendre, il faut bien le dire, il y a un processus qui me semble exceptionnel. Il est trop tôt sans doute encore pour écrire l’histoire, mais nous avons pu assister – durant ces 485 jours – à une véritable mise en œuvre de la démocratie, c’est-à-dire où un peuple décide ensemble quel est son destin. Le peuple, lui, bien sûr, s’est depuis longtemps détaché de la réflexion : il faut bien avouer que la plupart des gens, au Nord comme au Sud, se foutent complètement de ce qu’il adviendra de BHV… Ils s’en foutent, mais ils font aussi confiance à ceux que ça préoccupe : le peuple, dans sa grande majorité, pense que les politiciens finiront bien par s’entendre et que cela ne sert à rien de s’énerver. Les faits leur donnent raison. Quelle leçon de démocratie quand on y pense !

Dans d’autres pays – et prenons la France pour ne pas chercher trop loin – un tel cheminement aurait été absolument impossible. En France, la démocratie se résume aux décisions de la majorité contre les récriminations de l’opposition. Les dernières déclarations de M. Sarkozy sont révélatrices à cet égard : il conteste la légitimité des élections primaires du Parti socialiste, car celles-ci ne seraient pas dans l’esprit de la Ve République « Une élection en deux tours » ! Pour moi, Belge (et pour de nombreux démocrates français aussi), on est là dans des déclarations absurdes qui nient toute démarche démocratique. En soi, plus on donne la parole aux gens, plus on devrait être dans une démarche républicaine, non ?

Le paradoxe belge est un peu là. Nous vivons sous un régime monarchique, ce qui a priori n’est pas le régime le plus démocratique. Mais notre Roi se réjouit des accords qui ont été conclus dans le cadre du jeu démocratique ! Notre pays a été confronté à des difficultés institutionnelles qui en d’autres lieux auraient pu déboucher sur des guerres civiles. Ici, nous en sommes restés aux discussions, même avec les partis nationalistes. Ces discussions ont pu déboucher sur des accords – sans les partis nationalistes – et en soi, il s’agit d’un véritable miracle auquel, je l’avoue, je ne croyais plus vraiment !

Je ne sais pas trop ce que nous réservera l’avenir. Ce ne sera de toute façon pas facile. Et je n’ai aucune illusion : les récriminations institutionnelles resurgiront bien rapidement. Mais en attendant, comme le formateur Elio di Rupo l’a déclaré ce soir au journal télévisé de la Première, « le compromis à la belge existe encore ». Et rien que pour ça, ce soir, je suis fier d’être belge (même si j’aurais préféré que la Belgique se qualifie pour la phase finale de l’Euro !).

1 commentaire:

  1. Bonjour,

    J'aimerais utiliser la photo de cet article pour le prochain numéro du magazine L'insertion. Il s'agit d'un trimestriel gratuit édité (600 exemplaires) par la FeBISP (Fédération bruxelloise des organismes d'insertion socioprofessionnelle et d'économie sociale d'insertion). Êtes-vous d'accord ?

    Alice Berger, attachée communication de la FeBISP (berger@febisp.be)

    RépondreSupprimer