mercredi 23 septembre 2015

Le baiser des réfugiés syriens

István Zsíros © 2015

Cette photo a été prise par le photographe hongrois István Zsíros dans la gare Kelety de Budapest, le 30 août, alors que la Hongrie accueillait encore les réfugiés syriens fuyant la guerre. Photographe de mariages, il s’est rendu à la gare. « Une sorte de force supérieure m’a dit de regarder cette scène, et cette aide divine m’a donné la chance de prendre cette image. J’ai vu ce couple, et c’était vraiment touchant, surtout dans cet environnement. Alors, j’ai pris la photo. »

Je ne sais pas s’il y a une quelconque force supérieure qui aide à capturer une telle image, mais celle-ci est d’une force extraordinaire ! Elle vient en tout cas nous rappeler des éléments essentiels – trop souvent absents des discours politiques – face à cette grande transhumance actuelle : les réfugiés sont des êtres humains, comme vous et moi !

Comme tout être humain, un réfugié ou un migrant cherche le bonheur.
Comme tout être humain, un réfugié ou un migrant cherche à manger à sa faim.
Comme tout être humain, un réfugié ou un migrant cherche l’espoir d’être reconnu et d’avoir sa place dans la société.
Comme tout être humain, un réfugié ou un migrant cherche à parler avec ses semblables, à échanger ses peurs et ses rêves, à reconstruire le monde.
Comme tout être humain, un réfugié ou un migrant cherche les moyens et les conditions nécessaires pour éduquer ses enfants et pour leur proposer une histoire à bâtir.
Comme tout être humain, un réfugié ou un migrant cherche à travailler, à nourrir sa famille, à participer à la grande aventure humaine.
Comme tout être humain, un réfugié ou un migrant cherche la paix, celle des âmes, mais aussi celle qui lui permettra peut-être un jour d’oublier le bruit des fusils, des canons, des proches qui meurent à cause de politiciens ou de chefs inconscients du mal qu’ils génèrent.
Comme tout être humain, un réfugié ou un migrant cherche à vivre, tout simplement.
Comme tout être humain, un réfugié ou un migrant cherche l’amour, celui qui s’échange et se construit dans des baisers et des caresses qui permettent de croire – ne fut-ce qu’un instant – qu’on est seuls au monde, unis par cette communion corporelle.

Comme tout être humain – ou presque –, un réfugié ou un migrant cherche à être humain.

lundi 14 septembre 2015

La chasse

Chercher à chasser toute discussion polémique n’est pas une mince affaire ! J’aimerais souvent me taire, mais c’est vraiment difficile de résister à la tentation de venir mettre mon grain de sel. C’est ainsi que je me suis retrouvé dernièrement dans une discussion à propos de la chasse. Avec une position claire : je suis contre.

Tout en étant nuancé évidemment. Il est absolument nécessaire de réguler la faune sauvage qui peuple nos bois et nos champs. Pas sûr cependant que cela passe par une opération de chasse basée malheureusement plus souvent sur le « plaisir de tuer » que sur celui de participer à l’équilibre de la nature.

Mon intention n’est pas ici de relancer ce débat, car je crois en fait que souvent les interlocuteurs se contentent de rester sur leur position et de la défendre sans trop écouter ce que l’autre a à lui dire. Ce n’est pas toujours le cas.

Je me souviens m’être retrouvé un jour chez un ami chasseur, convaincu de son fait. J’avais beau lui dire que pour moi, c’était avant tout le plaisir de tuer qui animait ces chasseurs du dimanche, il ne voulait rien entendre. Jusqu’au moment où nous avons entendu une détonation suivie de quelques mouvements ! Ensuite, le fils aîné de mon ami est arrivé arborant le corps meurtri d’un oiseau quelconque (j’avoue mon ignorance totale). Ce brave enfant venait de s’amuser avec son fusil à plombs à tirer l’oiseau et revenait tout altier vers son père, fier d’avoir pu faire comme lui ! Je vis le père blêmir, horrifié par le geste de son fils. Je sus par la suite que mon ami chasseur ne chassa plus. La détonation s’était faite également dans son cerveau, plutôt bien construit d’ailleurs ! C’est une amitié qui s’est délitée avec le temps et je ne sais pas trop où cet ex-chasseur en est aujourd’hui. Mais l’important n’est pas là.

L’important est que – malheureusement – la chasse continue. Elle s’étend même. Aujourd’hui, les cibles des chasseurs deviennent de plus en plus souvent des êtres humains. Vous savez, tous ces réfugiés et tous ces migrants qui arrivent chez nous avec l’espoir de pouvoir simplement y vivre. Pour certains, il faudrait les chasser. « On ne peut pas accueillir toute la misère du monde », et donc il faut réguler cet afflux de nouveaux arrivants. La meilleure solution n’est-elle donc pas la chasse ? Celle-ci est évidemment un peu plus sophistiquée que le fusil à plombs. Mais ça revient au même : on fait tout pour faire comprendre que ces gens-là n’ont rien à faire chez nous.

Faudrait-il qu’un des enfants de ces chasseurs de migrants prenne son fusil et tire un bon coup, croyant faire plaisir à son père, pour que les chasseurs à la conscience tranquille se rendent compte de ce qu’ils sont en train de faire ? Je ne suis même pas sûr que cela changerait quelque chose.

Quand la vie d’un être vivant – humain ou animal – ne devient qu’un objet de plaisir égoïste, on peut tout craindre. En sommes-nous là ?