mardi 18 avril 2017

Ou choisir et assumer son vote ?

À la suite du référendum turc sur les pouvoirs de leur Président, et du soutien massif de la communauté turque belge, la question de la « double nationalité » ressort dans les débats, sans doute pour mieux nous faire oublier tout le reste. Question à la fois politiquement orientée et mal posée !

Question politiquement orientée : il s’agit avant tout de réagir à la menace du cosmopolitisme galopant, surtout s’il est un tantinet musulman. Tout le monde se fout pas mal de ceux qui sont à la fois Belges et Français, ou Italiens, ou Espagnols, etc. Les seuls qui posent problème sont comme par hasard les Belges qui sont aussi Turcs, ou Marocains, ou Algériens, etc. Ce sont ceux-là qu’il faudrait soi-disant obliger à choisir, alors même que certains n’ont pas le choix puisqu’ils ne peuvent pas, comme les Marocains par exemple, quitter leur nationalité d’origine. Cette double nationalité peut interroger. Mais pourquoi ne pose-t-elle vraiment problème que lorsqu’elle concerne une origine supposée musulmane ? Je ne veux pas être bisounours : l’islamisme violent existe et il faut tout faire pour s’en prémunir des dangers. Mais combien de fois faudra-t-il redire que ce n’est pas parce qu’on est musulman qu’on est un terroriste en puissance ?

Question mal posée : en quoi le fait de disposer d’une double nationalité pose-t-il problème ? L’existence de cette double nationalité ne me semble en soi poser aucune difficulté. Ce sont ses conséquences qui peuvent interpeller. Notamment le fait de pouvoir « voter » dans deux pays. Si les Belgo-Turcs n’avaient pas pu s’exprimer lors du référendum d’Erdogan, tout simplement parce qu’ils ne pourraient voter qu’en Belgique, la question de la double nationalité ne se poserait sans doute pas. Pas dans les mêmes termes en tout cas. La solution ne serait-elle donc pas d’amener toute personne concernée par une double nationalité à choisir la nation dans laquelle elle souhaite être considérée comme « électeur » ? Choix réversible bien entendu, dans le respect de certains délais pour éviter les girouettes électorales.

J’ignore totalement la faisabilité tant juridique qu’institutionnelle d’une telle proposition, mais elle me semble basée sur le bon sens même, dans le respect de chacun. On ne peut pas interdire à quelqu’un de se sentir appartenir à deux ou plus communautés selon son parcours personnel. Mais on ne peut pas non plus accepter pour autant qu’on puisse manger à tous les râteliers.

Dans ce domaine-là comme dans d’autres, plutôt que de vouloir passer son temps à interdire, ne peut-on pas simplement susciter auprès des gens de faire des choix positifs qu’ils assument pleinement ?

samedi 15 avril 2017

Qui dit quoi à qui ?

Quand j’étais instituteur, la chanson a toujours été au centre de la vie des différentes classes que j’ai eu la chance d’encadrer. Ce n’était pas chanter comme ça en passant. C’était avoir une véritable dynamique de chanson autour de l’apprentissage.

Déjà, quand j’étais stagiaire-étudiant en école normale, je me souviens avoir voulu faire mon stage de 6e année primaire (également « sixième » en France) dans une école traditionnelle alors que j’avais fait tous les autres stages dans des écoles en rénovation. Je voulais voir ce que c’était, sans oublier la chanson ! Je suis donc arrivé dans cette classe de l’Institut Saint-Jean Baptiste à Wavre où l’instituteur portait encore – on était en 1977 – le « cache-poussières », digne attribut du maître qui sait ! Il a été surpris quand je lui ai annoncé, en même temps qu’à ses élèves, que mon projet de stage était d’arriver à chanter tous ensemble et en rythme « La Tarentelle » d’Yves Duteil. Ces enfants n’avaient jamais chanté ensemble et l’entreprise n’était pas gagnée d’avance ! Je donnais donc mes leçons traditionnelles, dans le respect de ce que l’instituteur souhaitait, mais dès que j’avais une ou deux minutes à moi, je prenais ma guitare et on y allait « Vous avez appris la danse, danse, vous avez appris les pas, redonnez-moi la cadence, dence, et venez danser avec moi… ». À la fin du stage, tous les objectifs « matière » avaient été atteints… et en plus, ces enfants habitués à être « drillés » s’éclataient dans une belle interprétation collective de la Tarentelle. Toujours habillé de son cache-poussières, l’instit n’en revenait pas !

Devenu instituteur professionnel à mon tour, nous avons toujours chanté en classe. Quasiment tous les jours. C’était chaque fois un moment béni. Nous passions joyeusement du « Vieux Rampono » (chant traditionnel) à « Foutez-nous la paix » de Michel Fugain, en passant par « Il est interdit » ou « Le petit lapin » de Gaby Marchand… Vous ne connaissez pas ? Aucune importance. Mes élèves connaissaient et connaissent peut-être encore. Et on s’amusait bien.

On ne faisait pas que s’amuser. Chanter ensemble, c’est un travail progressif, collectif, inventif et instructif. Cela nous menait toujours plus loin, tant dans l’ambiance de la classe qu’au niveau des apprentissages : ceux-ci paraissaient plus légers, plus enchanteurs ! Nous avions aussi des récompenses : un jour, notre classe a participé à une émission de « Radio-Pirates » que la RTBF diffusait à l’époque tous les mercredis. Et nous avons pu chanter nos chansonnettes, dans la meilleure des humeurs !

Nous avons aussi participé, en 1989, avec les deux classes du Plateau Horizon (3e et 4e années), à l’émission de télévision « Nouba Nouba ». Celle-ci invitait chaque semaine deux écoles à venir chanter. La spécificité de notre prestation était que la chanson était entièrement créée par les enfants pour les paroles et par les deux instits, avec l’aide d’un parent, pour la musique. « Qui dit quoi à qui ? » reste un moment mémorable qui a permis de creuser les chemins de la communication. Je ne résiste par à la tentation de vous partager la vidéo de ce passage TV. La qualité technique est loin d’être au rendez-vous, mais l’ambiance y est. Et croyez-moi, derrière cette fête musicale télévisuelle, il y a des tas de moments uniques et intenses de partages musicaux qui font qu’une classe d’élèves atteint soudain une autre dimension.


NB : les plus avertis me reconnaîtront sur la photo !

samedi 8 avril 2017

L’arbre de vie

L’arbre de vie - Patrice de Schaetzen © 1996 – Photo : FMG©2016

Il y a juste un an, nous découvrions pour la première fois ce qui allait devenir notre nouvelle maison. On ne le savait pas encore à l’époque. C’était seulement la troisième maison que nous visitions, sans avoir de réel projet – du moins à court terme – de déménager. Mais voilà, la vie est ce qu’elle est. Sans y être véritablement préparés, nous nous sommes décidés, en deux jours. Cette fontaine de vie nous appelait à changer, après 30 ans de vie dans un autre paradis.

Nous y habitons maintenant depuis un peu plus de cinq mois. Pas un moment, nous n’avons regretté notre choix. C’est d’ailleurs étonnant la vitesse à laquelle on peut passer d’un « chez soi » à un autre « chez soi ». Et c’est très bien ainsi.

Je ne vous ferai pas visiter ici notre nouvelle demeure. Cela reste notre intimité. Nos amis y sont bien sûr les bienvenus, mais « pour vivre heureux, vivons cachés ». Sachez quand même que notre maison est fonctionnelle, originale, lumineuse, chaleureuse, calme, ouverte vers la vie.

C’est un vrai changement que nous avons choisi. Aujourd’hui, le déménagement est derrière nous, mais ce ne fut pas toujours une partie de plaisir ! Trente ans de vie, ça entraîne des milliers d’objets emmagasinés qu’il a fallu trier, jeter, donner, empaqueter, transporter, déballer, etc. Toutes les caisses ne sont d’ailleurs pas encore vides, mais c’est tout comme !

Le déplacement de tous ces objets n’est cependant pas l’opération la plus intense. La création d’un nouveau lieu de vie, la définition de nouveaux repères, la constitution de nouvelles bulles personnelles, l’ouverture vers de nouveaux horizons… Tout cela est bien plus complexe qu’un simple déménagement. Pour le moment, nous nous y retrouvons pleinement, en harmonie entre nous, avec nous-mêmes et avec notre nouveau cadre de vie.

Jamais, je n’aurais imaginé cela il y a un an, alors que nous visitions simplement une maison parmi d’autres. Dès le départ, elle avait quand même une spécificité fondamentale : cet « Arbre de vie » dont le doux murmure aquatique me berce en ce moment-même !