vendredi 29 mai 2015

Être belge jusqu’au bout

Il y a presque 6 ans, j’exprimais ici ma fierté devant le fait « qu’une femme musulmane puisse se montrer telle qu’elle est et assumer des responsabilités dans notre pays, sans devoir perdre son authenticité ». C’était au moment de la prestation de serment de Mahinur Özdemir en tant que députée de la Région de Bruxelles-Capitale. Son voile avait choqué certains, moi il m’avait plu par sa cohérence avec ses convictions intimes.

Mais voilà, aujourd’hui, Mahinur Özdemir est exclue de son parti, le CdH, parce qu’elle a refusé de reconnaître le génocide arménien. J’approuve pleinement cette décision. Que cette dame veuille vivre sa foi de la manière qu’elle estime bonne, c’est digne de respect. Même si je pense que le voile n’est ni une bonne compréhension de l’Islam ni une bonne manière d’assumer cette religion. Mais que cette dame refuse de reconnaître le génocide perpétré par les Turcs il y a une centaine d’années, c’est non seulement contester la vérité historique, mais c’est de plus se positionner turque avant d’être belge. Et là, c’est une contradiction inacceptable de la part d’une député dans une institution belge.

Ce refus de reconnaître la réalité de ce génocide n’a d’ailleurs aucun sens. Ce n’est pas parce que des ancêtres ont sombré dans l’ignominie en des temps perdus qu’on doit aujourd’hui assumer cette dérive. Les Allemands l’ont bien compris. Leurs ancêtres, il n’y a pas si longtemps, ont réalisé l’innommable. Plutôt que de le nier, ils le reconnaissent et créent leur vie actuelle sur une autre vision du monde et des différents peuples qui le composent. Quelles que soient les erreurs de leurs prédécesseurs. Cela, apparemment, les Turcs d’aujourd’hui en sont incapables. Malheureusement pour des raisons « politiciennes », leur leader Recep Tayyip Erdoğan ayant décrété que la grande nation turque était au-dessus de telles bassesses et que tous ceux qui oseraient le contester, fussent-ils citoyens d’autres pays, seraient définitivement exclus de la grande nation.

Mahinur Özdemir a choisi : elle est turque, non pas belge. C’est triste à dire, mais elle démontre aujourd’hui que – malgré tout ce qu’elle a pu faire croire – son « intégration » (et malheureusement aussi celle de bon nombre d’autres « citoyens belges », dont Emir Kir) est totalement un échec !

lundi 25 mai 2015

Des guerres pour rien

Le Concours de l’Eurovision est ce qu’il est. Il ne faut pas vouloir lui donner plus de valeur qu’il n’en a : c’est juste un divertissement un peu ringard qui – simplement – concerne des millions de personnes réparties un peu partout. La chanson gagnante n’est jamais la plus mauvaise. La meilleure non plus. Il y avait longtemps que je n’avais plus regardé la compétition, mais les chances de la Belgique de bien figurer m’ont attiré. J’avoue avoir regardé le spectacle avec une indifférence certaine, jusqu’à la 22e prestation.

Je ne savais même pas quel pays était concerné, mais c’était visiblement un « song protest », un chant de révolte. J’ai voulu en savoir plus et j’ai donc découvert qu’il s’agissait de la Hongrie, représentée par Boggie, pour interpréter Wars for nothing.

Un vibrant plaidoyer pour la paix. Qui, avant d’arriver à la finale, a subi les foudres d’Israël, parce qu’il dénonçait les enfants morts inutilement à Gaza en 2014. Bref, les paroles ont été changées et adoucies. Mais la chanson reste un hymne à la paix. Étonnant d’ailleurs que ce soit la Hongrie qui propose cette chanson alors qu’on connaît les tendances dictatoriales et sécuritaires de son président actuel, Viktor Orban.

En attendant, cela fait une belle chanson, classée seulement 20e au résultat final. J’en présente ici une jolie version réalisée en flash mob, avec les paroles anglaises et ensuite une traduction libre…

Do you know our Earth is a mess?
All the wars for nothing, it never ends
Everybody deserves a chance
All the souls, all the souls
Can you hear them cry?

That you live in peace does not mean
It’s okay to ignore all the pain
I see children joining the stars
Soldiers walk towards the dark
Let me ask

Can you justify all the eyes
That will never see daylight?
Give me one good reason to hurt
A helpless soul, break a heart
Kill a mind

Do you know how many innocents
Are hiding from punishment
For crimes they’d never commit?
All alone, all alone
Do they deserve

To die for believing something else?
For having a face someone can’t stand
Do you know our Earth is a mess?
All the wars for nothing
It never ends

All the souls, all alone
Hold them tight
All the souls deserve a chance
At life



Savez-vous que notre terre est un gâchis ?
Toutes ces guerres pour rien, ça ne finit jamais
Tout le monde mérite une chance
Toutes les âmes, toutes les âmes
Pouvez-vous les entendre crier?

Que vous viviez en paix ne signifie pas
Qu’il est normal d'ignorer toute la douleur
Je vois des enfants rejoindre les étoiles
Des soldats marcher vers l'obscurité
Laissez-moi demander

Pouvez-vous justifier à leurs yeux
Qu’ils ne verront jamais la lumière du jour ?
Donnez-moi une bonne raison de faire du mal
À une âme sans défense, de briser un cœur
De tuer un esprit

Savez-vous combien d’innocents
Se cachent pour ne pas être punis
Pour des crimes qu'ils n’ont commis?
Tout seuls, tout seuls
Le méritent-ils

Mourir pour croire à autre chose?
Pour avoir le visage de quelqu'un qu’on ne peut pas supporter
Savez-vous que notre terre est un gâchis?
Toutes ces guerres pour rien
Ça ne finit jamais

Toutes les âmes, toutes seules
Serrez-les
Toutes les âmes méritent une chance
À la vie

samedi 23 mai 2015

Boîte à mésanges

FMG©2015

Un jour, je ne sais plus trop bien pourquoi, des amis nous ont offert cette petite maison en bois. Elle ressemblait plutôt à une petite église et je ne voyais pas trop qu’en faire. Elle a traîné pendant tout un temps avec les choses qu’on garde sans savoir pourquoi. Puis, un autre jour, en sachant encore moins ce qui m’animait, j’ai planté un clou dans un mur pas beaucoup plus reluisant et j’y ai accroché l’objet.

Il y est resté. Il n’y avait aucune raison de l’enlever. Pas plus d’ailleurs que de le laisser là, accroché à ce clou. La force d’inertie est ce qu’elle est : immense ! Le clou n’a pas fléchi et la boîte est toujours là.

L’autre jour, j’ai cru voir en sortir un oiseau. Sans doute une mésange. Finalement, c’est ce à quoi est sensé servir ce genre de boîte : abriter des oiseaux. J’avoue ne pas y avoir accordé trop d’attention. Avec un peu de chance, je m’étais trompé. Ou cette mésange ne faisait que passer.

Tout à l’heure, profitant du temps clément, je traînais dehors lorsque j’ai cru voir à nouveau cette mésange s’envoler de son trou. Intrigué, je me suis rapproché de la boîte, sans trop savoir pourquoi. Décidément, dans cette histoire, j’agis toujours me laissant plus porté par les choses que par la raison. Arrivé près du nichoir, quelle ne fut pas ma surprise d’ouïr des gazouillis de quelques oisillons !

D’un seul coup, cette boîte à mésanges changeait irréversiblement de statut : elle devenait une maternité magique ! Ma vie et ma perception des animaux n’en sont pas fondamentalement changées. À vrai dire, c’est juste une émotion. Finalement, à part planter un clou – et encore, il était peut-être déjà là – je n’ai rien fait, si ce n’est pendre ce nichoir et le laisser tranquille.

Comme quoi, un petit gazouillis, ça vous change quand même la vie !

mercredi 13 mai 2015

Y a-t-il toujours une bonne réponse ?

FMG©2015


Finalement, qu’est-ce qui est plus joli ? Une pelouse laissée à l’abandon ou une prairie fraîchement tondue ? La gauche ou la droite ? Je ne doute pas un seul instant qu’il se trouvera des partisans acharnés de chaque position. Mais finalement, n’y a-t-il pas simplement la beauté ?

La plupart des gens passent leur temps à s’enfermer dans l’une ou l’autre conviction. De nombreux vont même jusqu’à injurier celles ou ceux qui ne pensent pas comme eux, tellement convaincus de l’infaillibilité de leur pensée. Pourtant, s’il se trouve une seule personne à penser autrement que moi, c’est que je n’ai pas tout à fait raison, non ?

Je n’ai bien sûr rien contre les convictions, quelles qu’elles soient. J’en ai moi-même de nombreuses et j’ai plutôt tendance à les défendre. Je n’hésite pas – parfois – à polémiquer, même si fondamentalement je ne me sens pas un « polémiste ». Simplement, parfois, je suis tellement étonné par certaines positions que j’exprime ce qui me semble mes évidences, sans jamais être convaincu que j’ai entièrement raison. J’essaie d’être à l’écoute de l’autre, de comprendre ce qu’il dit, de prendre en considération ses arguments. Je constate bien – la plupart du temps – que mon interlocuteur ne s’inscrit pas dans la même démarche et, souvent, je finis par me taire parce qu’il me semble tellement vain de mettre de l’huile sur le feu.

Alors, je reste avec mes interrogations. La pelouse laissée à l’abandon est-elle plus ou moins jolie que la prairie fraîchement tondue ? La gauche est-elle préférable à la droite ? La lutte féroce est-elle plus efficace que la tolérance et la négociation ? Une gestion rigoureuse de l’économie est-elle au bout du compte plus favorable à la population qu’une gestion sociale généreuse ? Les chanteurs d’aujourd’hui sont-ils vraiment plus nuls que les monstres sacrés de mes 20 ans ? Une télévision sans publicité est-elle de meilleure qualité que celle qui l’utilise pour se financer ? Les citoyens d’un État souverain sont-ils plus heureux que ceux d’un État intégré dans l’Union européenne ? Tous les candidats à l’immigration doivent-ils être acceptés par leur pays de rêve ou celui-ci se doit-il de gérer les flux migratoires ? …

Y a-t-il toujours une bonne réponse ?

jeudi 7 mai 2015

Pauvres petites bêtes

FMG©2015

Tout à l’heure, j’ai regardé un reportage du magazine On n’est pas des pigeons (RTBF). Il parlait des méchantes taupes qui dévastent nos jardins sans qu’on puisse y faire grand chose. Il y a bien sûr des tas de trucs de grands-mères, mais qui soit n’ont aucun effet (bouteille au fond percé, morceaux de verre…) ou soit n’ont qu’un effet répulsif passager (ultrason, urine…). Bref, pour l’émission, une seule solution : faire appel à un taupier professionnel qui coûte bien cher, mais qui garantit les résultats.

J’avoue que tout cela m’a surpris. D’abord, j’ai été étonné d’entendre que ce serait durant cette période de l’année que les taupes attaqueraient nos jardins avec leurs horribles taupinières. Moi, c’est plutôt en automne ou en hiver que ça se passe ! Mais bon, c’est sans doute mon jardin qui est bizarroïde.

Puis, et surtout, j’ai été étonné – pour une émission censée défendre les consommateurs – d’entendre que la seule solution efficace serait de faire appel à un taupier professionnel, ayant suivi pas moins de 3 ans d’études (sic) ! Que va faire ce taupier professionnel : creuser des trous dans les galeries principales et y placer des pièges – il y en a divers modèles – puis attendre qu’une taupe (ou un campagnol) passe par là et vienne inexorablement se faire prendre. Ça marche, c’est sûr.

Mais faut-il pour autant passer par un taupier professionnel ? Il suffit pourtant d’acheter un piège à taupe dans n’importe quelle bonne quincaillerie. Ça coûte une dizaine d’euros. Il suffit alors de repérer une galerie principale (c’est-à-dire où visiblement la taupe passe souvent), de creuser un trou en travaillant avec des gants (pour limiter les odeurs humaines), de tendre le piège, de le placer en recouvrant grossièrement de terre et puis d’attendre que la taupe vienne taper sur la pièce qui retient la pince pour sentir délicatement les crocs se refermer sur elle, sans aucun espoir de rémission. Normalement une nuit suffit. Si la taupe n’est pas passée par là, c’est qu’elle a compris l’astuce et qu’il faut placer le piège ailleurs.

Et alors, quand la pince s’est refermée, il ne reste qu’une taupe morte ! Ce n’est jamais avec plaisir que j’enlève le piège en prenant soin de laisser la taupe sous terre. Non seulement, cela lui fait une sépulture respectable, mais en plus, son odeur va décourager les autres taupes. Et on est alors reparti pour une saison sans taupe. Si par hasard elles reviennent, on recommence !

Le retour d’investissement de cette chasse personnelle est sans égal avec un recours à un taupier professionnel ! J’ai deux pièges, qui ont bien 20 ans chacun. J’ai attrapé ainsi entre une ou deux petites bêtes par an ! Je répète que ça ne me réjouit aucunement, mais ça me permet d’avoir un jardin plus ou moins convenable.

Au bout du compte, ma véritable question est de savoir pourquoi cette émission On n’est pas des pigeons n’a pas parlé de ces pièges privés et économiques. Est-ce parce qu’ils pensent qu'On est des taupes ?

vendredi 1 mai 2015

Nous sommes ce que nous décidons d'être

En ce 1er mai, quoi de plus normal que de parler d’une élue socialiste. Pourtant, en temps normal, je ne parlerais pas d’elle. Même si je pense que dans la bande de pourris que constituent les « barons » du socialisme belge, elle est la plus sincère et la plus intègre. Ce qui ne signifie pas que je la considère « sincère et intègre ». Simplement, elle l’est sans doute plus que les autres. Ce qui ne veut encore rien dire. Il s’agit évidemment de Laurette Onkelinx.

Si j’en parle, ce n’est pas pour le 1er mai et toute la symbolique que cette date est censée vénérer ! Il n’y a plus vraiment de raison d’y croire. Non, si je parle de cette femme politique belge, c’est parce qu’elle a été « attaquée » par dessous la ceinture et qu’elle a su remonter le débat.

L’émission flamande Terzake a révélé – ce que l’on savait déjà – que son grand-père Maurice Onkelinx aurait été, durant la seconde guerre mondiale, bourgmestre de sa commune de Jeuk avec l’aval des occupants allemands, qu’il aurait à la fin de la guerre été déchu de ses droits civiques pour être ensuite, assez rapidement, en 1950, réhabilité. Ça, c’est l’histoire. Elle est ce qu’elle est.

Pourquoi « révéler » cela ? Tout simplement parce que Laurette Onkelinx – devenue francophone de par les déplacements de son père Gaston – a été la première a dénoncé les connivences entre les hommes politiques N-VA Jan Jambon, Steven Vandeput, Theo Francken ou encore Siegfried Bracke et l’extrême-droite nationaliste, voire nazie, flamande. Ayant un ancêtre lui-même collaborateur, elle ne pourrait plus rien dire !

Elle a dit. Je cite. Intégralement, parce que tous les mots sont importants. « Les histoires de famille contiennent toutes leur lot de secrets. Une vie éteinte depuis des dizaines d'années révèle parfois de bonnes ou de mauvaises surprises. Je ne sais pas si ce qu'on raconte sur mon grand-père paternel est vrai ou pas. A-t-il collaboré avec l'occupant pendant la guerre ? En tout cas, mon père le dément avec fougue. Ce que je sais, quelle que soit la vérité, c'est que cela ne change en rien mes convictions et mes valeurs. La collaboration avec l'ennemi est inexcusable et j'ai une admiration sans bornes pour celles et ceux qui ont résisté. Et il y en a aussi dans ma famille qui ont eu ce courage. À toutes celles et ceux qui trouvent des excuses à la collaboration pour justifier les choix de leurs ascendants, je leur dis ceci : nous sommes bien sûr les héritiers d'une histoire, mais nous sommes surtout ce que nous décidons d'être. Nos valeurs, nos combats, sont ceux que nous choisissons. C'est ça aussi la liberté : choisir son camp en toute indépendance. Moi j'ai choisi le mien : celui de la démocratie, de la tolérance, de l'ouverture aux autres et de la justice sociale ».

« Nous sommes bien sûr les héritiers d'une histoire, mais nous sommes surtout ce que nous décidons d'être » ! Quelle vérité dans cette réponse ! Quelle force dans cette vérité ! Nous ne sommes pas redevables des errements qu’ont éventuellement faits nos ascendants. Nous sommes libres de décider ce que nous sommes et ce que nous sommes est ce que nous décidons d’être !

Dans les temps troubles que nous connaissons, cette vérité évidente est trop souvent ignorée ou niée. Par exemple, il est étonnant de voir la difficulté qu’ont les Turcs, qu’ils soient toujours au pays ou qu’ils soient immigrés ou issus de l’immigration, à accepter la réalité du génocide arménien. Nous en avons encore eu un exemple concret avec l’attitude d’un collègue de Laurette Onkelinx qui s’est débrouillé pour être absent lors de la minute de silence que les parlementaires fédéraux ont consacrée en hommage aux victimes de ce génocide. Il aurait pu, au contraire, être là et se distancer ainsi de l’horreur qu’ont commise ses ancêtres. En étant absent, au contraire, il manifestait de manière plus ou moins claire sa solidarité avec ceux qui ont commis l’innommable, pourtant nommé « génocide ».

Mais peu importe, aujourd’hui, je ne retiens que la parole forte de Laurette Onkelinx qui a su prendre ses responsabilités et dire clairement ce qu’elle veut être, ce qu’elle est : une démocrate, dusse-t-elle avoir un ancêtre proche collaborateur des pires exactions (ce qu’il n’était d’ailleurs peut-être pas).