dimanche 20 novembre 2022

C'est mignon, mais…

  

Aujourd’hui, commence au Qatar cette fameuse Coupe du Monde, non sans poser beaucoup de questions. L’Union royale belge des Sociétés de Football-Association (URBSFA) a eu la bonne idée de proposer au Roi de participer à un clip de soutien à nos Diables rouges. Philippe (et son service communication) a accepté. Ça nous a valu un truc déjanté à la belge dans lequel le Roi se montre non seulement supporteur, mais prend carrément la place de l’entraîneur, prodigue ses conseils, donne le tempo, etc. Je l’avoue, j’ai souri devant ce truc bien belge.

J’ai été un des premiers à le découvrir sur la page Facebook « Monarchie belge ». Je n’ai pas pu m’empêcher de commenter : « C'est mignon. Mais il y aurait pu quand même avoir une allusion à tous les problèmes humains et écologiques que pose cette coupe du monde au Qatar » ! En écrivant cela, je disais ma perception positive et amusée tout autant que mon étonnement devant l’occultation totale des questions de fond. Je ne disais pas que Philippe aurait dû consacrer un long discours à celles-ci – faut pas rêver quand même – mais qu’il aurait pu juste faire une « allusion ». Dans ma tête, cette allusion aurait dû exister avec le même humour que le reste. Par exemple, j’aurais bien imaginé entendre Kevin De Bruyne, lorsqu’il arrive près du Roi, dire quelque chose comme « Et les droits humains ? ». Philippe aurait répondu, comme dans la vidéo : « Selon mes notes, tu dois être là-bas ». Ça n’aurait bien sûr été qu’une allusion, bien en ligne avec l’hypocrisie officielle, mais enfin, elle aurait été là. Je ne suis pas scénariste et je ne suis pas sûr que ma proposition soit vraiment humoristique, mais ça m’aurait bien plu.

Mon commentaire a entraîné bien sûr quelques réactions : une cinquantaine de réponses, la plupart négatives, et 212 réactions par émoticônes. Il est intéressant de constater les 121 « pouces levés », soit 57% des réactions : ceux qui ont apprécié mon commentaire lèvent leur pouce, ceux qui n’ont pas apprécié sont plus enclins à l’écrire ! Les autres réactions se répartissent ainsi : 45 « haha », 41 « grrr », 3 « solidaire » et même 2 « j’adore ».

Les réponses formulées sont globalement négatives. Voici une tentative très imparfaite de classement (j’ai corrigé les fautes linguistiques).

  • Celles qui me reprochent de ne pas percevoir le royal humour joyeux : « rabat-joie », « oui… mais à un moment on peut un peu se réjouir d'une initiative », « un peu de légèreté, c’est trop demander ? », « justement non, c'est tellement bien de ne pas verser dans la sinistrose . Bravo à notre Roi ».
  • Celles qui utilisent le sempiternel et inexact argument qu’il aurait fallu contester plus tôt : « déja fait antérieurement ! Et là n’est pas la question », « c’est avant qu’il fallait boycotter », « C'est trop tard, il fallait y penser avant ».
  • Celles qui narguent gratuitement : « vous n'êtes pas obligé de suivre la publication », « C’est bon, t’as gagné ton pin's d’Ecolo-humanitaire friendly, tu peux terminer tes céréales maintenant », « faudrait peut-être arrêter avec ces sempiternelles jérémiades d'écologie répétées 20 fois par jour ! ».
  • Celles qui s’aventurent un peu plus réfléchies : « on ne parle pas de la coupe du monde mais des Diables rouges ! De la Belgique, de notre monarchie… Donc votre commentaire est hors contexte ! », « Ben oui pourquoi pas, et il aurait dû boycotter la coupe, parler de la Cop 27 en Égypte, de la misère en Afrique, de l'augmentation de l'énergie, des sdf, etc. Faut pas exagérer, cher François ! », « Notre roi ne peut pas, droit de réserve de sa fonction. Cette prérogative appartient à notre gouvernement ».

Je peux me tromper dans mon analyse, mais il me semble que ces réponses ne répondent pas vraiment à mon commentaire initial. Je m’y suis sans doute mal exprimé, sans m’expliquer suffisamment. On aurait pu espérer néanmoins une meilleure lecture de ce que j’avais écrit. Cela témoigne sans doute des limites des discussions sur les réseaux sociaux : souvent, ceux qui réagissent ne lisent pas vraiment le post ou le commentaire de départ. Ils n’essaient pas vraiment d’argumenter, mais plutôt d’attaquer ou de narguer. Ils disent parfois n’importe quoi, l’objectif n’étant nullement la recherche de vérité ou d’objectivité.

Il est vraisemblable que mon propre commentaire, comme d’ailleurs ce billet sur mon blog, ne valent pas beaucoup mieux ! Si vous pensez que je cherche la petite bête, vous avez sans doute raison. Je fais comme le Roi Philippe avec ses super-jumelles ! Et bonne coupe du monde à tous, quoi que vous en fassiez !

vendredi 11 novembre 2022

Vandalisme… ou éveil des consciences ?

 

Ces derniers temps, plusieurs jeunes – un peu partout dans le monde – s’en sont pris à des œuvres d’art en dispersant potages ou autres tomates et en se collant aux murs ou aux cadres dans l’objectif de dénoncer l’apathie des pouvoirs publics face à l’aggravation des changements climatiques.
 
Il faut bien reconnaître que ces actes ont été mal perçus par la plupart des gens, non seulement par les « bien-pensants », mais aussi par des personnes dont l’engagement dans la lutte pour le climat est évident. Certains, beaucoup – dont notre premier ministre belge – n’ont pas hésité à parler de vandalisme ! Étonnant !
 
Plusieurs constats.

  • Les activistes ont toujours choisi des œuvres d’art célèbres et donc protégées. Aucune peinture n’a – à ce jour – été réellement endommagée. D’habitude, on parle de vandalisme quand il y a vraiment des dégâts. Ici, il n’y en a pas.
  • Les activistes ont cherché chaque fois à se coller soit au tableau lui-même, soit au mur voisin. Se coller, c’est par définition ne pas chercher à fuir. C’est assumer pleinement l’action qu’on fait. D’habitude, les vandales essaient plutôt de fuir, de se cacher le visage, etc. Ici, ils se collent.
  • On a beaucoup parlé de ces actes, surtout pour les dénoncer : ah, ces sales vandales qui s’en prennent à des œuvres d’art, joyaux de l’humanité ! Les médias ont moins mis en avant la question que les activistes posent. Celle-ci a pourtant clairement été posée par les deux premières jeunes-filles. Elles demandent : « pourquoi est-il plus important de protéger des œuvres d’art que de protéger l’humanité ? » Si on accepte de réfléchir sereinement à cette question, on ne peut arriver qu’à une évidence : ces jeunes activistes ont raison.

Le vandalisme, ce n’est pas de s’en prendre à la vitre qui protège une œuvre d’art, même si celle-ci est effectivement un joyau de l’humanité. Le vandalisme, c’est de considérer que ces joyaux de l’humanité sont plus à protéger que l’humanité elle-même. Or, quand il n’y aura plus d’humains, à quoi serviront encore ces œuvres d’art ?
 
La question aujourd’hui n’est pas de savoir si la Terre survivra ou non aux changements climatiques. La réponse est connue : la Terre survivra, y compris la vie qui l’habite.
 
La question aujourd’hui est de savoir si l’humanité survivra ou non à ces changements climatiques qui rendront la vie humaine de plus en plus difficile, voire impossible. Peut-on accepter cela sans rien faire alors qu’il y a encore moyen de faire quelque chose ? Les actions possibles deviennent de plus en plus limitées. Et on peut penser ce qu’on veut, mais elles nécessiteront de réels bouleversements dans notre manière de vivre, d’agir, d’être. Ces réels bouleversements seront cependant moindres que si on ne fait rien, à part continuer à se foutre du climat. Et donc, qu’est-ce qui est le plus important : protéger notre petit confort, dont ces sublimes œuvres d’art, ou protéger l’humanité ?
 
Une dernière réflexion : en soi, je n’approuve pas ces actions provocatoires. Mais je me dis qu’elles secouent peut-être plus les pensées, y compris des dirigeants, que les grands-messes du style de la COP27 qui se déroule actuellement en Égypte. Qui sait vraiment ce qu’il s’y raconte et ce qu’il s’y décide (ou non) ? Certainement moins de gens que ceux qui ont entendu parler du « vandalisme écologique » de ces activistes éveilleurs de conscience. Bien plus que ces actes d’éveil, le plus important devrait être les décisions de la COP27 et leur mise en œuvre réelle pour sauver l’humanité, quel qu’en soit le prix. Vous y croyez, vous ?