vendredi 30 mai 2008

Milo

FMG © 2008

Milo est parti, cette nuit. Sans prévenir. Sans raison. Mais avec tant de questions…

Il était venu comme ça, sans trop prévenir, sans trop de raison. Il y a à peine une centaine de jours. Il était venu bouleverser la vie d’une jeune fille heureuse de vivre, mais un peu perdue dans ce monde qui ne pardonne pas grand chose. Elle avait décidé de relever le défi, de changer sa vie pour donner la vie.

Milo lui en a rendu grâce. Il a ouvert toutes ces portes dont on ne connaît même pas l’existence avant d’aimer un enfant, son enfant. Et puis, désormais, Milo est parti, sans prévenir plus qu’à son arrivée.

Pourquoi est-il venu ? Pourquoi est-il parti ? Quelles traces laissera-t-il de son passage ? Sera-ce une ornière dont sa maman ne parviendra que difficilement à s’extraire ? Ou au contraire, sera-ce une force qui lui permettra, une fois la douleur vive estompée, de construire la vie avec une énergie lumineuse et positive ?

Milo est parti. Une lumière s’est éteinte. Comment peut-on l’accepter ? Sans doute, n’est-ce pas acceptable ! Peut-on continuer à faire briller cette lumière furtive ? Oui, sans doute. Il le faut. Sans comprendre. Mais avec la vie à prendre à pleines mains. Cette vie qu’il n’a fait qu’effleurer, mais qui continue. Pour rendre hommage à Milo. Dors bien, Milo.

jeudi 29 mai 2008

Droitures

La peinture est un art majeur que je décline en mineur. Les œuvres qui me touchent sont rares, et quand cela arrive, je n’ai pas trop d’idées sur ce qui m’attire et allume l’étincelle de la communion.

Lorsqu’une maison de toute une vie se doit d’être vidée par les enfants qui y ont vécu un temps, il est mille trésors à découvrir ou à jeter, à garder ou à brûler. Les souvenirs de l’un ne sont pas ceux de l’autre. De passage dans une maison en train de se vider, de perdre un peu de son âme, j’ai vu une peinture qui prolongeait mon regard, comme si elle en faisait pleinement partie. Cette œuvre-là me parlait, sans que je sache nécessairement décoder le message.

L’artiste est un de ces enfants devenus grands qui vident la maison de leurs parents qui ne peuvent plus l’habiter. Un peu partout dans la maison, des peintures de Michel. Naturellement, elles tombent dans son escarcelle. J’ose dire : « Celle-là, elle me plaît. ». Michel l’apprend. Il n’hésite pas. « Si elle te plaît, elle est pour toi. »

Et me voilà avec cette œuvre dans mes bras. Dans mes rêves. Dans mes fantasmes. Il faut bien dire que cette œuvre est profondément érotique. Comment ne pas y voir ce que tout le monde y voit ? Est-ce pour cela qu’elle trouve un écho en moi ? Sans doute. Mais il y a aussi la lumière. Ne sont-ce finalement pas plutôt des réverbères modernes qui distillent leur éclat au-dessus des ténèbres de la vie obscure ? Ou alors des êtres purs, dressés dans les brumes montagneuses, pour éclairer de leur droiture nos existences ténébreuses ?

Allez savoir. En attendant, ces quelques coups de pinceaux distillent un bonheur, le temps d’un soupir.

lundi 26 mai 2008

Fatigue, quand tu nous tiens

FMG © 2008

Je suis fatigué. Très fatigué. Les jambes sont lourdes. Les yeux peinent à rester ouverts. Le cerveau n’a pas la même vitesse que d’habitude. La mémoire des actions pratiques montre quelques défaillances. La régulation thermique corporelle n’est pas très optimale.

Je suis fatigué, et le fait de le savoir me fatigue encore plus. Est-ce un cercle sans fin ? Une condamnation inéluctable ? Je ne le crois pas. Je sens bien qu’il y a encore en moi de l’énergie. J’ai toujours des projets. Je les mets en œuvre. Je m’active comme d’habitude. Et je n’ai pas l’intention d’abdiquer. Même si la fatigue est là, toujours présente, lancinante, tranchante.

Il faut vivre avec elle. Elle finira bien par passer. Du moins je l’espère. Sans doute faut-il lui donner l’occasion de disparaître. S’en donner les moyens. J’y pense, mais il y a bien sûr mille raisons de ne pas concrétiser. La première de ces raisons étant la fatigue elle-même. Car c’est fatigant d’être fatigué.

Heureusement, autour de moi, je rencontre quelques allumeurs de réverbères qui m’aident à tenir le coup. Tellement bien qu’ils ne se rendent peut-être pas compte que je suis fatigué. Mais il faut l’affirmer bien fort : la fatigue, ça ne devrait pas exister. C’est trop épuisant.

vendredi 23 mai 2008

L'étoile et le cosmonaute


Il y a plus de 30 ans, j’ai écrit une chanson intitulée L’étoile et le cosmonaute. Cette chanson m’a toujours bien plu. Elle contient une poésie d’une simplicité enfantine, mais profondément sensuelle. En 1977, je l’ai enregistrée, avec d’autres chansons et avec les moyens du bord, un enregistreur à bandes Sony Three Head Stereo. La qualité n'était pas vraiment au rendez-vous, mais quelques copies K7 ont circulé. À mon avis, pas plus d’une vingtaine.

Cette chanson est répertoriée sur mon site : seul le titre y figure. Il y a quelques jours, j’ai reçu un message me demandant les paroles de L’étoile et le cosmonaute. J’ai été intrigué. Étant encore à Madagascar, je n’avais pas les paroles avec moi et j’ai répondu que je les enverrais dès mon retour, mais que cela ne m’empêchait pas d’être étonné. La personne m’a dit qu’elle m’en dirait plus lorsqu’elle aurait les paroles…

Je les ai donc envoyées et voici quelle fut la réponse de ma correspondante : « Merci beaucoup de m'avoir envoyé le texte de votre chanson. J'ai perdu mon amie Liliane (près de Saint Omer). Au cours de son enterrement, tout le monde a réussi à contenir son émotion, sauf au moment où votre chanson a été passée. Nous étions amies depuis vingt ans, nous avons partagé beaucoup, mais cette chanson choisie probablement par ses enfants était une partie d'elle-même que j'ignorais. C'était un moment douloureux, mais en même temps une découverte, un plus. Je vous remercie encore une fois de l'avoir écrite ».

J’ignore complètement comment cette chanson est arrivée auprès de cette Liliane. J’ignore ce qu’elle peut signifier pour elle. Je cherche bien à en savoir un peu plus, mais sans trop le vouloir. Il y a là une part de mystère assez enivrante. C’est la première fois que je me rends compte qu’une chanson que j’ai écrite ne m’appartient plus, qu’elle a une vie autonome. Une vie créatrice d’émotion auprès de personnes que je ne connais ni d’Eve ni d’Adam. En somme, la chanson a fini elle aussi par trouver son étoile. Quel bonheur !


Avant d'écouter "L'étoile et le cosmonaute", arrêtez le lecteur à droite.

Il était une étoile
Qui s’trouvait isolée,
Perdue dans le ciel sans voile,
Triste et fatiguée.
Ça faisait des millénaires
Qu’elle était solitaire ;
Elle aurait bien voulu
Rencontrer un inconnu.

Et puis un jour sur la Terre,
On décida qu’sans faute,
On enverrait dans l’éther
Enfin un cosmonaute
Pour explorer le ciel
Et toutes ses merveilles.
On fit ce qu’il fallut
Pour partir dans l’inconnu.

Lorsque la fusée partit
Dans un ciel bleu d’automne,
Ce fut mille cris
De milliers de personnes,
Car par ce grand départ,
C’était la victoire,
Car un homme reviendrait
Avec des tas de secrets.

Mais vous m’avez compris,
Il ne revint jamais,
Car dans l’infini,
Notre étoile pleurait,
Et il la rencontra,
Et il y resta,
Il ne pouvait laisser
Cette étoile abandonnée.

Bien sûr que c’est sur la Terre
Qu’on s’est mis à pleurer ;
On scruta l’univers
Mais on n’a rien trouvé,
Si ce n’est une étoile
Qui n’était pas très calme,
Car l’amour, mes enfants,
N’avait pas perdu son temps.


François-Marie GERARD - FMG © 1976

dimanche 11 mai 2008

Les signaux détournés (6)

Il y a des jours où il vaut mieux essayer de ne pas comprendre. Ne pas se poser de questions. Se laisser aller à ses intuitions, sans s’encombrer l’esprit d’éléments qui ne peuvent que le perturber. C’est évident, mais facile à dire ! Dans la réalité, on est parfois confronté à des jours où le mystère reste entier.

Je roulais depuis quelques heures sur l’autoroute. Il n’y avait pas beaucoup de monde. J’étais concentré à la fois sur la route et sur la musique qui habitait la voiture. Petit à petit, je sentis que mon corps avait besoin de se libérer de quelques décilitres de toxines et je décidai de m’arrêter à la prochaine aire de repos.

Après 3 ou 4 kilomètres, j’aperçus l’espace attendu. Je m’y engageai en me sentant déjà soulagé lorsque je remarquai à l’entrée du parking le signal ci-dessus. Dans un premier temps, je n’y prêtai pas trop attention. Ce n’était pas la première aire d’autoroute sur laquelle je m’arrêtais et je ne voyais pas trop en quoi elle était particulière. Elle l’était pourtant.

M’avançant dans la zone, je fus frappé par sa propreté. Il faut dire qu’il n’y avait personne pour la salir. Une fois arrêté près du bâtiment logé au milieu de l’aire, je sortis de voiture et je fus frappé par le silence. J’attribuai ce silence à l’absence de musique et de bruit de moteur ou de route. Mais le silence était vraiment fort. C’est alors que je repensai au signal situé à l’entrée du parking. Que signifiait-il ?

Le bâtiment était carré et ne semblait avoir qu’une seule entrée. J’eus un doute : et si le signal – de par sa barre rouge verticale – signifiait qu’il ne pouvait pas y avoir de toilettes séparées pour les hommes et les femmes ? À vrai dire, ce serait assez étonnant, mais pas trop dérangeant. Pour moi du moins. Je suis un homme et je n’aurais pas trop de difficulté à partager ces lieux avec de charmantes dames ! J’étais néanmoins moins sûr que celles-ci soient du même avis. Surtout sur une aire d’autoroute. Bref, j’étais assez sceptique. Je ne pus m’empêcher en ces lieux de penser « comme la fosse » ! (La fosse septique…)

Je fis le tour du bâtiment et pus vérifier qu’il n’y avait effectivement qu’une seule entrée. J’entrai donc, mais je fus directement étonné de constater qu’il n’y avait rien dans ce bâtiment qui ressemble à de quelconques toilettes. Ni pour homme ni pour femme. Rien que du silence. J’étais en train de me rendre à l’évidence : ce signal devait indiquer qu’il n’y avait pas de toilettes dans cette zone, ou plutôt qu’il était interdit de pratiquer l’activité la plus banale qui soit. Étonnant.

Mon étonnement devint cependant plus important encore lorsque je constatai que les 4 murs intérieurs du bâtiment étaient recouverts d’un vaste miroir d’une brillance superbe et qui reflétait les autres murs dans un jeu sans fin de reflets. J’eus alors l’idée de jouer moi aussi et de regarder mon reflet se miroiter à l’infini. Je me plaçai devant le miroir, me déplaçai, me replaçai… mais rien ne se passait. J’avais beau essayer, il m’était impossible de me voir. J’étais là au milieu d’une pièce entourée de miroirs, mais c’est comme si je n’existais pas. Je commençai à m’affoler. Cela dépassait mon entendement. Et comme je n’entendais rien, j’ai préféré reculer, sortir de ce bâtiment où je semblais ne pas exister.

C’est alors que j’eus une lueur de compréhension : ce banal signal ne signifiait-il pas que la zone était interdite aux femmes comme aux hommes ? Une zone de non-existence humaine ! C’était vraiment alarmant. Inconscient, j’avais enfreint une règle élémentaire, évidente. Quel risque courrais-je ? Je pris mes jambes à mon cou. Enfin, façon de parler, car je ne savais même plus si j’avais encore des jambes ou un cou. Je vis ma voiture, m’y engouffrai, allumai le moteur et la musique, et je démarrai en trombe sans plus me soucier de rien.

Je récupérai avec une satisfaction extrême la monotonie de l’autoroute. Je ressentais encore le besoin de soulager mon corps, mais mon esprit repoussait cette éventualité. Je roulais en essayant de ne plus penser à rien. Ce n’est qu’après quelques kilomètres que je pris la peine de regarder vers ma droite pour voir sur le fauteuil du passager si rien n’avait disparu dans mes affaires qui y étaient disposées. À vrai dire, elles n’y étaient plus. À leur place, il y avait une femme. Elle me ressemblait étrangement. En vérité, la seule différence avec moi, c’est qu’elle était habillée d’une robe évasée. J’avais embarqué mon double féminin. Ce signal ne signifiait-il pas finalement qu’il est interdit de séparer sa part masculine de sa part féminine, sa part féminine de sa part masculine ? Moi qui pourtant m’appelle François-Marie, j’avais oublié quelques instants cette vérité fondamentale. Nous sommes Yin et Yang, indissociablement.

Mon esprit tournait. Je ne comprenais plus rien. Je fermai les yeux, enivré par trop d’évidences consommées. Mais je roulais à du 120 km à l’heure, et je ne tardai pas à rouvrir les yeux. Ouf ! La femme avait disparu. Mes affaires traînaient à nouveau en désordre. Et mon besoin avait disparu. J’étais redevenu moi-même.

Il y a des jours où il vaut mieux essayer de ne pas comprendre. Ne pas se poser de questions. Se laisser aller à ses intuitions, sans s’encombrer l’esprit d’éléments qui ne peuvent que le perturber. C’est évident, mais facile à dire ! Dans la réalité, on est parfois confronté à des jours où le mystère reste entier.

vendredi 9 mai 2008

Lumière malgache

FMG © 2008

Madagascar est un pays magnifique. Il y est des milliers de paysages plus féeriques les uns que les autres. De passage dans la région d’Itasy, je me suis arrêté au bord de son lac, à Ampefy. Je logeais à l’hôtel Kavitaha qui m’offrait cette vue en prenant le petit déjeûner. Comme dirait André, il y a pire !

Quelques instants plus tard, la lumière avait déjà transformé le paysage. Plus qu’ailleurs, je trouve que la lumière donne aux paysages malgaches des accents admirables en accentuant selon le moment tel ou tel élément du relief, telle ou telle vérité du soleil.

J’étais là pour travailler… et je n’ai pas vu la transformation du lac tout au long de la journée. Je ne revenais à l’hôtel que lorsque le soleil déclinait, faisant sortir de nouvelles réalités, de nouvelles douceurs.

En tant que réverbère, j’avoue être particulièrement intéressé par la lumière, quelle qu’elle soit. Lorsque je prends une photo, c’est la lumière qui me guide, qui me conduit à figer l’instant pour l’éterniser ou à le laisser se diluer dans son existence fortuite. Madagascar offre à cet égard des trésors inoubliables. Même quand la nuit étend son manteau.

jeudi 8 mai 2008

Ambohibary, ou la fureur d’apprendre

FMG © 2008

Ces enfants constituent la classe de CM2 de l’EPP Ambohibary, de la CISCO Sohavinandriana, dans la DREN d’Itasy de la République de Madagascar. Ce jour-là, ces enfants, comme beaucoup d’autres, participaient à un CEPE à l’essai, c’est-à-dire un examen permettant théoriquement de délivrer le Certificat d’Études Primaires Élémentaires. Celui-ci n’était qu’à l’essai, car il vise à la fois à tester en temps réel la régionalisation de l’organisation de cet examen ainsi que l’introduction en son sein de l’approche par les compétences. Mais ce n’est pas ça l’important.

Il s’agit d’une école comme les autres, comme on en trouve beaucoup à Madagascar. Comme beaucoup d’autres écoles aussi, elle est enclavée. Cela signifie qu’on ne peut s’y rendre qu’à pied, ou à moto. Le 4x4 qui me conduisait d’école en école pour voir sur le terrain comment se passe ce CEPE à l’essai a abdiqué en plein milieu d’un chemin. La suite n’était plus praticable. Nous avons marché pendant 1 km sur un chemin dévasté par les orages avant d’arriver à l’école. Le site était enchanteur. Mais ce n’est pas ça l’important.

Comme dans toutes les écoles que j’ai visitées ce jour-là, les enfants étaient appliqués à répondre du mieux qu’ils pouvaient à ce CEPE à l’essai. Les autres enfants de l’école étaient en congé. Mais les privilégiés, c’étaient eux. Eux qui pouvaient être à l’école ce jour-là. Même si c’était pour faire un examen qui n’en était pas vraiment un. Ils étaient tous venus à pied parcourant entre un et cinq kilomètres. Et ils étaient heureux. Cela se voyait sur leurs sourires. Ils étaient heureux, car ils pouvaient être à l’école, et pas à la maison. C’est cela l’important.

Ils étaient heureux d’être à l’école. Ils n’y trouvent rien : pas d’ordinateurs, pas de salle de sport, pas de maîtres spéciaux, pas même d’électricité. Ils n’y trouvent que l’accès au savoir. Et les amis, bien sûr. C’est important, les amis, pour apprendre.

J’étais le deuxième vasa qui arrivait dans cette école. Comprenez le deuxième étranger, le deuxième blanc. L’accueil fut chaleureux. Simple mais chaleureux.

Alors, pourquoi ce billet figure-t-il sous un libellé « Coup de blues » ? Tout simplement parce que je ne pouvais m’empêcher de penser à nos enfants et à nos enseignants dont beaucoup demandent toujours plus de moyens, toujours plus de privilèges… Comment faire pour que nos élèves occidentaux aillent à l’école pour le simple bonheur d’apprendre accompagnés d’enseignants qui seraient animés par le simple bonheur d’enseigner ?

Madagascar est un superbe pays, mais qui respire la pauvreté. En quittant cette école d’Ambohibary, je me demandais néanmoins où se trouve la vraie pauvreté, celle de l’esprit. Et ça, c’est important.

dimanche 4 mai 2008

Rire

C'est aujourd'hui la journée internationale du rire. Il n'y a pas de quoi rire, mais rions. L'inventeur de cette journée, le docteur indien Madan Kataria, proclame que "nous ne rions pas, car nous sommes heureux, nous sommes heureux, car nous rions".

A vrai dire, je ne suis pas vraiment un comique, et il m'arrive assez rarement de rire. Mais je reconnais que c'est un art qui a de grandes vertus. Comment mieux décompresser qu'en se prenant une bonne bouffée de rire ? Comment mieux partager sa joie qu'en délirant ensemble autour d'un éclat de rire ? Comment vivre mieux qu'en ayant par ci par là un de ces rires qui permet d'éliminer toutes les toxines nauséabondes qui encrassent nos pensées ?

Le rire ne se commande malheureusement pas. Il ne suffit pas de vouloir rire pour rire ! Et je suis si mauvais pour ce genre de choses que je ne sais même pas vous raconter une bonne blague, car je n'en connais pas. Je les oublie toutes.

N'empêche, rions. Rions à perdre haleine. Rions à ne plus savoir tenir nos côtes. Rions à décoller du monde. Rions à ouvrir la vie.

Et si vous ne riez pas aujourd'hui, ce n'est pas grave : ça ira aussi demain, ou après-demain... Tant qu'il y a du rire, il y a... du rire !

vendredi 2 mai 2008

Le prix du cornet de frites

Alors qu’il existe une certaine probabilité que le gouvernement belge tombe dans les jours qui viennent du fait de cette bêtise sans intérêt qu’est la scission de BHV, il s’est quand même trouvé un ministre qui s’est inquiété d’un véritable problème, qui préoccupe chaque belge : le prix du cornet de frites !

C’est vrai que lorsqu’on prend les chiffres bruts, il y a de quoi se poser des questions. L'année dernière, le prix des pommes de terre a en effet baissé de 25%, pendant que celui des frites augmentait en moyenne de 4%. Le ministre de l'Économie et de la Simplification administrative, M. Van Quickenborne, a donc diligenté une enquête pour clarifier le prix correct d’un paquet de frites, faisant ajouter par son porte-parole que la situation actuelle paraissait un peu anormale !

Comme si vendre une frite ne consistait qu’à vendre une pomme de terre ! Il faut quand même la transformer en frites. Il faut la transporter, la découper, la chauffer. Tout cela demande de l’énergie dont, on ne peut le nier, le coût a quand même augmenté. Il faut aussi, qu’on le veuille ou non, rémunérer le vendeur de frites et tous ceux qui sont intervenus dans la chaîne. Et il ne me semble pas y avoir de raison que le vendeur de frites voie ses revenus diminuer sous prétexte que le prix de la pomme de terre diminue. Bref, il ne faut pas être ministre pour comprendre qu’une baisse du prix de la matière première n’entraîne pas nécessairement une baisse du prix du produit fini.

Il y a un autre exemple qui nous concerne tous. Tout le monde constate, de toute évidence, l’augmentation du prix de l’essence. Ça fait mal au porte-monnaie… c’est trivial de le dire. Mais cette augmentation est-elle proportionnelle à celle de la matière première ? Rien n’est moins sûr.

En janvier 2006, le prix du baril de pétrole était de 65 USD. Il est aujourd’hui d’environ 119 USD, soit une augmentation de 83,1% !
En janvier 2006, le prix maximum d’un litre d’essence 95 sans plomb était, en Belgique, de 1,31 EUR. Il est pour le moment d’1,54 EUR. Cela représente une augmentation de 17,6%, bien moindre que celle du pétrole brut.

Un double mécanisme explique le phénomène : d’une part, l’évolution du cours du dollar par rapport à l’euro. En janvier 2006, 1 EUR valait 1,22 USD. Aujourd’hui, 1 EUR = 1,55 USD, soit une perte de 21,3% pour le dollar. Si pour de nombreuses entreprises européennes, cela pose problème, pour le citoyen lambda, c’est une chance. Notamment, si on convertit le prix du baril en euros : en janvier 2006, il valait 53,27 EUR alors qu’il en vaut 76,77 aujourd’hui, soit une augmentation de 44,11%. D’autre part, les mécanismes de cliquet permettent de contrôler le prix du pétrole et de réduire en tout cas son impact sur le prix de l’essence à la pompe (même s’il ne faut pas se leurrer : au passage, c’est surtout l’État qui s’enrichit grâce au montant des accises… et l’État, c’est nous !).

Que retirer de tout cela ? Évidemment, avant tout que tout augmente. On ne peut plus nier que le coût de la vie a pris une courbe ascendante… et ce sont les « pauvres » qui trinquent les premiers. Mais aussi, que les augmentations ne sont pas toujours celles qu’on croit. Enfin, que tant qu’un ministre belge se préoccupe du coût du paquet de frites, c’est que la Belgique continue à exister !

Il y a de quoi se réconcilier autour de ce coût. Ce serait le coup de la frite ! On peut aussi se réconcilier autour de la soupe, une autre spécialité belge (notamment). Un ami (il se reconnaîtra…) m’a informé qu’au Festival de la soupe qui a lieu depuis plusieurs années maintenant dans un quartier populaire de Lille à Wazemmes, des Belges y proposaient la soupe de la réconciliation. Avant cela, il y avait d’un côté une soupe flamande et de l'autre une soupe wallonne. Chacune était bonne, mais sans plus, il manquait quelque chose. En mélangeant les deux, la soupe prit une saveur inégalable ! Ah, si nos politiciens pouvaient aussi faire de la soupe belge…