mardi 26 décembre 2017

S.O.S. Bonheur… quel « bonheur » !

À la fin des années 1980, j’avais été subjugué par les trois tomes « S.O.S. Bonheur » de Griffo et Van Hamme. De petites fables dystopiques qui mettaient à nu les angoisses de nos sociétés. J’avais été particulièrement impressionné par l’épisode « Sécurité publique ». Joachim Robin-Dulieu est l'inventeur et le promoteur de la Carte universelle (CU), qui remplace tous les moyens de paiement et d'identification. Jusqu’au jour où sa propre carte n'est reconnue valable nulle part. Joachim Robin-Dulieu n'est tout simplement pas présent dans le Grand fichier central de la population, et il doit prouver son existence. Bref, il n’existe plus et finira là où ceux qui n’existent pas se doivent d’être : nulle part.

Trente ans plus tard, le concept et la série sont repris avec le même dessinateur, mais un nouveau scénariste tout aussi belge : Stephen Desberg. Le dessin de Griffo a fortement évolué, beaucoup plus réaliste, ce qui accentue justement le côté réaliste de la série. Ce n’est pas vraiment de la « politique-fiction ». C’est de la « politique-réalité » !

Et c’est atroce. Ou sublime. Comme on veut ! Comme on le sent. Les 10 petites histoires racontées sont d’un sinistre absolu. On est vraiment dans la merde. Et ça sent vraiment mauvais.

Desberg nous expose un monde régi par les penseurs d'extrême droite, un univers dominé par l'argent, par les valeurs morales réactionnaires, par la figure du mâle dominant ou encore par la préférence nationale. On est dans le quotidien le plus implacable. Mais ce n’est pas un futur qui risquerait un jour de devenir le nôtre : c’est clairement notre réalité, notre société, qui est mise en image et en abîme. Il suffit de suivre un peu les aventures politiques de Theo Francken pour s’en convaincre. Aujourd’hui, il suffit d’être totalement inhumain pour devenir intouchable.

Et c’est là que je m’émerveille. Cette BD est sinistre, ravageuse, destructrice. Mais peut-être, justement, pourrait-elle nous sauver ! En réalité, par sa noirceur totale, « S.O.S. Bonheur – Saison 2 » est une véritable lumière. Il suffit de la percevoir, de lui donner sens, de la saisir,  d'y croire. C’est possible, j’y crois ! Du moins, je veux y croire…

lundi 18 décembre 2017

Test-crachats !

Maintenant que mon différend avec Test-Achats est terminé, je peux en parler librement. J’avoue avoir eu peur d’en parler avant tant j’ai découvert que les pratiques de cet organisme de défense des consommateurs ne vont pas toujours dans le sens de ceux-ci une fois qu’il s’agit de leurs propres pratiques commerciales.

Ce n’est pas une histoire extraordinaire en soi, mais si elle me reste sur la gorge, c’est exclusivement parce qu’elle témoigne d’un manque de respect du client que Test-Achats serait par ailleurs le premier à dénoncer lorsque d’autres sont concernés.

Les faits :
  • Je suis abonné depuis très longtemps à Test-Achats et Budget & Droits. Globalement, je trouve leur démarche intéressante, même si j’ai toujours eu quelques doutes quant à certaines méthodes utilisées. Mais il faut sans doute ce qu’il faut.
  • Néanmoins, le 12 septembre, je les informe que je souhaite supprimer, sans délai, mes abonnements.
  • Le 25 septembre, soit après 13 jours de silence, je suis contacté par téléphone par le Service Abonnements. Plutôt que d’acter mon renoncement, mon interlocuteur me propose de bénéficier de nouvelles conditions. Je réponds que je ne suis pas intéressé. Je reçois cependant le même jour un courriel me disant « Faisant suite à notre entretien téléphonique de ce jour je réduis votre abonnement de 30% pendant une année… ». Je réponds immédiatement en confirmant ma demande de désabonnement de toutes les revues.
  • Le même jour, je reçois le message suivant « Je vous confirme la suppression de votre abonnement à la plus proche échéance, soit à partir du 1er Novembre 2017. Nos listes d'adressage étant prévues à l'avance, il est possible que nos revues vous parviennent encore durant deux mois après la suppression.  Nos envois supplémentaires restent bien sûr gratuitement à votre disposition ». Correct, même si on peut douter du professionnalisme d’un organisme qui ne parvient pas à supprimer des envois mensuels endéans deux mois.
  • Ayant quelques doutes quand même, je me dis qu’il vaut mieux suspendre ma domiciliation bancaire. Je dis bien « suspendre ». Je sais bien qu’en réalité, seul le bénéficiaire d’une domiciliation peut la supprimer. Je vais donc sur le site internet de mon compte bancaire… et je ne vois pas la dite domiciliation. Je m’en étonne, mais je me dis que Test-Achats l’a supprimée et je m’en réjouis. En réalité, elle était simplement reprise sur la deuxième page de la liste de mes domiciliations, mais comme je n’utilise pas celle-ci tous les jours, ni même tous les ans, je n’ai pas pensé au fait qu’il pouvait y avoir une deuxième page…
  • Vous me voyez venir avec mes gros sabots : le 6 novembre 2017, mon compte bancaire est débité du montant de l’abonnement, alors même celui-ci a été résilié depuis le 12 septembre.
  • J’écris immédiatement à mon interlocuteur du Service des abonnements, en demandant le remboursement immédiat. Celui-ci me téléphone assez rapidement, reconnaissant l’erreur, mais me dit qu’il ne peut rien faire, ou pas grand chose, pour le remboursement. C’est à moi de m’en occuper auprès de ma banque… qui me répond assez logiquement qu’elle ne sait rien faire !
  • S’en suit des temps de silence, surtout. J’utilise même la procédure de plainte mise en place par Test-Achats pour réclamer auprès de toutes les entreprises possibles et imaginables, sauf que cette fois, je me plains contre Test-Achats. Sans réaction.
  • Le 21 novembre, un employé de TA m’écrit faire « le nécessaire pour effectuer le remboursement dans les plus brefs délais, c'est-à-dire endéans les 15 jours ». Le 28 novembre, une autre employée de TA me « confirme la suppression de votre abonnement à partir du 01/12/2017 ». Le même jour, un troisième employé de TA m’ « informe que le remboursement a bien été versé sur votre compte bancaire le 24/11/2017 ». Ne voyant rien, TA me confirme le 6 décembre que le remboursement «  vous parviendra en début de semaine prochaine ».
  • Et puis, ce 18 décembre, plus de trois mois après ma résiliation et alors que je n’y croyais plus vraiment, le remboursement est enfin arrivé sur mon compte.
C’est une histoire sans importance qui ne concerne que quelques euros. N’empêche. Si je n’en avais pas assuré un suivi de proximité (ce que peu de personnes peuvent se permettre), je ne suis pas sûr que je les aurais jamais revus. Ce n’aurait pas été dramatique, mais bien inacceptable.  Test-Achats est soi-disant un organisme qui défend les consommateurs. Mais il s’empresse de rouler ceux-ci dans la farine dès qu’il s’agit de défendre ses propres intérêts plutôt que les leurs ! Inacceptable, je le répète !

dimanche 3 décembre 2017

D’une semaine de travail à deux nuits en prison

Ainsi donc, un professeur d’université marocain invité pour une semaine de travail par l’Université libre de Bruxelles s’est retrouvé emprisonné au Centre fermé 127bis de Steenokkerzeel. Je passe les détails que vous trouverez dans vos médias préférés. Simplement, cela aurait pu m’arriver des centaines de fois. Mais cela ne m’est jamais arrivé. Ça n’arrive en fait qu’en Belgique. Celle de MM. Francken et Michel.

J’ai parcouru le monde entier pour aller « travailler » avec simplement un « visa touristique ». Mes missions duraient en moyenne une semaine et il n’y avait donc aucune raison de déposer une demande pour un visa professionnel. Ça se passe comme ça dans tous les pays du monde, des centaines de fois par jour (voire, des milliers…).

Pour tout dire, j’avais quand même compris qu’il valait mieux respecter certaines « règles » pour se faciliter la vie. Par exemple, vivant en Flandres tout au long de ma carrière professionnelle, j’étais né à « Ukkel » alors que l’évidence était pour moi d’être né à « Uccle ». J’ai vite compris que la concordance entre mon passeport et le bout de papier que je remplissais avant d’entrer dans un pays était préférable au respect de mon évidence linguistique ! J’avais aussi compris qu’il ne servait à rien de m’escrimer à dire quel était mon vrai métier « Consultant en éducation et en formation », ce qui semblait du chinois même au Vietnam… Bien plus simple d’écrire que j’étais « Enseignant » alors que je ne l’étais plus. Ça m’évitait d’être confronté à la bêtise d’un contrôleur quelconque.

Le professeur Hakkou en a rencontré un ! Pas de chance pour lui. Il s’est retrouvé deux nuits en « prison ». Le contrôleur en question n’a rien compris à la situation, tout simplement parce que personne ne lui a jamais demandé de comprendre. Juste d’appliquer des règles, aussi stupides soient-elles.

Ce qui est à nouveau grave dans cette affaire, c’est la réaction de notre secrétaire d’État, M. Theo Francken. Dans un premier temps, il a juré que la Police des Frontières n’avait fait que ce qu’elle devait, qu’il n’y avait « aucune erreur ». Par la suite, je l’ai vu moins sûr de lui. Son discours devenait « Mais où est l’erreur ? », voulant ainsi déporter le poids de l’erreur qu’il commençait à reconnaître.

Une fois de plus, cet incident ne changera strictement rien. M. Francken continuera à mener sa politique d’exclusion et d’enfermement, avec la bénédiction du Premier ministre, M. Charles Michel, pourtant diplômé de l’Université libre de Bruxelles. Il est pour lui plus important d’obéir aux sbires de la N-VA que de respecter ses propres pensées libérales.

N’empêche, n’est-on pas tombé bien bas ? Tout en sachant que M. Hakkou, professeur d’université, vice-président de l’Université Mohamed Premier, située à Oujda, avait quand même un avantage de poids par rapport au commun des mortels…

mercredi 29 novembre 2017

Plateforme citoyenne

Depuis quelques semaines, des citoyens et citoyennes s’organisent pour héberger le temps d’une ou de plusieurs nuit(s) des exilés réunis au Parc Maximilien, à Bruxelles. Là où les responsables politiques sont incapables d’apporter une réponse concrète et humaine à ces jeunes en recherche d’un monde meilleur, la Plateforme citoyenne permet de leur apporter un peu de chaleur, un peu de douceur et surtout beaucoup d’humanité.

Disons-le tout de suite : pour diverses raisons personnelles, je ne participe pas pour le moment à cet accueil. Je ne m’en sens pas culpabilisé. Néanmoins, je soutiens pleinement ce mouvement citoyen et je fais partie des 21 297 membres de la Plateforme sur Facebook, principal outil de gestion et de partage.

Le principe est simple : chacun peut signaler qu’il peut inviter un ou plusieurs hébergés. Soit l’hôte va le(s) chercher au Parc Maximilien, soit d’autres personnes agissent comme chauffeurs. Ensuite, c’est de l’ordre de la rencontre individuelle sans d’autres exigences que le respect de l’autre et la richesse de l’accueil. Le lendemain, l’hébergé retourne vivre sa vie d’exilé. Parfois, des accueils se font à plus long terme, sans jamais aucune obligation.

À lire les témoignages, il se passe dans ces accueils des moments extraordinaires, tant pour les hébergés que pour les hébergeurs, et – au-delà – dans les contacts entre les citoyens qui se découvrent solidaires dans le partage et la découverte.

Depuis que cette plateforme citoyenne agit, il n’y a pas plus d’exilés qui arrivent au Parc Maximilien. Pas d’appel d’air, comme le prétendrait M. Francken, Secrétaire d'État belge à l'Asile et à la Migration chargé de la Simplification administrative, dont le seul objectif est de limiter de manière drastique l’asile et la migration (et de préparer sa réélection comme député). C’est en réalité lui, et les autres responsables politiques, qui devraient mettre en place un processus d’accueil, certes strict mais humain. On peut le regretter, mais j’ai plus envie de me réjouir de l’action, tant individuelle que collective, de ces citoyens qui simplement mettent en pratique la seule valeur universelle : la fraternité !

Dans les nombreux témoignages publiés, tout n’est pas toujours rose. Bien sûr, il y a parfois des difficultés. Mais l’expression qui revient le plus souvent – telle un constat – est « un autre monde, meilleur, est donc possible » !

lundi 20 novembre 2017

Défi noir et blanc


C’est par cette photo que j’ai été invité par ma sœur préférée à participer au « Défi noir et blanc ». Seven days. Seven B&W photos of your life. No people. No pets. No explanation. Challenge someone every day. Today I challenge FMG. Elle avait bien choisi la photo : depuis 1958, j’ai toujours prétendu être le concepteur génial de l’Atomium.  Je me suis donc laissé inviter et j’ai relevé le défi.

J’ai commencé par le traduire : Sept jours. Sept photos noir et blanc de votre vie. Pas de personnes. Pas d'animaux. Aucune explication. Défier quelqu'un tous les jours, avec toute liberté. Aujourd'hui, j'invite ##. Les plus subtils auront constaté que le « défi (challenge) » s’est transformé en « invitation avec toute liberté ». Comme beaucoup, je déteste ces chaînes où l’on vous défie de publier un message sous peine de ne plus être amis ou encore de menacer la Terre entière des pires maux pour des mots non partagés. J’étais séduit par l’idée de partager des photos en noir et blanc, témoins de ma vie, sans personnes ni explication. Mais je ne me sentais aucune envie de défier qui que ce soit à en faire de même. J’ai donc « invité avec toute liberté » quelques amis. Merci à ceux qui ont accepté l’invitation, mais aussi aux autres qui m’ont remercié tout en m’expliquant leurs difficultés d’y répondre.

J’ai donc publié sept photos. Sans explication. Je voudrais les reprendre ici, avec un peu d’explication cette fois. Je précise d’abord que je suis l’auteur de toutes ces photos (©FMG). Ce n’était pas demandé. Mais, pour moi qui aime photographier la lumière, cela me semblait aller de soi.

Jour 1
Gratte, 1974. Il y a des personnages, mais ce sont les pierres qui m’importent. Ce village d’Ardèche m’a permis de me construire. J’y ai fait des séjours chaque année de 1969 à 1983. Pour rénover les pierres, mais aussi partager avec les gens, dont des handicapés mentaux adultes. J’ai tout découvert à Gratte. Aussi, j’ai invité celle qui, ces dix dernières années, a énormément contribué à ma construction de senior épanoui.

Jour 2
Du carabouya ! Un peu ma madeleine de Proust. Souvenirs d’une enfance heureuse, avec un attachement indéfectible à la ville de Namur, annonciateurs de mes nombreux séjours professionnels en Afrique. J’ai invité un ami qui court derrière ses rêves tout en les réalisant.

Jour 3
La Tour du Millénaire, à Louette-St-Pierre, près de Bouillon. Une véritable prouesse architecturale. Souvenir d’une prouesse personnelle de celle que j’aime, lors d’un de ces moments familiaux qui permettent de toujours se construire et se projeter. Invitation naturelle pour mon architecte préférée.

Jour 4

Randonnée en Brabant flamand alors que nous étions enfin en Brabant wallon. J’y ai appris les plaisirs de la balade tout en continuant à lui préférer ceux des ballades. Tout naturellement, j’ai invité une amie canadienne – jamais rencontrée ! – qui sait ce que photographier la nature veut dire ! In piena libertà.

Jour 5
Un instant figé mais ô combien libérateur, à Durbuy, où les nuages sont en bas et où la platitude crée le relief. Évidence d’inviter un ami de rhétorique – quoique ! – seul à même de décider s’il faut écrire nénuphar ou nénufar

Jour 6
Elle est là, dans notre jardin. Désuète. Obsolète. Sublime. La fleur est venue toute seule pour l’embrasser et m’embraser. Belle occasion d’inviter un ami qui va et vient dans ma vie, sans trop savoir s’il doit se poser ou se pauser. Qu’importe d’ailleurs. Seule la fleur importe.

Jour 7
Symbole de notre nouvelle vie. Dans la lumière et l’ombre. Tournée vers l’essentiel, en pleine nudité et simplicité. Les mains ouvertes pour créer. Invitation à toute personne qui veut aussi profiter de la vie !

Comme il serait vain de se priver des plaisirs de la vie, j’ai publié – juste pour le plaisir des yeux, et aussi pour ne pas faire comme tout le monde – un huitième jour.
Je me baladais. Le soleil était lumineux. Soudain, cette vue me fut offerte. Elle était encore bien plus belle en vrai que sur la photo. Elle s’imposait. Elle représentait tout ce qu’est ma vie aujourd’hui. Un jour, peut-être, je vous expliquerai pourquoi et comment. Aujourd’hui, seul le plaisir compte… Et je me dis que ce périple noir et blanc m’a vraiment permis de revoir toutes les merveilleuses couleurs de ma vie.


jeudi 19 octobre 2017

Moi aussi… j'ai peur d'être homme

Moi aussi. Me too. Un soir, je suis allé au lit avec mon amie. Je l’aimais bien, mais pour plusieurs raisons complexes, depuis le début de notre relation, je n’avais pas envie de faire l’amour avec elle. Elle le voulait. C’est normal. Ce soir-là, elle ne m’a pas laissé le choix. Elle s’est littéralement empalée. Je n’ai rien pu faire. Je me suis senti violé. Je ne dis pas que j’ai été violé. Je l’ai vécu comme tel et je suis marqué à vie, mais je sais que ce n’est rien par rapport à ce que peut endurer une femme.

Les femmes doivent en plus assumer la banalisation du harcèlement viril. La plupart des harceleurs, des condescendants et même des violeurs ne se rendent pas vraiment compte de ce qu’ils font. Pour eux, c’est « normal » et « naturel » de mettre la main aux fesses, de lancer une boutade salace, de prendre possession de ce corps désirable et perçu ouvert. La question du consentement ne se pose même pas : la femme n’est – pour eux – qu’un objet qui ne peut qu’être soumis à leur force, leur pouvoir, leur désir. La société, globalement, ne les contredit pas. Elle se comporte aussi trop souvent comme si c’était normal, comme si cela allait de soi.

Ce qui se passe mondialement pour le moment est important. Je ne suis pas sûr que cela changera fondamentalement les choses. Mais au moins, une parole se sera libérée. Les hommes ne peuvent plus ignorer l’ampleur du phénomène, tant en ce qui concerne l’étendue des femmes blessées qu’au niveau de la douleur que l’arrogance masculine engendre chez elles.

J’ai peur d’être homme. Fondamentalement, je ne me crois pas capable de la moindre parole ni du moindre geste offensants. N’empêche, comme mon ami Robert l’a très bien chanté en 1978, j’ai peur d’être homme.

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J'ai peur d'être homme (Robert©1978)


femme pillée,
violée, souillée
femme je pleure
ma mère ma sœur
ma fille - son âme
son corps - ma femme
perdus en toi
quand aux abois
tu fus ouverte
et recouverte
contre ton gré
contraint, forcée
j’ai peur d’être homme
en sachant comme
un autre moi
usa de toi

car nul n’est île
en soi-même, il
est frère tu sais
si frère de laid
s’il rit encore
la honte mord
mes cœur esprit
ô je t’en prie
toi fracturée
toi déchirée
si tu le peux
pardonne un peu
c’est pour chacun
qu’il fit soudain
- jouant de toi -
sonner le glas

le glas des gens
si bien pensants
qu’ils ne voient que
ce qui est eux
ceux qui « prison »
« ségrégation »
« chambre à louer
sauf étranger »
je ne voudrais
pas juger mais
si fait horreur
le violeur
au nom des femmes
que l’on condamne
à ses côtés
la société

bonnes consciences
avez-vous chance
après chanté
d’aller en paix
vous n’êtes pas
de ces gens-là
mais le voisin
peut-être bien
quant à moi-même
femmes que j’aime
violées ou non
je garde mon
sexe coupable
d’être capable
par un baiser
d’assassiner

lundi 16 octobre 2017

Violence à deux vitesses

« La violence n’est jamais une réponse. Nous condamnons toute forme de violence et réaffirmons notre appel au dialogue politique ». C’est en ces termes que Charles Michel, 1er ministre belge, s’est exprimé le 1er octobre pour condamner les violences policières en Catalogne. En Belgique, ce 15 octobre, les policiers ont appréhendé – non sans une certaine violence – une quarantaine de migrants au Parc Maximilien. Charles Michel n’a pas (encore ?) condamné cette violence !

Il en est même responsable. Bien sûr, le responsable politique de cette rafle est Philippe Close, le bourgmestre de Bruxelles. Encore un de ces socialistes qui ont oublié que l’essence même du socialisme est la solidarité ! Charles Michel, au moins, n’est pas socialiste. Il est libéral. Au nom de la liberté, le libéralisme défend le chacun pour soi, surtout chacun pour les riches. Associé aux nationalistes flamands de la N-VA, Charles Michel se fait l’apôtre de la défense de nos privilèges belges et lutte donc contre cette migration soi-disant invasive.

Je ne pense pas qu’il faille ouvrir nos frontières et accueillir toutes les personnes qui fuient leur pays pour toutes sortes de raisons qui se résument toutes à celle-ci : leur vie est devenue insupportable. Alors, elles cherchent ailleurs, la plupart du temps au péril de leur vie. Elles savent bien que ce ne sera pas une sinécure. Mais c’est leur seul espoir. Même avec la meilleure volonté du monde, ni la Belgique ni même l’Europe ne pourraient toutes les accueillir. Il y a cependant place pour pas mal de ces migrants. Mais la question n’est pas là aujourd’hui.

Qu’on le veuille ou non, des migrants arrivent chaque jour en Belgique. De manière « illégale » pour la plupart d’entre eux. Beaucoup espèrent atteindre l’eldorado britannique et ne cherchent donc pas à légaliser leur présence sur le sol belge. Ils se retrouvent alors au Parc Maximilien, juste de passage. Soutenu par le gouvernement fédéral, Théo Franken, secrétaire d'État à l'Asile et aux Migrations, a décidé que ce n’était pas possible. Le système des rafles policières a donc été mis en place.

Pour éviter celles-ci et surtout pour être solidaires avec ces êtres humains que sont les migrants, des bénévoles belges ont mis en place un accueil de nuit. Ils pallient ainsi l’incurie des responsables politiques qui refusent de mettre en place un hébergement. Alors, des gens comme vous et moi accueillent chaque soir des migrants, pour une ou plusieurs nuits. Ces derniers se retrouvent ensuite au Parc Maximilien et sont ensuite à nouveau accueillis, pour une ou plusieurs nuits. Ce système d’accueil, basé sur l’initiative privée, fonctionne : il n’y a plus de migrants qui traînent la nuit au Parc Maximilien.

Hier, les bénévoles étaient en train d’arriver pour prendre en charge « leurs » migrants. Mais, c’est une autre (prise en) charge qui a eu lieu : les policiers ont débarqué et embarqué une quarantaine de migrants. Non sans violence. Ni sans menaces vis-à-vis des citoyens belges.

C’est inacceptable. En tant que citoyen belge, je clame clairement « Pas en mon nom » ! Ces agissements témoignent d’une absence totale de politique migratoire. Il n’y a aucune gestion de la migration. Juste une répression gratuite et aveugle. Tout ça avec la bénédiction de tous les partis traditionnels. Avec même le relatif silence complice d’Écolo. Bien sûr, il y a là un calcul électoral : lutter contre les migrants se révèle malheureusement gagnant. C’est justement là qu’on est en droit d’attendre de nos responsables politiques un sursaut de conscience. Il ne viendra pas. Seule la violence viendra, prenant – ici comme ailleurs – la place du dialogue politique et de la responsabilité collective.

vendredi 22 septembre 2017

Chansons oubliées : Clémentine, par le Grand Jojo (1982)


C’était ma première mission en Afrique. En 1992, il y a 25 ans, je me retrouvais en Tunisie, pour une expertise au service du Ministère de la Formation Professionnelle et de l'Emploi, quant à la restructuration des centres de formation professionnelle et à la mise en place d’un système d’aide aux PME, sous un financement de la coopération belge. En réalité, je ne connaissais rien à la formation professionnelle. Je ne savais même pas ce qu’était une PME ! Mais voilà, être expert, ce n’est pas savoir. C’est surtout pouvoir analyser et le faire très rapidement.

Toujours est-il qu’un soir d’octobre 1992, j’avais été invité chez mon « commanditaire » dont j’ai oublié le nom, mais pas la douceur de la soirée. J’étais ébloui : nous étions fin octobre et nous dégustions un excellent repas sur la terrasse de son appartement, sous une température des plus clémentes ! C’est le mot d’ailleurs. De « clémente » à « Clémentine », il n’y a qu’« in » !

Au moment du dessert, nous l’étions tout à fait. « In ». Je ne sais plus trop comment ni pourquoi, mais – en bons belges – nous en sommes venu à parler du Grand Jojo. C’était un chanteur « has been ». Un individu qui, s'il fut célèbre à un moment donné, est passé de mode et n'est plus au goût du jour.  Bref, une ancienne gloire, dorénavant méconnue. Je promis à mon hôte – le vin tunisien a des saveurs particulières – de retrouver quelques chansons éternelles de ce chanteur dont plus personne n’avait connaissance. Je tins ma promesse, et j’envoyai quelques temps plus tard une cassette des meilleures chansons de cet artiste oublié, mais ô combien sublime ! J’ai toujours ignoré si cette cassette était arrivée en Tunisie, mais qu’importe. Elle m’avait permis de redécouvrir le Grand Jojo.

Redevenu complètement anonyme en 1992, cet artiste est en 2017 une valeur sûre du paysage artistique belge. Il a 81 ans désormais, mais il parvient encore et toujours à enflammer des soirées de Fête nationale ou autres ! Quelque part, il est le symbole de la « zwanze » bruxelloise. La créativité belge est loin de se réduire à celle-ci. Mais sans elle, nous ne serions pas tout à fait belges. Et donc, sans le Grand Jojo, la Belgique ne serait pas pleinement ce qu’elle est…

En 1982, notre artiste nous a proposé une chanson d’amour « Clémentine ». C’est elle que j’ai choisie pour rendre hommage à ce grand homme. Sans doute parce qu'elle me ramène aux voyages en ces contrées lointaines. Et aussi, surtout, parce qu’elle se termine là où tout commence, sans qu’on sache vraiment où cela nous mène !

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Clémentine


Elle aimait bien les p'tits bals musette
Les p'tits gâteaux et l'accordéon
Au thé dansant, le dimanche chez Lisette
Elle se mettait à la table du fond
Elle regardait l'accordéoniste
Tout en mangeant de la pâtisserie
Elle se mouchait, reniflait, c'était triste
Elle était seule et faisait tapisserie

Elle n'avait pas les yeux en face des trous
Clémentine
Elle était bête et laide comme un pou
Clémentine
Et jamais personne lui donnait rendez-vous
Clémentine
Quand elle pleurait, ça coulait de partout
Clémentine

Toutes les nuits elle rêvait, c'était chouette
Christian Vidal lui tenait la main
Et Claude François l'engageait comme Clodette
Jacques Dutronc était son Arsène Lupin
Le beau Johnny lui criait "Je t'aime !"
Mais ce n'était qu'un rêve sans espoir
Le matin, elle pleurait comme une Madeleine
Quand elle se regardait dans le miroir

Mais un jour elle vit une petite annonce
"Monsieur sérieux cherche une très jeune fille
Je suis rentier et je m'appelle Alphonse
Je fais des voyages en Amazonie"
Et c'est comme ça qu'un beau jour Clémentine
S'est embarquée sans jamais se douter
Qu'elle s' retrouverait derrière une vitrine
D'un strip-tease bar au pays des pygmées

dimanche 10 septembre 2017

Plus loin, plus beau

Ce 10 septembre 2017, Raphy Rafaël inaugurait son nouveau spectacle « Plus loin, plus beau », du même nom que son nouveau CD tout frais tout beau ! Ce sont deux pépites, à tout niveau, qui ne demandent qu’à être transformées en joyaux.

Certains me diront que je suis mal placé pour en parler objectivement. C’est vrai. Raphy est un ami, de longue date. Nous avions une quinzaine d’années lorsque nous avons chacun écrit nos premières chansons. Notre premier auditeur était l’autre ! Nous étions déjà, tous les deux, enthousiastes et critiques. C’est sur cette base que se sont construites notre amitié et notre complicité artistique. Raphy est devenu professionnel, moi juste amateur, éclairé j’espère, mais notre exigence artistique est restée commune et plurielle.

Raphy sort donc un nouvel album, le premier depuis 2009. Attendre 8 ans en valait la peine. Raphy a construit sa carrière à partir du « jeune public ». Il s’adresse à celui-ci, c’est évident. Mais pour moi, il chante surtout pour un « tout public ». Peu importe l’âge. Seule la sensibilité compte. C’est là que se trouve le vrai Raphy : dans la fragilité des mots, dans l’émotion de la voix limpide et de l’énergie instrumentale, dans l’universalité des mots partagés…

Près de 50 ans plus tard, je vibre encore ! C’est ce trouble qui me pousse à vous partager une chanson parmi celles de son nouvel opus. C’est une chanson de mecs. Des émotions de mecs. Celles qui vous éblouissent et vous remuent fondamentalement, là où c’est bon de le sentir ! Que voulez-vous ?

Écoutez cette chanson. Laissez venir l’émerveillement, l’éblouissement. Sentez cette vibration musicale qui vous envahit dans le moindre de vos pores. Que voulez-vous ? C’est merveilleux !

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Que voulez-vous ?

 

Que voulez-vous
Quand je l’ai vu marcher
Que voulez-vous
Mon cœur s’est envolé
Que voulez, que voulez-vous

Que voulez-vous
Quand elle s’est retournée
Que voulez-vous
Ses yeux m’ont caressé
Que voulez, que voulez-vous
 
Que voulez-vous 
Quand elle s’est approchée 
Que voulez-vous 
Mes pas ont hésité 
Que voulez, que voulez-vous 

Que voulez-vous 
Quand mes lèvres ont tremblé 
Que voulez-vous 
Elle m’a embrassé 
Que voulez, que voulez-vous 

Que voulez-vous 
Mais que s’est-il passé 
Que voulez-vous 
On ne s’est plus quittés…

vendredi 11 août 2017

Laurent, prince maudit ou maudit prince ?

Disons-le d’emblée : le « sujet » de ce billet n’a aucune espèce d’importance. Il serait beaucoup plus pertinent de parler des tensions nord-coréennes vs nord-américaines, des œufs qui nous pourrissent la vie, du terrorisme qui entraîne des mesures tueuses de liberté et de démocratie, de la négation de plus en plus forte des droits de ceux qui n’ont pas eu la chance de bénéficier d’un travail décent et stable… ou encore des risques illusoires pris par tous ces migrants à la recherche d’une vie de qualité minimale ou enfin de la famine insupportable en Soudan du Sud, en Somalie, au Nigéria, au Yémen… Mais bon, voilà, parfois, il faut aussi pouvoir aborder des sujets légers (quoique, dans ce cas, je serais curieux de connaître son poids).

Notre Laurent de Belgique s’est donc fait remarquer, une fois de plus. Et le moins qu’on puisse dire est qu’il déchaîne les passions ! C’est pour ou contre ! Est-il un prince maudit, auquel les autorités chercheraient noise, à tort et déraison ? Ou est-il un maudit prince, qui ne cherche qu’à s’attirer les foudres officielles en multipliant les provocations et autres jérémiades ? Sans doute un peu des deux : la vérité est rarement noire ou blanche, elle s’épanouit le plus souvent dans les tons gris, ceux sur lesquels on a le moins de prise.

Un des éléments qui revient souvent dans les commentaires qui s’enchaînent et se déchaînent est une comparaison avec son frère aîné. Celui-ci serait d’une nullité sans nom et féodée au gouvernement fédéral inique par définition, alors que le rebelle Laurent, lui au moins, aurait une existence propre, vertueuse de par sa proximité au peuple et – surtout – sa défense des animaux ! Les comparaisons de quotient intellectuel abondent, toutes sans aucun fondement scientifique ! Une analyse des réalités royales et princières, montre qu’en réalité, Philippe, 7e roi des Belges, a simplement bien intégré les règles liées à son statut et se contente de faire ce que ses conseillers en communication – et/ou le gouvernement – lui  disent de faire. Il est payé pour ça, et il fait le job ! Laurent, lui, n’a pas de job véritable. Il n’existe pas vraiment et n’a jamais vraiment eu un véritable statut. Alors, il essaie – tant bien que mal – d’exister ! Comme il estime ne pas avoir les moyens de se payer un conseiller en communication, il fait ce que bon lui semble. Bref, il n’en fait qu’à sa tête. Comme celle-ci n’est pas un cadeau, il symbolise bien ce qu’on appelle des « frasques ».

Comme il est quand même Prince de Belgique – maudit ou maudit –, notre pays a prévu un système pour subvenir à ses besoins : une dotation. Pour le moment, il a droit à 308 000 EUR par an, répartis en 88 000 EUR de salaire en tant que fonctionnaire (montant soumis à l'impôt des personnes physiques) et 220 000 EUR pour couvrir ses frais de fonctionnement et personnel. Cette dotation – qui en soi ne me dérange aucunement – est financée par l’État belge, c’est-à-dire par les contribuables. Ils sont 6 700 000 en Belgique, ce qui veut dire qu’en moyenne, chaque contribuable paie un peu moins de 5 centimes par an pour financer notre bon prince ! J’ajoute que cette « dotation » n’a rien à voir avec la « donation » royale. Celle-ci est liée au fait que lorsqu’il est devenu le 1er Roi des Belges, en 1830, Léopold 1er a cédé à la Belgique certains biens immobiliers avec charge pour la Belgique de les gérer au mieux. La « donation royale » ne fait donc que gérer des biens immobiliers et ne contribue en rien à financer les différentes dotations.

La question principale me semble être liée à la dotation. On lit souvent que Laurent n’a pas demandé à être Prince ! C’est vrai et personnellement, je préfère ne pas l’être, même si on me proposait en échange cette foutue dotation. Prince de Belgique, il le restera, qu’il le veuille ou non. Il ne peut pas se révoquer. C’est bien dommage – tant pour lui que pour nous –, mais c’est comme ça ! Par contre, le principe de la dotation permet d’entrevoir une solution aux difficultés actuelles !

En échange de cette dotation, les membres de la famille royale qui en bénéficient (Philippe, le roi, puis Astrid et Laurent) ont certaines obligations ou contraintes. Notamment, ils ne peuvent pas avoir de contacts avec des responsables étrangers sans en avoir préalablement reçu l’autorisation du Ministre des Affaires étrangères. C’est normal : la Belgique est une monarchie constitutionnelle fédérale à régime parlementaire. Cela signifie que la responsabilité finale est toujours du ressort du Parlement fédéral. Celui-ci accorde – pour les fonctions exécutives – sa confiance au gouvernement fédéral qui assume donc la responsabilité de tout ce qui concerne l’État. Le Roi ne peut jamais rien faire sans l’aval du gouvernement. Il en est de même pour les autres membres de la famille royale. Bref, Laurent reçoit une « petite » dotation et en échange, il est soumis à certaines règles, dont informer le gouvernement de ses contacts internationaux. Il ne l’a pas fait : que ce soit avec des Chinois n’a aucune espèce d’importance. Simplement, il n’a pas respecté les règles minimales auxquelles il est soumis. Il est donc normal qu’il soit sanctionné.

Il pourrait ne pas l’être. Il suffirait pour cela qu’il renonce à sa dotation. Cela, il peut le faire. Plus de dotation, donc plus d’obligations (quoique) ! Il pourrait alors rencontrer qui il veut, pavoiser là où il le souhaite (mais sans doute pas en uniforme), déclarer tout ce qui paraît bon à son cerveau de première classe, etc. Il pourrait même se présenter (quoique) aux élections et – on peut rêver – devenir premier ministre et « diriger » de la sorte son frère aîné. Si j’étais Laurent, c’est ce que je ferais. Non pas me présenter à des élections et tout ce qui s’en suit, mais renoncer à ma dotation. C’est un peu ce que j’ai fait lorsque j’ai annoncé à mes parents que j’abandonnais mes études universitaires après 4 années pour me lancer dans ce que j’avais vraiment envie de faire : pendant mes nouvelles études, ils ne m’ont plus refilé que les allocations familiales qu’ils percevaient. Pour le reste, je me suis débrouillé. Ce ne fut pas facile, mais j’étais cohérent avec moi-même.

Laurent ferait bien d’en faire autant. C’est mon avis et je le partage. Sans aucune illusion, ni sur l’éventuelle concrétisation d’une telle piste, ni sur l’intérêt ou la pertinence de mon partage : ce serait donner beaucoup trop d’importance à un « sujet » qui n’en a aucune !

vendredi 4 août 2017

Migrant ou pas, on reste un être humain

Je suis outré. Révolté. Dégoûté. Ce vendredi matin, une vingtaine de migrants dormant dans le parc Maximilien ont été emmenés par la police. Mais ce n’est pas tout : lisez la suite !

Le parc Maximilien se trouve près de l’Office des étrangers. Il a souvent été occupé par de nombreux migrants depuis « leur crise ». Ils ont toujours fini par être éjectés. Dans ces deux dernières phrases, il y a déjà plusieurs raisons de se révolter : pourquoi parler de « crise des migrants » ? Pourquoi ceux-ci n’ont-ils d’autres solutions que de se retrouver dans un parc pour y faire du camping sauvage ? L’Office des étrangers ne peut-il pas proposer d’autres solutions pour accueillir ces êtres humains en quête d’un monde meilleur ? Pourquoi la seule solution trouvée par notre Belgique florissante est-elle d’éjecter ?

Depuis quelques temps, les tentes sont revenues dans le parc. Ainsi que leurs occupants. La police passe toujours par là, pour « vérifier »… Depuis quelques jours, plusieurs migrants ont signalé que ces contrôles débouchaient sur des bizarreries. Leurs sacs étaient aussi « contrôlés » et il semble qu’après ce « contrôle policier », leurs seuls trésors avaient disparu : GSM, argent…

Comme par hasard, en fin de cette nuit, tous les occupants du parc ont été éjectés, sans ménagement. La porte-parole de la zone de police de Bruxelles-Ixelles, Ilse Van de Keere, a beau déclarer que ce type d’action est « planifié à l’avance » (sic), on peut quand même se poser des questions. (Ce que n’a d’ailleurs pas manqué de faire la RTBF dans le premier sujet du JT de ce soir. Merci à elle.)

Mais ce n’est pas tout. Lors de l’évacuation, les sacs des migrants ont été saisis pour disparaître au bout du compte ! On les a retrouvés : dans une décharge, avec toutes les poubelles ! Et – comme par hasard – tout ce qui était précieux avait disparu des sacs. À nouveau.

Comment ne pas être outré, révolté, dégoûté ? Non seulement la Belgique est incapable d’apporter des solutions décentes d’accueil même temporaire, mais notre système accepte que ces migrants – qui n’ont plus rien, si ce n’est l’espoir d’une vie meilleure – soient rackettés par la police de ce maigre « rien » !

En Belgique, le bourgmestre d’une commune est responsable des actions menées par la police de sa zone. La commune de Bruxelles vient de changer de bourgmestre à la suite des déviations véreuses du précédent. Le nouveau, Philippe Close, se dit pur, véritablement de gauche, etc. On peut en douter, et j’en doute. Mais enfin, il le dit. S’il le montrait, ce serait mieux ! Les jours qui viennent seront essentiels à cet égard.

En attendant, les migrants continuent à n’être considérés – spécialement par nos « pouvoirs publics » - que comme du bétail, des méchants dont l’objectif serait de ruiner nos pays, la peste de ce début de siècle… L’arrivée massive des migrants est un problème. Pas une crise, mais un problème. Auquel il faut trouver une solution. Acceptable pour tous et toutes, et surtout décente. Les migrants ne sont pas du bétail, des méchants, la peste… Ce sont juste des êtres humains. En détresse de surcroit. Ils devraient être considérés comme tels. En Belgique, à Bruxelles notamment, ils ne le sont pas. C’est inacceptable.

jeudi 27 juillet 2017

Efficacité, efficience, pertinence, cohérence…


Lors de l’accord politique entre le cdH et le MR pour mettre en place un nouveau gouvernement en Région wallonne (désolé pour les Français, mais c’est trop compliqué à expliquer, et sans intérêt), j’ai été frappé d’entendre le nombre de fois où Olivier Chastel prononçait les mots « efficacité » et « efficience », sans apparemment faire la moindre distinction entre les deux termes. Et pourtant…

C’est une confusion fréquente et – par expérience – je sais qu’il n’est pas facile de faire accepter à certaines personnes qu’il s’agit de deux réalités tout à fait différentes.

L’efficacité est le fait d’atteindre ses objectifs, bref que le résultat corresponde à ce qu’on voulait. L’efficience est liée aux moyens qui ont été nécessaires pour atteindre, non pas l’objectif, mais le résultat !

Admettons donc que mon objectif est de disposer d’un jardin splendide ! Peu de personnes contesteront que le résultat illustré par la photo ci-dessus (admettons que ce soit mon jardin, mais je vous rassure, ce n’est pas le cas !) est superbe. J’ai donc été très efficace : mon jardin est sublime !

Pour atteindre ce résultat, j’ai fait appel à une entreprise australienne qui a travaillé six mois, avec quatre travailleurs hyper-qualifiés… Ça m’a coûté un maximum. Je pensais qu’ils allaient faire ça en une semaine, mais ça leur a pris six mois. Je ne sais pas pourquoi, mais ils m’avaient l’air très compétents ! Bref, mon jardin est superbe, mais j’ai dû revendre ma maison située au milieu du jardin, et j’ai comme l’impression de ne pas avoir été très efficient ! Efficace peut-être (mon jardin est splendide), mais pas du tout efficient (cette histoire m’a ruiné) !

Cela dit – et il ne faut pas me prendre pour un illettré : on écrit bien dans ce cas « cela dit » et non pas « ceci dit » – je ne suis pas non plus stupide. Pour décider qui embellirait mon jardin, j’ai fait un appel d’offres ! J’ai eu trois propositions : cette entreprise australienne qui m’a remis un portfolio extraordinaire sur toutes ses productions, un indépendant de Charleroi spécialisé dans la rénovation des cours intérieures et… ma femme – amoureuse des beaux jardins – mais captivée par son métier d’institutrice. Il m’a semblé évident que je devais choisir les Australiens, seuls véritablement compétents pour la tâche demandée. Mon choix fut donc « cohérent » : j’ai choisi les meilleurs moyens pour atteindre mes objectifs.

J’insiste sur cette « cohérence » parce que dans la littérature francophone sur le sujet, celle-ci est la plupart du temps confondue avec la « pertinence ». Dans de nombreux « triangles » entre objectifs, résultats et moyens, la « pertinence » est souvent identifiée comme étant le lien entre les moyens et les objectifs : on serait pertinent parce qu’on choisit les bons moyens pour atteindre les objectifs. Ce n’est pas le cas. On est juste alors « cohérent » : on a des objectifs, et on choisit les bons moyens pour les atteindre !

Mais alors, la « pertinence », c’est quoi ? Question pertinente ! Revenons à mon jardin. En fait, au bout du compte, si je voulais disposer d’un beau jardin, c’est avant tout parce que je voulais être reconnu, par mes voisins proches ou un peu plus éloignés, comme un amoureux de la beauté et surtout comme un ardent défenseur de l’écologie politique solidaire et sans aucune compromission. Quoi, ça n’a rien à voir ? Avec le recul, vous avez raison : désirer un beau jardin est certes très « écologique », mais ne contribue en rien à mon désir suprême : avoir une société ouverte, solidaire, saine, constructive…

En résumant, avec mon beau jardin (et il l’est), j’ai été à la fois efficace, non efficient, cohérent… et (surtout) non pertinent. Ce serait sans doute intéressant de réfléchir à tout ça quand on prend des décisions.

Bon, si vous (n')avez (pas) compris quelque chose et/ou avez des questions, n’hésitez pas !

vendredi 21 juillet 2017

Manque de…

Lors de la dispute de bac à sable entre le chef d'état-major des armées françaises, Pierre de Villiers, et le Président Emmanuel Macron, j’ai dialogué de manière virtuelle avec une personne qui s’en offusquait ! Elle m’affirmait que l’armée française était confrontée à « un manque d'équipements, du matériel obsolète et/ou pas en état de fonctionner, un manque de formation, le non-paiement de leur solde… ». Bref, une analyse en termes de « manque de… » !

Ce type d’analyse est très fréquent. Notamment dans le domaine de l’éducation. Si l’enseignement va si mal, c’est – dit-on souvent – par manque de moyens, de temps de concertation, de motivation des élèves et/ou des enseignants, etc.

Cependant, dès qu’on raisonne selon des « manques de », on ne parle pas des problèmes, mais des solutions qu’on envisage à un problème qui n’est pas identifié. Dire que l’armée manque d’équipements revient à dire qu’il faut à l’armée des équipements supplémentaires. Mais quel est le problème ? Est-ce que celui-ci est que l’armée ne parvient plus à remplir ses missions classiques ? Est-ce qu’il y a des accidents liés à la vétusté des équipements ? Est-ce que les équipements actuels ne sont plus adaptés aux nouvelles missions de l’armée (notamment en termes de services aux populations ou de protection des citoyens…) ? En ne dénonçant que l’absence de la solution envisagée, il est impossible d’apporter une solution au problème puisque celui-ci n’est pas identifié. Or, en fonction du réel problème, les solutions à apporter ne seront pas nécessairement les mêmes. On risque donc d’apporter une solution sans résoudre le vrai problème. Ou sans mener le projet qui est vraiment pertinent dans la situation.

La majorité des projets qui sont mis en place sont basés sur une idée qu’il faudrait « faire ceci ou cela », en lien avec l’analyse qu’il manque de ceci ou de cela. Or, le véritable besoin tient à la différence qui existe entre la situation telle qu’elle existe (analysée en termes de problèmes) et la situation telle qu’on voudrait qu’elle existe (analysée en termes d’objectifs). Se concentrer sur les moyens correspondant aux « manques de… » risque souvent de passer à côté de la vraie problématique et de mener un projet ou mettre en œuvre des moyens pour le plaisir de le faire, sans qu’on sache trop bien « pour quoi ».

J’dis ça, j’dis rien… Finalement, chacun pense et dit ce qu’il veut. Je n’ai bien sûr de leçon à donner à personne ! N’empêche, ça me fait toujours râler de voir des actions menées en pure perte uniquement parce que l’analyse de départ n’a été faite que sur la base de « manques de… », en ne se fondant ainsi que sur d’éventuelles solutions, en ignorant les problèmes !

samedi 8 juillet 2017

Chansons oubliées : Je pourrais dire, par François Béranger (1971)

Aujourd’hui, tout le monde se plaint. Et tout le monde trouve ça normal. Il est troublant de constater que lorsqu’on donne la parole à tout un chacun, comme c’est le cas avec les réseaux sociaux et/ou les commentaires d’un article quelconque, c’est avant tout pour se plaindre, pour dénoncer l’un ou l’autre, pour railler, pour critiquer à charge, etc. Il y a sans doute de quoi. Quoique. Car, enfin… je pourrais dire !

S’il y a bien un chanteur qu’on ne peut pas soupçonner de s’être laisser récupérer, c’est François Béranger. Il a été de tous les combats. Quinze ans après sa mort, il reste pour beaucoup un modèle de lutte sociale. Un gars qui a toujours osé dire.

Pourtant, au début de sa carrière, pour clôturer son deuxième album, il propose une chanson d’une simplicité et d’une profondeur éblouissantes. « Je pourrais dire ». Musicalement, on y retrouve – surtout à la fin – des écho(e)s de Pink Floyd. Mais l’important n’est pas là.

En soi, ce n’est pas une chanson sociale. Béranger n’y parle que des femmes. De ce qu’il a pu vivre avec des femmes. Mais il est là au cœur-même de la vie humaine et donc de la réalité sociale.

N’y a-t-il pas pire injustice ou pire souffrance pour un homme de vivre la trahison de celle(s) qu’il aime, de supporter la mort de celle(s) qu’il aime, de subir l’indifférence de celle(s) qu’il aime… ? Ce sont des réalités fondamentales. Qui blessent. Au plus profond de ce qu’on est. À côté de ça, les mesquineries politiques, financières, philosophiques… ne sont rien. Bien sûr, elles méritent qu’on s’y attarde, qu’on ne les laisse pas se développer sans pouvoir de contrôle. Mais en soi, ces mesquineries ne sont rien face à l’abîme sentimental lorsque celui-ci surgit, la plupart du temps sans prévenir ! Bref, c’est alors qu’on pourrait dire… qu’on pourrait se plaindre… qu’on pourrait se lamenter…

Et pourtant, soudain, le soleil se lève et fait jaillir des cris d’enfants ! Par ces mots, Béranger remet les choses à leur place, qu’elles n’auraient jamais dû quitter. On peut se plaindre, bien sûr. Mais l’essentiel n’est pas là. L’essentiel est que – chaque matin – le soleil se lève et fait jaillir des cris d’enfants.

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Je pourrais dire
Que la femme que j'aime
Me trompe avec mes meilleurs amis
Je pourrais dire
Qu'une autre femme que j'aimais
A tout jamais dans la mort est partie
Je pourrais dire
Qu'une autre encore que j'aimais
Ne m'a même jamais regardé
Je pourrais dire...
Mais non, je ne vous dirai rien

Car soudain le soleil se lève
Et fait jaillir des cris d'enfants

jeudi 22 juin 2017

Il n’y a pas de hasard, il n’y a que des rendez-vous

FMG©2017

« Il n’y a pas de hasard, il n’y a que des rendez-vous ». Ces mots de Paul Éluard ne sont pas seulement qu’une belle citation qu’on trouve ci et là, en particulier un 25 mai ! Ils énoncent d’abord une réalité fondamentale, bien plus profonde qu’on ne peut le soupçonner. Il y aurait tant à dire autour de ces mots, tant ils correspondent pour beaucoup à une vérité qui s’est imposée à eux, comme une évidence. Celle-ci se niche parfois là où on ne l’attend pas.

J’étais hier avec mon meilleur ami. On ne se voit pas tous les jours, mais au moins tous les mois. Depuis plus de 25 ans. On se parle. On s’écoute. On rigole. On fantasme. On s’émerveille. On s’inquiète. On partage. Une vraie amitié. C’est incroyable ce qu’on peut partager. En toute confiance et en toute simplicité.

Hier, nous avons parlé – bien sûr – de tendresse. Finalement, c’est le seul sujet qui intéresse vraiment les mecs. La tendresse, simplement. Il se fait que dans l’après-midi ayant précédé nos retrouvailles, mon iPod magique avait sorti au hasard parmi 24 500 morceaux, la chanson « L’amour et la tendresse » de Pierre Perret. Il n’y a évidemment pas de hasard. Il n’y a que des rendez-vous.

J’ai parlé à mon ami de cette chanson. Il ne la connaissait pas. Grâce à Spotify, nous avons pu l’écouter. Une vraie découverte. Un vrai rendez-vous pour mon ami. Mais ce rendez-vous ne s’arrêtait pas là. Pour retrouver la chanson sur Spotify, mon ami avait juste introduit ces mots « Pierre Perret l’amour ». Nous avons trouvé la chanson, mais après, Spotify a spontanément proposé une « playlist ». C’est là que le hasard n’était plus qu’un rendez-vous. Cette playlist tournait autour de chanteurs que j’adore : Georges Chelon, Georges Moustaki, Léo Ferré, Barbara, Yves Duteil, Graeme Allwright, etc. C’était déjà incroyable. Mais, en plus, la plupart des chansons qui nous arrivaient « par hasard » avaient un sens profond par rapport à tous nos partages, toutes nos discussions, toutes nos errances vitales. À vrai dire, nous nagions alors en pleine extase. Nos rêves, nos angoisses, nos divagations se concrétisaient soudainement dans la réalité de ces chansons éternelles. Ce ne pouvait être un quelconque hasard. Juste un rendez-vous intergalactique. Nous aurions pu passer la nuit à jouir de cette playlist inconnue. Et à chaque chanson à vibrer d’émotion. Quel bonheur.

Parmi ces chansons, un trésor que je connais bien, depuis longtemps, mais que mon ami ne connaissait pas : « La ligne droite », de Georges Moustaki, interprétée à la suite par Barbara. Un joyau sublime. Chaque artiste interprète la même chanson. Chacun dans son style. Et quand Moustaki se tait pour laisser place à Barbara, le miracle s’installe. Il n’y a pas de hasard. Il n’y a que des rendez-vous.


samedi 17 juin 2017

Paradoxe du singe savant

Si un singe tape indéfiniment et au hasard sur un clavier, il pourra « presque sûrement » écrire un texte donné. Ça prendra du temps (beaucoup de temps), mais il devrait y arriver. Cela s’appelle le paradoxe du singe savant. C’est un théorème passionnant et qui relativise quand même beaucoup de choses. Mais en fait, ce n’est pas de cela dont je veux parler. Mais de mon petit-fils !

Celui-ci n’est pas un singe. Loin de là… quoique, la suite de l’histoire en témoignera. Il se fait qu’Alexis (bientôt 4 ans) passe le week-end chez nous, accompagné de sa sœur Élise (1 an). Je ne sais pas si cela a un lien avec la suite, mais nous sommes allés – Alexis et moi – au cirque cette (chaude) après-midi. Un vrai cirque. Familial. Avec de beaux numéros et aussi des animaux (chevaux, lamas, bouc…) visiblement bien soignés et respectés.

Est-ce ce bon moment circassien qui a soudain rappelé à mon petit-fils, alors que sa sœur dormait désormais paisiblement, qu’il avait vu des singes lors d’un séjour familial ardennais il y a deux semaines ? Toujours est-il qu’il s’est transformé soudainement en singe ! C’est assez surprenant. Amusant, mais surprenant. Et au bout d’un temps, légèrement éreintant !

Bref, à un certain moment, je lui ai demandé de se calmer un peu. Je le lui ai dit en néerlandais. Il se fait que ses parents ont décidé – avec raison – de lui faire suivre sa scolarité (pour le moment, en 1re maternelle) en néerlandais. Moi qui ne suis pas très compétent en langues étrangères, du moins à l’oral, j’approuve pleinement ce choix qui permettra à Alexis de devenir un vrai bilingue (voire sans doute trilingue).

Assez naturellement finalement, Alexis m’a répondu en néerlandais ! Il m’a dit que les singes n’étaient pas calmes, car ils vivaient dans les arbres ! À vrai dire, heureusement que ma femme était à côté de nous pour me traduire cette phrase relativement simple, prononcée avec un vrai accent néerlandais !

Je ne crois vraiment pas que mon petit-fils soit un singe savant ! Il est juste un enfant de 4 ans, bien dans sa peau, avide de découvrir des tas de choses, et qui simplement grandit dans un univers linguistique pluriel et l’assume pleinement ! Quel bonheur !

Je ne veux pas dire ici que tous les enfants devraient suivre le même parcours. Quoique. Je sais simplement qu’un enfant qui, à 4 ans, peut passer d’une langue à une autre est un enfant qui – dans le monde actuel – a en lui une force incroyable. Et moi, en tant que grand-père « Papyllon », je m’émerveille. Et c’est bon.

mardi 6 juin 2017

Tais-toi !

Tais-toi ! Deux syllabes souvent prononcées ou écrites. Plus souvent encore, pensées. Tais-toi. T’as rien à dire. Tu n’y connais rien. Tu n’as pas le droit de penser, encore moins de parler. Tais-toi. De toute façon, tu as tort. Alors, tais-toi.

Nous avons sans doute tous et toutes entendu, à un certain moment de notre vie, ces paroles pleines de sagesse : tais-toi, tu n’y connais rien, parle seulement de ce que tu connais… Cette injonction soulève cependant deux questions fondamentales :
  • qu’est-ce qui permet de dire à une personne qu’une autre n’y connaît rien ?
  • quand bien même une personne « n’y connaît rien », n’a-t-elle pour autant rien à dire ?
J’ai vécu de près dernièrement cette situation, pour une question de rapport aux animaux, sur laquelle je ne tiens pas à revenir, mais qui m’a amené à me poser concrètement ces deux questions.

J’avais donc émis mon avis personnel à propos des chiens qui aboient ci et là, sans nécessairement que leurs maîtres interviennent. Je répète que je ne souhaite pas ici relancer le débat. Il est clair qu’il y a des positions différentes et, en soi, elles sont toutes respectables. Mais j’ai été frappé par le fait que plusieurs personnes (que j’apprécie par ailleurs) m’ont dit – de manière plus ou moins directe – que je n’avais de toute façon pas à émettre un avis à ce sujet puisque de toute façon, je n’y connaissais rien. Je n’ai jamais caché ni ici ni ailleurs qu’au jour d’aujourd’hui, je n’avais aucun intérêt à vivre avec un animal domestique. Est-ce une raison pour dire que je n’y connais rien ? Dans les méandres de ma vie, il m’est arrivé plus d’une fois à vivre avec un chien ou avec un chat. Certainement avec trois chiens différents. Et sans doute avec autant de chats. Ce n’était pas les miens. Mais j’ai vécu avec eux. Durant environ trois ans. Sans aucun problème dans cette co-existence. Pas de problème, mais cela ne m’a pas pour autant converti à l’idée d’avoir un chien. Mais la question n’est pas là : peut-on vraiment dire à quelqu’un qui a vécu au moins trois années avec des chiens et/ou des chats qu’il n’y connaît rien aux chiens ni aux chats ?

Bref, je crois avoir vécu suffisamment de temps avec des chiens et/ou des chats pour y connaître quelque chose. Mais quand bien même je n’aurais pas ce vécu de proximité, qui pourrait dire que pour autant je n’y connais rien ! En l’occurrence, je m’exprimais non pas sur la relation qu’on peut avoir avec un chien ou avec un chat, mais sur les (dés)agréments que peuvent produire ces animaux sur toutes les personnes qui sont amenées à les rencontrer, sans en être les propriétaires et sans contrôler tous les paramètres qui interviennent dans leurs rencontres. Je ne m’exprimais donc pas en tant que propriétaire, mais en tant qu’usager. Lors de mes balades pédestres, il m’arrive plus d’une fois (en fait, chaque fois) d’être confronté à des aboiements intempestifs, quand ce n’est pas un chien qui me court derrière. J’avoue que je ne connais pas le bonheur de vivre avec ces chiens qui aboient à mon passage ou me harcèlent. Mais il me semble quand même connaître cette peur de savoir ce qui va m’arriver. Je rassure : la plupart du temps, il ne m’arrive rien. Par contre, la peur, elle, est chaque fois présente (sans qu’elle soit pour autant névrotique ou psychotique !). Je ne connais peut-être rien (et encore) à la relation harmonieuse entre un chien et son propriétaire. Mais il me semble que j’y connais quelque chose (et plus que ça) entre un promeneur et un chien qu’il croise dans ses balades.

Je crois donc connaître quelque chose dans cette situation. Quand bien même je n’y connaîtrais rien, devrais-je pour autant me taire ? Au jour d’aujourd’hui, cette question est relativement absurde : on voit bien que tout un chacun s’exprime sur n’importe quoi et n’importe comment en étant persuadé de détenir la vérité. On peut se poser beaucoup de questions sur cette expression libre et débridée. Je suis d’ailleurs le premier à m’interroger sur la pertinence de certains propos, voire à m’effrayer de la violence qu’ils contiennent. Y compris d’ailleurs quand ce ne sont que des réactions par rapport à des propos initialement banals, comme ce fut le cas lors de la publication de mon billet. Toutes ces personnes, dans la violence parfois de leurs propos, devaient-elles se taire ? Non, je ne crois pas. Elles ont réagi comme elles le sentaient. Et en cela, elles avaient raison. Je n’ai pas de problème lorsque quelqu’un dit ce qu’il a à dire. Mais j’ai quelques problèmes lorsque certains disent « Tu n’as rien à dire, puisque tu n’y connais rien ».

Qu’est-ce qui leur permet de dire que je n’y connais rien ? Et même si je n’y connaissais rien, qu’est-ce qui m’empêcherait de dire ce que je ressens ? Que chacun apporte sa propre réponse…

lundi 5 juin 2017

Aller plus loin

FMG©2017

La vie est faite de moments. Certains n’ont aucune espèce d’importance. D’autres sont difficiles et font douter. D’autres enfin sont de petits paradis. Vous savez, ces moments où on sent que la vie a du sens, qu’on marche ensemble vers un monde meilleur, où simplement on va plus loin.

Je viens de vivre un de ces moments bénis. En soi, il est banal. De simples retrouvailles familiales, comme des milliers de personnes le vivent périodiquement. Dans notre cas, tout simplement en raison de la beauté de la vie qui mène chacun(e) là où il/elle doit être, il y avait bien longtemps que nous ne nous étions plus retrouvés tous ensemble, au-delà de rencontres ponctuelles. Ici, nous étions vraiment tous ensemble, avec trois générations. Quel bonheur !

Nous ne sommes pas une famille « fusionnelle ». Je trouve que c’est très bien ainsi. Chacun vit sa vie, avec des moments heureux et d’autres moins heureux. Mais nous ne nous retrouvons pas toutes les semaines. Ni même tous les mois. Nous restons une famille. Dans le respect de l’indépendance de chacun(e). C’est bien comme cela que je conçois le chemin de chacun(e) : toujours aller plus loin, mais toujours à son rythme.

Pas de relation fusionnelle donc, mais toujours – j’ose le croire – un plaisir profond à se retrouver. Trois enfants et trois mondes fondamentalement différents. Mais une certitude d’appartenir au même cercle. Certains s’y sont ajoutés. Tant mieux ! Découvrir la troisième génération (qui n’est en réalité que la nième génération) est une nouvelle porte qui s’ouvre vers la vie, la solidarité, l’amour… Merci à vous, mes (beau et petits-)enfants. Vous êtes le sel de notre vie.

Celle-ci n’a de sens réel – nous le savons depuis longtemps, ma femme et moi – qu’à aller plus loin. Le moment du chemin n’a pas beaucoup d’importance. Savoir qu’il y a toujours un après qui nous permet d’aller plus loin, cela seul compte. Cette conviction profonde, nous avons pu la vivre concrètement ce WE. Et c’est un réel bonheur.

mercredi 31 mai 2017

Orto Graf

On me reproche périodiquement – sans doute avec raison – d’être trop pointilleux, voire tatillon, face à certaines erreurs d’orthographe rencontrées ci et là sur la grande toile. Je ne le nie pas, même si les erreurs que je relève sont bien moins nombreuses que toutes celles que je vois sans réagir.

Oui, j’accorde de l’importance à l’orthographe et j’en ai une certaine maîtrise. Ce ne fut pas toujours le cas. Quand je relis certains de mes écrits, je suis souvent effrayé ! Il ne faut pas croire que cette maîtrise m’est venue comme ça, naturellement. Non, j’ai dû beaucoup travailler pour en arriver là, j’ai dû plus d’une fois chercher à vérifier ce que j’écrivais pour constater la plupart du temps que je me trompais, j’ai dû lire de nombreux documents pour analyser comment notre orthographe française fonctionne pour conclure plus d’une fois qu’il n’y a là aucune logique.

Ce fut une partie de mon travail dans de nombreuses situations : relire des documents – que j’en sois l’auteur ou non – pour y traquer la moindre coquille, la moindre licence par rapport aux règles, la moindre virgule manquante, l’espace inexistante ou superflue*, etc. J’ai – je crois – développé certaines compétences à ce niveau et c’est bien pour cela qu’on continue à me solliciter pour quadriller des textes divers. C’est devenu une seconde nature : mon œil de lynx est autonome et il suffit qu’il y ait une seule coquille dans un document pour qu’il la repère. Avec toujours alors la même question : que faire ? Si on m’a sollicité pour relire, il n’y a évidemment aucune hésitation : je corrige. Mais si on ne m’a pas sollicité, dois-je me taire ou signaler l’erreur qui soudain devient l’arbre qui cache la forêt ? Je n’ai pas de réponse définitive. Parfois je dis, parfois je me tais. Quand je dis, soit on me remercie, soit on ne me dit rien, soit on me tombe dessus ! Quand je me tais, on me reproche parfois de n’avoir rien dit ! Allez savoir…

Je suis ce que je suis et je crois que je continuerai à repérer la moindre erreur d’orthographe. Je parle bien d’ « erreur ». La notion de « faute » d’orthographe m’est inconnue. Personne ne se trompe pour se tromper. Par contre, il est quasi impossible de maîtriser toute l’orthographe française. Croyez-moi : des erreurs, j’en fais aussi. Et je suis toujours heureux quand on me les signale.

N’empêche, certaines erreurs sont parfois amusantes. Les exemples ne manquent pas. Juste avant d’écrire ce billet, j’en ai vu une belle. Dans une conversation à propos d’un ancien bistrot tenu avec beaucoup de cœur par un couple dont la femme s’appelait Léa, j’ai lu ce commentaire : « Oui, par après, elle fessais la livraison du nous deux à domicile ». Je n’ai rien signalé, mais j’ai souri. J’imaginais cette charmante Léa venir fesser à domicile ce couple souriant !

Croyez-le ou non : ce billet n’est qu’un sourire béat !

*En typographie, l’espace est bien un mot féminin.

mardi 30 mai 2017

Chien gentil

Je suis actuellement impliqué dans une discussion Facebook sur les chiens et la peur qu’ils peuvent engendrer. Au départ, cette banale photo à propos de laquelle une amie (que je considère comme telle) annonçait « Prêtes à aller aboyer sur les passants qui oseraient passer dans la rue devant leur domaine ».

Tout en percevant l’humour qu’il y avait dans ce post, je n’ai pas pu m’empêcher de réagir. Je ne supporte pas les chiens qui aboient pour défendre leur domaine, aussi « gentils » soient-ils. Ces chiens devraient – selon moi – être abattus, et leurs maîtres punis.

Clarifions la situation : dans ma vie un peu bohême, il m’est arrivé de vivre avec trois chiens différents. Ils n’étaient pas à moi, mais je n’ai jamais eu le moindre problème avec chacun d’entre eux. J’ai même chaque fois vécu de bons moments. Aucun des trois cependant n’a jamais aboyé bêtement pour un passant qui passait. Je crois que j’ai vécu – heureusement – avec des chiens intelligents qui ont autre chose à faire que d’aboyer sur les passants qui oseraient passer dans la rue devant leur domaine… Je crois surtout que leur(s) maître(s) n’aurai(en)t jamais accepté que ce(s) chien(s) puisse(nt) provoquer le moindre problème vis-à-vis du « commun des mortels ».

La question abordée ici n’est pas de savoir si oui ou non on aime les animaux. J’avoue ne pas avoir de passion pour eux, mais en soi, je n’ai pas de blocage non plus. Et je suis convaincu que pour des milliers de personnes, avoir un chien est un réel bonheur. Là n’est pas le problème. Malheureusement, beaucoup de propriétaires de chiens ne semblent pas le comprendre.

Dans le débat que j’ai eu, j’ai notamment évoqué une chouette promenade réalisée avec mes deux petits-enfants, Élise – un an – tapie dans sa poussette et Alexis – bientôt 4 ans – jouissant librement de la découverte d’un univers calme et résidentiel. En fin de parcours, à 10 mètres de la maison, nous avons rencontré un couple avec un chien. Sans laisse. Il s'est lancé vers nous. Certainement pour s’amuser. Mais Alexis a eu peur et logiquement s'est déplacé vers le centre de la rue. À ce moment, une voiture arrivait derrière nous. L'accident – qui aurait pu être dramatique – fut évité de justesse. La seule chose que le couple a réussi à me dire est "Mais il est très gentil". Je n’en ai pas douté une seule seconde. Devais-je moi-même tenir mon super Alexis en laisse pour qu’il ne puisse pas vivre sa vie d’enfant librement et sans danger ?

Cet exemple n’en est qu’un parmi beaucoup d’autres. Moins souvent que je ne le voudrais, mais souvent quand même, je me promène. À chaque promenade, il m’arrive d’avoir peur, au moins une fois. Tout simplement parce qu’un chien commence à aboyer. Jusqu’à présent, cela se limite à une peur. Ce n’est pas agréable, mais pas mortel non plus. Ce ne sont parfois que de petits aboiements de petits clebs qui ont en fait plus peur que moi. Mais le plus souvent, ce sont des chiens qui – s’ils étaient lâchés – ne feraient en réalité qu’une purée de mes mollets.

En écrivant ce billet, mon objectif n’est pas de m’attaquer à tous les propriétaires de chiens. Ils les aiment et c’est bien leur droit. Mon objectif est simplement de dire que tout le monde n’aime pas les chiens et que c’est bien leur droit aussi. Il y a des règles à respecter. Un, ne jamais accepter qu’un chien aboie sans raison. Et « défendre son territoire » n’en est pas une. Deux, ne jamais promener un chien sans laisse. Tout simplement parce qu’il est impossible de savoir ce qui se passera quand le chien rencontrera des gens qui tout simplement se baladent, sans devoir se soucier d’un animal qu’ils ne connaissent en aucune manière.

Malheureusement, devant la simplicité et l’évidence de ces règles de savoir-vivre, je ne suis pas sûr d’être entendu. Et c’est bien triste ! La vie est merveilleuse. Ne nous-la laissons pas pourrir !

samedi 27 mai 2017

Nos priorités pour un monde meilleur

À l’instigation de ce sage et saint homme qu’est le nouveau président des États-Unis, ce cher Donald Trump, la Belgique vient de se faire crosser par le Secrétaire général de l’OTAN pour le budget qu’elle consacre à sa défense (inter)nationale. Pensez donc : notre gouvernement a osé n’accorder au budget militaire 2016 que de misérables 0,85% du PIB. Nous nous classons ainsi au fond du fond de la classe ! Seul le Luxembourg fait moins bien (0,44% du PIB).

Lorsque j’ai entendu ces nouvelles, j’avoue avoir retrouvé un certain sentiment d’être belge ! Quel plaisir d’apprendre que mon pays ne dilapide pas son argent en dépenses militaires ! Oui, pour une fois, j’étais vraiment fier des décisions prises – jusqu’à présent – par ce gouvernement belge sur lequel j’ai énormément de doutes par ailleurs.

Je me souviens qu’en 1981 – ce n’est pas hier – j’avais pris le temps d’écrire à nos ministres de l’époque pour leur demander d’augmenter non pas le budget militaire, mais celui consacré à l’époque à l’aide publique au développement. Ce budget correspondait alors à 0,5% du PNB. La Belgique venait de confirmer son intention d’y consacrer 0,7% de son PNB. À l’époque, le ministre des Affaires économiques Willy Claes m’avait répondu de manière volontaire et engagée. Pour la petite histoire, il est à noter que Willy Claes est devenu, en 1994, Secrétaire général de l’OTAN. Il démissionna un an plus tard ayant été mis en cause dans une affaire de corruption relative à l'achat d'hélicoptères par la défense nationale belge. Mais bon, il s’était en tout cas en 1981 montré enthousiaste à l’idée de lutter contre la faim et la sous-alimentation dans le monde.

Plutôt que de vouloir consacrer aujourd’hui un budget de 2% du PIB à la défense nationale, je pense que plus que jamais il est indispensable d’augmenter le budget consacré à la coopération au développement. Ce budget correspond actuellement à 0,42% du PIB et ne cesse de diminuer depuis 2010. La Belgique ne peut cependant pas être considérée comme un mauvais élève à ce niveau puisqu’au niveau mondial, le taux moyen de contribution des pays donateurs correspond à 0,3% du PIB.

Une fois de plus, il s’agit de savoir quel monde nous voulons. Un monde fondé sur l’opposition, voire la guerre ? Ou un monde fondé sur la solidarité et l’entraide ?