dimanche 31 mars 2019

Des gestes bénins…

Lorsque j’ai quitté la Flandre pour la Wallonie – j’ai quand même dû faire 6 km pour cela ! – j’ai assez rapidement été frappé par la propreté de ma nouvelle commune. C’était une impression positive globale, mais de plus, je voyais fréquemment des ouvriers communaux nettoyer la voirie. En plus de trente ans en Région flamande, je n’avais jamais vu ça !

Ce n’est pas pour autant que la Région wallonne, et ma commune en particulier, est un paradis immaculé. Bien au contraire. J’ai pu m’en rendre compte concrètement aujourd’hui en ayant la chance de participer à l’opération « Grand nettoyage de printemps » organisé par Wallonie Plus Propre (WAPP).

J’écris bien « la chance de participer ». C’était une promenade sympathique, réalisée en excellente compagnie, sous un soleil printanier. C’était de plus l’occasion de découvrir des voisins : un de ceux-ci, Rudy, avait distribué une feuille toutes-boîtes invitant qui voulait le rejoindre pour nettoyer quelques rues de nos alentours. Fréquemment, Rudy parcourt ces rues en jogging et en profite pour ramasser ce qui traîne. Les rues étaient donc relativement propres, mais en deux heures, sur deux kilomètres et deux décharges sauvages, cinq personnes ont quand même pu récolter ceci :

FMG©2019

Quand on ouvre l’œil, on trouve de tout : des canettes, des bouteilles, des mégots de cigarette, des bouts de plastic, des enjoliveurs, de la frigolite (polystyrène expansé), des mouchoirs, des plaquettes de frein, des vis, des tickets de caisse… Toutes ces crasses ne sont pas arrivées là par l’opération d’un quelconque Saint-Esprit. Elles ont été jetées par des personnes inconscientes et irresponsables, qui se disent qu’il y aura bien quelqu’un qui passera par là pour nettoyer leurs saletés. Ou pire encore et vraisemblable, qui ne se posent même pas la question.

Avec de tels comportements, on n’est pas sorti de l’auberge. Jeter sa canette par la fenêtre de sa voiture est pour celui ou celle qui le fait un acte bénin. Tout comme, finalement, celui de la ramasser pour les 160 000 personnes qui ont œuvré aujourd’hui. Dois-je l’avouer, je préfère être du côté extérieur de la vitre : ce petit geste bénin aurait dû ne pas devoir être posé, mais au moins j’ai l’impression d’avoir fait quelque chose de positif pour le bien-être de chacun·e.

mardi 5 mars 2019

Arrêt mystique

Il y a 40 ans exactement, je me préparais à fumer ma dernière cigarette. Mon état d’esprit était particulier : j’avais déjà essayé plusieurs fois de stopper ce vice qui m’occupait chaque jour depuis une dizaine d’années. « J’avais déjà essayé », mais cette fois, c’était différent : j’arrêtais !

La certitude était évidente, tout comme ma béatitude. C’était vraiment le mot : non seulement j’étais rempli d’un bonheur sublime, mais de plus je baignais dans cette félicité parfaite des élus au paradis ! Il faut dire que j’étais alors dans la période la plus mystique de ma vie, avec une confiance absolue dans la force de Dieu. Le moment choisi pour cette dernière cigarette n’était ainsi pas anodin : nous étions le soir du Mardi gras et le lendemain, c’était le Mercredi des Cendres. Ou le début du Carême…

Bref, ne riez pas, ce n’était pas vraiment moi qui arrêtais cette dépendance tabagique. C’était Dieu qui m’habitait et qui allait rendre la concrétisation de ma décision encore plus facile que la prise de cette dernière. Ce fut vraiment très facile, et définitif.

Cela n’a pas fait de moi pour autant un pratiquant convaincu. Au contraire, cet événement marquant correspond à ma prise de distance, certainement par rapport à l’institution Église, mais aussi et plus paradoxalement par rapport à la foi elle-même. Le recul par rapport à l’Église était somme toute normal : j’avais pu bénéficier de l’aide divine en voie directe, sans devoir passer par le biais de ses représentants humains, décidément inutiles.

Mon éloignement progressif, à partir de cet épisode, de ce Dieu qui avait agi à ma place est plus complexe, mais néanmoins logique. Le temps passant, je n’étais plus tout à fait dupe : si j’avais pu arrêter de fumer du jour au lendemain, sans grande difficulté, c’est que je l’avais décidé ! Au plus profond de moi. Cette prise de conscience, peut-être très présomptueuse, correspond à mes représentations actuelles d’un Dieu qui n’existe (s’il existe) que par les hommes tout comme les hommes n’existent que par Dieu. Mais ça, c’est une autre histoire…

Finalement, peu importe ce qui m’a permis de quitter la compagnie de la cigarette, il y a 40 ans. L’important est que j’ai arrêté. Je ne l’ai jamais regretté·e !