samedi 31 janvier 2015

Quand on ne peut mentir

FMG©2015

Quatre-vingt bougies pour 80 belles années ! C’est toujours un beau moment. Quand la jubilaire ne les paraît pas, semble plutôt une jeune fille pleine de vigueur et d’enthousiasme, prête à rire de tout, ce moment devient quelque peu divin et transcendant.

Ce n’est plus une jeune fille. Elle a cinq enfants et je ne sais pas combien de petits-enfants. Ce sont les cinq qui ont organisé cette fête. À la bonne franquette et en toute simplicité.

Mais il y avait là une magie. C’est difficile à décrire et ce serait d’ailleurs inutile de le faire. Mais il y avait une force et une joie de vivre aussi collective que profonde. Une vraie communion dans le plaisir de la musique et de la création. Quand on est confronté à une telle énergie positive, on ne peut que se faire tout petit et qu’apprécier cette potion magique dont la recette est inconnue. En se disant définitivement qu’il n’y a là qu’une certitude : celle de ne pas pouvoir mentir !

Quand au bout d’un montage photo plein de vivacité, d’humour, de légèreté, de tendresse et de vérité, j’ai vu – devant moi – une petite fille venir se blottir dans les bras de sa grand-mère Baga, je sais – je l’ai vu – que le temps s’est arrêté quelques secondes. Il y avait là tout le bonheur du monde. Et je n’ai pas cherché à retenir cette petite larme qui coulait sur ma joue. Sans mentir, j’avais là – devant moi – le vrai bonheur. C’était… oui, c’était merveilleux !

samedi 24 janvier 2015

Pour plus d'un mètre cinquante

FMG © 2015

Hier, 23 janvier 2015 (alors qu’il n’y avait pas encore de neige), j’attendais avec impatience l’arrivée d’un nouveau CD de Georges Chelon, envoyé depuis la France par recommandé international. Au bout du compte, je suis bien entré en possession du dit CD, mais non sans mal.

Aux alentours de 13 heures, l’heure de passage du facteur, j’attendais attentivement le moindre son de sonnette. Rien. À 13h50, je suis allé vider la boîte aux lettres. J’y ai trouvé un avis, horodaté à 13h40, signalant qu’un paquet m’était destiné, mais qu’étant donné qu’il n’y avait personne à la maison, je pouvais aller le chercher à partir du lundi 26 au bureau de poste situé à 10 km de mon domicile !

Les heures d’ouverture du dit bureau combinées à mes propres contraintes étaient telles que je ne pouvais espérer y aller chercher le précieux paquet que mercredi 28, dans l’après-midi. J’ai alors décidé de prendre le risque de m’y rendre ce vendredi 23 vers 16 heures. C’était une bonne idée : mon paquet était déjà là et j’ai pu ensuite découvrir ce 37e album inédit, en 50 ans de carrière, de Georges Chelon. Album assez intéressant d’ailleurs, avec des sons nouveaux ! Bref, tout finit bien, mais pas dans le meilleur des mondes !

Ce matin, j’ai téléphoné au 022 012345, service de la clientèle chez bpost. Après l’habituelle – mais énervante – attente relationnelle avec une machine à aiguillage pas tout à fait contrôlée, j’ai enfin été en contact avec une personne humaine. Charmante, c’est le moins qu’on puisse dire ! À la limite, je me retrouvais allongé sur un divan psychanalytique tant il y avait là d’assertivité libidineuse !

Au-delà de la sensualité de la voix de mon interlocutrice, j’ai ainsi appris qu’il y avait quelque part un règlement qui dit que dès que la distance entre la boîte aux lettres – inévitablement située sur le bord de la voie publique – et la sonnette d’entrée dépasse 1,50 m, le préposé au courrier n’est pas obligé de franchir la distance outrepassant cette limite et peut se contenter de déposer un avis dans la dite boîte aux lettres !

Je l’avoue : il y a bien 4 mètres, peut-être même 5, entre la boîte aux lettres que nous avons dû installer « au bord de la route » et la sonnette restée à côté de l’ancienne boîte aux lettres ! Je suis donc coupable et je ne mérite que le sort qui m’a été réservé par le facteur ! Sa charmante collègue que j’avais au bout du fil m’a quand même suggéré de coller un bouton de sonnette sans fil sur ma boîte aux lettres. Que voilà une bonne idée ! Cela va effectivement tout changer dans le travail du dit facteur. Moi, ça me coûterait quelques dizaines d’euros, mais de quoi devrais-je me plaindre ?

Bref, j’ai eu mon colis. Au prix d’une demi-heure de route pour parcourir les 20 km. Au prix du carburant actuel et des autres frais liés à ma voiture, cela ne fait jamais que 6,2 EUR. Bêtement dépensés parce que M. le facteur avait le droit de ne pas parcourir les 2,50 m supplémentaires le reliant à la malheureuse sonnette qui lui aurait permis d’avoir un contact humain heureux et chaleureux !

Dernière chose, qui n’arrange rien. Ma charmante interlocutrice téléphonique m’a dit, quand je me désolais de la qualité du service au public : « Mais vous savez aujourd’hui, la Poste est privée… ». Je lui ai répondu que je travaillais aussi dans une société privée et que – justement – je savais ce que signifiait dans ce cas la qualité du service au client, sans laquelle nous ne nous maintiendrions pas sur le marché… Elle m’a dit «  Vous avez raison, mais vous savez comment vont les choses. Si ça ne tenait qu’à moi… ».

Et pourtant, Madame aussi gentille que vous soyez, oui, cela ne tient qu’à vous et à vos collègues. Au-delà des règlementations stupides décidées par des machines sans cœur, il reste le vôtre. Il faut parfois l’écouter ! Au-delà d’un mètre cinquante !

vendredi 16 janvier 2015

Au-delà de la sécurité

Les mesures sécuritaires sont sans doute nécessaires. Quand un quelconque objet se rapproche de nos yeux, le réflexe évident est de les fermer. Mais l’erreur serait de les garder fermés indéfiniment et de croire que parce qu’on ne voit plus rien l’objet volant non identifié a disparu. Au-delà de la sécurité, il faut prendre d’autres mesures. Rien n’indique que nos gouvernements l’ont compris.

Nos sociétés ne sont plus monolithiques. C’est la réalité évidente. Faire comme si ce n’était pas la réalité ou penser qu’on peut encore vivre exclusivement dans une « société occidentale fondée sur les valeurs chrétiennes » ne peut mener que droit dans le mur. Nos sociétés sont plurielles, diverses, multiculturelles, pluri ou a-religieuses, variées, bariolées. Plutôt que de vouloir imposer une conception unilatérale de la culture et/ou de la vie en société, il est urgent de prendre en compte, de promouvoir et de renforcer la diversité, dans le respect de chacun.

C’est dans cette perspective que se situent les réelles mesures de fond à prendre. Bien sûr, il faut nous protéger de la barbarie. Mais il faut surtout faire tout ce qui est possible pour que celle-ci n’ait plus de raison d’être et qu’elle ne trouve plus d’écho auprès de jeunes déboussolés.

Au moment où je réfléchissais sur ces mesures à prendre, la blogueuse Anne Löwenthal a proposé sur sa page Facebook 12 mesures alternatives aux 12 mesures sécuritaires gouvernementales. Je les reprends ici parce que – globalement – elles correspondent à ce que je pense. On peut de toute évidence en discuter certaines, elles ne sont assurément pas suffisantes en elles-mêmes, mais au moins elles ont le mérite d’exister et de s’ouvrir à d’autres voies plus constructives :
  1. Une réforme en profondeur de l'enseignement
  2. La création d'un service d'accueil et de désintoxication des jeunes embrigadés par des extrémistes

  3. La fin des exclusions des chômeurs et la réintégration des exclus
  4. Un renforcement des associations d'alphabétisation

  5. L'instauration d'une allocation universelle avec un partage du temps de travail

  6. L'ouverture de crèches pour garantir un accueil de qualité à tous les enfants

  7. Une réelle gratuité de l'enseignement

  8. Un renforcement des moyens alloués à la culture

  9. Un renforcement des services sociaux

  10. La suppression des SAC (sanctions administratives communales)
  11. L'intensification de la lutte contre les discriminations

  12. La fermeture des prisons au profit de mesures alternatives.
Il faut aussi œuvrer à l’ouverture. En découvrant au fil des heures les événements sanglants de la semaine du 7 janvier 2015, j’ai été stupéfait d’apprendre qu’il y avait des « Hyper Casher » ! Je trouve normal que les Juifs puissent facilement trouver de la nourriture correspondant à leurs convictions. Mais ils devraient pouvoir le faire dans n’importe quelle surface de distribution. Le jour où on trouvera dans le même magasin des produits « occidentaux », mais aussi des produits « casher », « halal » ou toute autre spécificité, alors peut-être aura-t-on dépassé les communautarismes et pourra-t-on vivre tout simplement dans cette société plurielle qui est la nôtre. Cela ne se fera pas du jour au lendemain. Il faut agir en ce sens. Il faut que les politiques prennent des mesures pour favoriser cette ouverture.

Tant qu’ils se contentent de protéger l’autruche qui cache sa tête, on ne s’en sortira pas.

dimanche 11 janvier 2015

Paroles d’un musulman comme vous et moi

En ce jour de grandes manifestations pour la liberté d’expression, je suis tombé sur le fil d’une discussion sur Facebook. En soi, celle-ci ne m’intéressait pas trop, mais j’ai été interpellé par les propos de Youness, un musulman parmi d’autres. Ce qu’il écrivait me semblait empli de sagesse, de vérité et d’humilité. Je me permets de retranscrire ici ses propos, sans modification autre qu’orthographique. Pour moi, le sens des manifestations de ce jour est entièrement contenu dans ces mots.

Youness
Bonjour, je voulais intervenir en disant juste une chose. La culture musulmane est différente de la culture belge (pour prendre un exemple). Dans notre religion, nos croyances, nos pensées, nos actions sont en lien avec une intimité que l'on crée avec Dieu. Si c'est intime, on ne va pas en parler à la TV ni sur Facebook. Les musulmans n'écoutent pas les imams, les mouftis, les représentants religieux ou politiques lorsqu'il s'agit de religion. C'est intégré dans notre culture. C'est pour cela que selon moi, la ligue arabe et les autres représentants ne le font pas. Après, c'est dommage que les gens ne voient que les méfaits faits par les extrémistes arabes ou noirs (pas musulmans !) et pas ceux des autres parce que la barbarie et la connerie sont une des caractéristiques de l'homme (au regard de l'histoire et du présent) et non des musulmans.

Benoît
La relation intime avec Dieu est une chose, mais l’organisation sociale en est une autre. Par exemple, Erdogan, Président islamiste de la Turquie (et donc élu par les musulmans de son pays ou alors je ne comprends plus rien) a déclaré le 24 novembre 2014 (j'imagine que cela fait partie de sa demande d'adhésion à l'Union Européenne) : « Notre religion (l’Islam) a défini une place pour les femmes (dans la société) : la maternité » (ce qui n’est pas sans rappeler ce que déclarait Adolf Hitler en 1925 : « Le seul rôle de la femme dans la société est d’être mère »). J’imagine que tu désapprouves entièrement ses propos et que pour toi, la femme doit avoir dans la société les mêmes droits et les mêmes devoirs que l’homme.

Youness
Oui, je désapprouve le discours d’Erdogan et justement, mon propos dans mon commentaire était que les Musulmans n'écoutent pas les discours des politiques et donc que se baser sur cela fausse le débat à mes yeux. Vous savez ce que c'est la politique : tous tiennent des discours afin d'être réélus et de plaire à leur électorat. Une grande partie des discours tenus et défendus par les politiques n’est pas appliquée plus tard dans leur politique (je parle en général et pas que pour la Turquie). Vous savez aussi que tous les mois, il y a des manifestations et des révoltes en Turquie qui sont durement réprimée, preuve que tous les Turcs ne sont pas d accord avec lui.
Je voudrais ajouter que des politiciens occidentaux ont déjà tenu ce genre de discours qui vise à discriminer et à enlever des droits à un groupe de personnes. Ex: les homosexuels en France (tous les discours des politiques dans les média, Marine Le Pen, Nicolas Sarkozy...), les discours de George W. Bush où il met Dieu au centre de tout, ce Dieu qui l’a sauvé de l'alcoolisme et qui sauvera l'Amérique de ses ennemis.
Je voudrais répondre aussi sur la question de l'intégration (…). Pour moi, la question ne se pose pas. L'Islam est intégré dans la société occidentale. Les Musulmans occupent une place active dans l'économie des pays, la culture, la politique (il y a beaucoup de personnes de confession musulmane au PS, au cdH, au MR, chez Écolo... preuve qu'on rentre dans les normes et qu'on n’essaye pas d'imposer les nôtres (qui sont finalement très proches lorsqu'on regarde ce qui nous rassemble et pas ce qui sépare)). De plus en plus de Musulmans ont des responsabilités et il y en a encore plus qui n’en ont pas mais qui sont heureux de vivre et de leur vie (chauffeur de bus, épicier, éboueur, femme de ménage, fonctionnaire, employé, employeur... la liste est longue). L'Islam, c'est la relation de l'intime avec Dieu. Donc, ça nous est propre et ça m’a aidé à prendre conscience que si on a une base (des croyances, une idéologie, tout ce qu'on veut), les autres aussi ont la leur et qu’elle n'est pas forcément la même que moi.
Dans cette optique, j’ai pris conscience que je n'ai pas à juger ou à imposer ma vision parce que c'est de l'ordre de l'intimité et donc à chaque personne son droit de croire, si moi j'en ai le droit.
Cet enseignement est répété plusieurs fois dans le Coran. Je le prends comme de l’ouverture et comme de la liberté d’expression également.
J'aimerais finir en disant que ce sont mes propos et ma vision. Elles me sont propres. Je n'ai aucune vérité absolue. Je n'ai de certitude sur cette terre que chacun est différent, a vécu des expériences différentes et que notre discours est le reflet de notre vie. Je n'aurais peut-être jamais dit cela si j'étais né au Caire, à Saint-Denis, ou à Embourg. (…) Prendre ses expériences personnelles, des faits divers, des discours de politique... n'est pas constructif. On pourra toujours trouver quelqu'un d'autre, d'important ou de moins, qui aura un avis contraire ou convergent au nôtre.
Ne faut-il pas se focaliser sur les maux de la planète et sur leurs causes et non leurs conséquences (comme les médias le font) afin de comprendre le problème ? Merci.

mercredi 7 janvier 2015

Monde de merde

 
Monde de merde. C’est le titre du Gorafi. En ce jour de barbarie, il n’y a – provisoirement – plus place pour la satire, pour l’humour (aussi noir soit-il), pour la vérité qui dérange. L’humour est en deuil. Et c’est insupportable.

Charlie Hebdo est massacré. J’espère qu’il renaîtra plus caustique que jamais, plus lucide que l’aveuglement généralisé, plus puissant que la bêtise humaine. Ça ne va pas être simple, c’est le moins qu’on puisse dire. Mais il le faut. Nous avons tous besoin – fondamentalement – de Charlie Hebdo. C’est une question de survie.

Nous sommes tous aujourd’hui des Charlie. Sauf bien sûr – et malheureusement – les ignares. Ceux qui parviendront encore à y redire, à prétendre qu’ils l’ont bien cherché ! La seule chose qu’ils ont cherchée, c’est à nous ouvrir les yeux, à nous garder éveillés, à ne pas nous laisser endormir.

Leur rendre hommage, dans les mois qui viennent, sera d’être plus que jamais vigilant, de refuser toute atteinte à la solidarité, de contrer tous ces amalgames simplistes et réducteurs, de ne se laisser embobiner par personne, et surtout pas par les puissants et autres endormeurs.

Alors, Charlie Hebdo vivra. Inexorablement.