jeudi 22 juin 2017

Il n’y a pas de hasard, il n’y a que des rendez-vous

FMG©2017

« Il n’y a pas de hasard, il n’y a que des rendez-vous ». Ces mots de Paul Éluard ne sont pas seulement qu’une belle citation qu’on trouve ci et là, en particulier un 25 mai ! Ils énoncent d’abord une réalité fondamentale, bien plus profonde qu’on ne peut le soupçonner. Il y aurait tant à dire autour de ces mots, tant ils correspondent pour beaucoup à une vérité qui s’est imposée à eux, comme une évidence. Celle-ci se niche parfois là où on ne l’attend pas.

J’étais hier avec mon meilleur ami. On ne se voit pas tous les jours, mais au moins tous les mois. Depuis plus de 25 ans. On se parle. On s’écoute. On rigole. On fantasme. On s’émerveille. On s’inquiète. On partage. Une vraie amitié. C’est incroyable ce qu’on peut partager. En toute confiance et en toute simplicité.

Hier, nous avons parlé – bien sûr – de tendresse. Finalement, c’est le seul sujet qui intéresse vraiment les mecs. La tendresse, simplement. Il se fait que dans l’après-midi ayant précédé nos retrouvailles, mon iPod magique avait sorti au hasard parmi 24 500 morceaux, la chanson « L’amour et la tendresse » de Pierre Perret. Il n’y a évidemment pas de hasard. Il n’y a que des rendez-vous.

J’ai parlé à mon ami de cette chanson. Il ne la connaissait pas. Grâce à Spotify, nous avons pu l’écouter. Une vraie découverte. Un vrai rendez-vous pour mon ami. Mais ce rendez-vous ne s’arrêtait pas là. Pour retrouver la chanson sur Spotify, mon ami avait juste introduit ces mots « Pierre Perret l’amour ». Nous avons trouvé la chanson, mais après, Spotify a spontanément proposé une « playlist ». C’est là que le hasard n’était plus qu’un rendez-vous. Cette playlist tournait autour de chanteurs que j’adore : Georges Chelon, Georges Moustaki, Léo Ferré, Barbara, Yves Duteil, Graeme Allwright, etc. C’était déjà incroyable. Mais, en plus, la plupart des chansons qui nous arrivaient « par hasard » avaient un sens profond par rapport à tous nos partages, toutes nos discussions, toutes nos errances vitales. À vrai dire, nous nagions alors en pleine extase. Nos rêves, nos angoisses, nos divagations se concrétisaient soudainement dans la réalité de ces chansons éternelles. Ce ne pouvait être un quelconque hasard. Juste un rendez-vous intergalactique. Nous aurions pu passer la nuit à jouir de cette playlist inconnue. Et à chaque chanson à vibrer d’émotion. Quel bonheur.

Parmi ces chansons, un trésor que je connais bien, depuis longtemps, mais que mon ami ne connaissait pas : « La ligne droite », de Georges Moustaki, interprétée à la suite par Barbara. Un joyau sublime. Chaque artiste interprète la même chanson. Chacun dans son style. Et quand Moustaki se tait pour laisser place à Barbara, le miracle s’installe. Il n’y a pas de hasard. Il n’y a que des rendez-vous.


samedi 17 juin 2017

Paradoxe du singe savant

Si un singe tape indéfiniment et au hasard sur un clavier, il pourra « presque sûrement » écrire un texte donné. Ça prendra du temps (beaucoup de temps), mais il devrait y arriver. Cela s’appelle le paradoxe du singe savant. C’est un théorème passionnant et qui relativise quand même beaucoup de choses. Mais en fait, ce n’est pas de cela dont je veux parler. Mais de mon petit-fils !

Celui-ci n’est pas un singe. Loin de là… quoique, la suite de l’histoire en témoignera. Il se fait qu’Alexis (bientôt 4 ans) passe le week-end chez nous, accompagné de sa sœur Élise (1 an). Je ne sais pas si cela a un lien avec la suite, mais nous sommes allés – Alexis et moi – au cirque cette (chaude) après-midi. Un vrai cirque. Familial. Avec de beaux numéros et aussi des animaux (chevaux, lamas, bouc…) visiblement bien soignés et respectés.

Est-ce ce bon moment circassien qui a soudain rappelé à mon petit-fils, alors que sa sœur dormait désormais paisiblement, qu’il avait vu des singes lors d’un séjour familial ardennais il y a deux semaines ? Toujours est-il qu’il s’est transformé soudainement en singe ! C’est assez surprenant. Amusant, mais surprenant. Et au bout d’un temps, légèrement éreintant !

Bref, à un certain moment, je lui ai demandé de se calmer un peu. Je le lui ai dit en néerlandais. Il se fait que ses parents ont décidé – avec raison – de lui faire suivre sa scolarité (pour le moment, en 1re maternelle) en néerlandais. Moi qui ne suis pas très compétent en langues étrangères, du moins à l’oral, j’approuve pleinement ce choix qui permettra à Alexis de devenir un vrai bilingue (voire sans doute trilingue).

Assez naturellement finalement, Alexis m’a répondu en néerlandais ! Il m’a dit que les singes n’étaient pas calmes, car ils vivaient dans les arbres ! À vrai dire, heureusement que ma femme était à côté de nous pour me traduire cette phrase relativement simple, prononcée avec un vrai accent néerlandais !

Je ne crois vraiment pas que mon petit-fils soit un singe savant ! Il est juste un enfant de 4 ans, bien dans sa peau, avide de découvrir des tas de choses, et qui simplement grandit dans un univers linguistique pluriel et l’assume pleinement ! Quel bonheur !

Je ne veux pas dire ici que tous les enfants devraient suivre le même parcours. Quoique. Je sais simplement qu’un enfant qui, à 4 ans, peut passer d’une langue à une autre est un enfant qui – dans le monde actuel – a en lui une force incroyable. Et moi, en tant que grand-père « Papyllon », je m’émerveille. Et c’est bon.

mardi 6 juin 2017

Tais-toi !

Tais-toi ! Deux syllabes souvent prononcées ou écrites. Plus souvent encore, pensées. Tais-toi. T’as rien à dire. Tu n’y connais rien. Tu n’as pas le droit de penser, encore moins de parler. Tais-toi. De toute façon, tu as tort. Alors, tais-toi.

Nous avons sans doute tous et toutes entendu, à un certain moment de notre vie, ces paroles pleines de sagesse : tais-toi, tu n’y connais rien, parle seulement de ce que tu connais… Cette injonction soulève cependant deux questions fondamentales :
  • qu’est-ce qui permet de dire à une personne qu’une autre n’y connaît rien ?
  • quand bien même une personne « n’y connaît rien », n’a-t-elle pour autant rien à dire ?
J’ai vécu de près dernièrement cette situation, pour une question de rapport aux animaux, sur laquelle je ne tiens pas à revenir, mais qui m’a amené à me poser concrètement ces deux questions.

J’avais donc émis mon avis personnel à propos des chiens qui aboient ci et là, sans nécessairement que leurs maîtres interviennent. Je répète que je ne souhaite pas ici relancer le débat. Il est clair qu’il y a des positions différentes et, en soi, elles sont toutes respectables. Mais j’ai été frappé par le fait que plusieurs personnes (que j’apprécie par ailleurs) m’ont dit – de manière plus ou moins directe – que je n’avais de toute façon pas à émettre un avis à ce sujet puisque de toute façon, je n’y connaissais rien. Je n’ai jamais caché ni ici ni ailleurs qu’au jour d’aujourd’hui, je n’avais aucun intérêt à vivre avec un animal domestique. Est-ce une raison pour dire que je n’y connais rien ? Dans les méandres de ma vie, il m’est arrivé plus d’une fois à vivre avec un chien ou avec un chat. Certainement avec trois chiens différents. Et sans doute avec autant de chats. Ce n’était pas les miens. Mais j’ai vécu avec eux. Durant environ trois ans. Sans aucun problème dans cette co-existence. Pas de problème, mais cela ne m’a pas pour autant converti à l’idée d’avoir un chien. Mais la question n’est pas là : peut-on vraiment dire à quelqu’un qui a vécu au moins trois années avec des chiens et/ou des chats qu’il n’y connaît rien aux chiens ni aux chats ?

Bref, je crois avoir vécu suffisamment de temps avec des chiens et/ou des chats pour y connaître quelque chose. Mais quand bien même je n’aurais pas ce vécu de proximité, qui pourrait dire que pour autant je n’y connais rien ! En l’occurrence, je m’exprimais non pas sur la relation qu’on peut avoir avec un chien ou avec un chat, mais sur les (dés)agréments que peuvent produire ces animaux sur toutes les personnes qui sont amenées à les rencontrer, sans en être les propriétaires et sans contrôler tous les paramètres qui interviennent dans leurs rencontres. Je ne m’exprimais donc pas en tant que propriétaire, mais en tant qu’usager. Lors de mes balades pédestres, il m’arrive plus d’une fois (en fait, chaque fois) d’être confronté à des aboiements intempestifs, quand ce n’est pas un chien qui me court derrière. J’avoue que je ne connais pas le bonheur de vivre avec ces chiens qui aboient à mon passage ou me harcèlent. Mais il me semble quand même connaître cette peur de savoir ce qui va m’arriver. Je rassure : la plupart du temps, il ne m’arrive rien. Par contre, la peur, elle, est chaque fois présente (sans qu’elle soit pour autant névrotique ou psychotique !). Je ne connais peut-être rien (et encore) à la relation harmonieuse entre un chien et son propriétaire. Mais il me semble que j’y connais quelque chose (et plus que ça) entre un promeneur et un chien qu’il croise dans ses balades.

Je crois donc connaître quelque chose dans cette situation. Quand bien même je n’y connaîtrais rien, devrais-je pour autant me taire ? Au jour d’aujourd’hui, cette question est relativement absurde : on voit bien que tout un chacun s’exprime sur n’importe quoi et n’importe comment en étant persuadé de détenir la vérité. On peut se poser beaucoup de questions sur cette expression libre et débridée. Je suis d’ailleurs le premier à m’interroger sur la pertinence de certains propos, voire à m’effrayer de la violence qu’ils contiennent. Y compris d’ailleurs quand ce ne sont que des réactions par rapport à des propos initialement banals, comme ce fut le cas lors de la publication de mon billet. Toutes ces personnes, dans la violence parfois de leurs propos, devaient-elles se taire ? Non, je ne crois pas. Elles ont réagi comme elles le sentaient. Et en cela, elles avaient raison. Je n’ai pas de problème lorsque quelqu’un dit ce qu’il a à dire. Mais j’ai quelques problèmes lorsque certains disent « Tu n’as rien à dire, puisque tu n’y connais rien ».

Qu’est-ce qui leur permet de dire que je n’y connais rien ? Et même si je n’y connaissais rien, qu’est-ce qui m’empêcherait de dire ce que je ressens ? Que chacun apporte sa propre réponse…

lundi 5 juin 2017

Aller plus loin

FMG©2017

La vie est faite de moments. Certains n’ont aucune espèce d’importance. D’autres sont difficiles et font douter. D’autres enfin sont de petits paradis. Vous savez, ces moments où on sent que la vie a du sens, qu’on marche ensemble vers un monde meilleur, où simplement on va plus loin.

Je viens de vivre un de ces moments bénis. En soi, il est banal. De simples retrouvailles familiales, comme des milliers de personnes le vivent périodiquement. Dans notre cas, tout simplement en raison de la beauté de la vie qui mène chacun(e) là où il/elle doit être, il y avait bien longtemps que nous ne nous étions plus retrouvés tous ensemble, au-delà de rencontres ponctuelles. Ici, nous étions vraiment tous ensemble, avec trois générations. Quel bonheur !

Nous ne sommes pas une famille « fusionnelle ». Je trouve que c’est très bien ainsi. Chacun vit sa vie, avec des moments heureux et d’autres moins heureux. Mais nous ne nous retrouvons pas toutes les semaines. Ni même tous les mois. Nous restons une famille. Dans le respect de l’indépendance de chacun(e). C’est bien comme cela que je conçois le chemin de chacun(e) : toujours aller plus loin, mais toujours à son rythme.

Pas de relation fusionnelle donc, mais toujours – j’ose le croire – un plaisir profond à se retrouver. Trois enfants et trois mondes fondamentalement différents. Mais une certitude d’appartenir au même cercle. Certains s’y sont ajoutés. Tant mieux ! Découvrir la troisième génération (qui n’est en réalité que la nième génération) est une nouvelle porte qui s’ouvre vers la vie, la solidarité, l’amour… Merci à vous, mes (beau et petits-)enfants. Vous êtes le sel de notre vie.

Celle-ci n’a de sens réel – nous le savons depuis longtemps, ma femme et moi – qu’à aller plus loin. Le moment du chemin n’a pas beaucoup d’importance. Savoir qu’il y a toujours un après qui nous permet d’aller plus loin, cela seul compte. Cette conviction profonde, nous avons pu la vivre concrètement ce WE. Et c’est un réel bonheur.