Ce jeudi 17 décembre 2010, je l’attendais depuis longtemps avec impatience. Non seulement parce que c’était le jour de mes 26 ans de mariage, mais aussi parce que c’était mon dernier jour de travail en 2009. Je l’espérais d’autant plus que la dernière semaine de travail était certes passionnante, mais aussi fatigante avec la formation d’ingénieurs algériens en gestion de projets. Cette formation se déroulait à Bruxelles, ce qui m’obligeait à me lever plus tôt que d’habitude et à parcourir chaque jour 70 km en scooter sous des températures glaciales.
Mercredi soir, on annonçait des chutes de neige pendant la nuit ou à partir de 9 heures. Je n’ai pas beaucoup dormi, ne sachant pas trop ce que je ferais si tout était couvert de neige au petit matin. Il n’en fut rien, et j’arrivai à Bruxelles sans difficultés. Vers 11 heures, la neige commença à tomber. Continuer à former ne fut pas facile : j’ai toujours constaté que lorsqu’il neige, il y a comme une certaine nervosité qui apparaît. Que dire alors d’un groupe d’Algériens pour qui la neige n’est quand même pas un phénomène fréquent !
Au début de l’après-midi, la neige se fit plus tenace. J’entrevoyais déjà le pire. Je n’allongeai pas le temps de formation et, vers 16h20, je quittais le parking. Dès les premiers mètres, ce ne fut pas une sinécure. Le parking était recouvert de neige et je compris rapidement que ma roue arrière filait à gauche ou à droite à chaque accélération. Je me disais que ce n’était que lié au parking peu utilisé et que tout irait bien dès que je serais dans les rues de la ville. Je dus vite déchanter : celles-ci ressemblaient à une patinoire de Noël plutôt qu’à des voies de communication. Avec beaucoup de concentration, quelques glissades heureusement contrôlées, quelques bouffées de chaleur, j’atteignis cependant l’entrée de l’autoroute. Il commençait à faire noir, ce qui n’arrangeait rien. D’autant plus que ma sueur m’empêchait de fermer la visière de mon casque dans la mesure où, très rapidement, je ne voyais plus rien du tout !
Qu’à cela ne tienne, je commençai à me faufiler entre les files de voitures. Il était 17 heures et tout était quasi à l’arrêt alors que les départs des bureaux n’allaient que commencer. J’avais conscience du danger de mon avancement, mais j’avançais. Je dépassai ainsi plusieurs autres motards qui, eux, ne se risquaient pas à la remontée des voitures.
Soudain, la neige recommença à tomber. En même temps, le gel s’accentua. C’est à temps que je vis l’autoroute devenir de plus en plus brillante. Ce n’était plus de l’eau qui était au sol, mais du verglas. Je décidai d’arrêter ma remontée de voitures. Combien en avais-je laissées derrière moi ? Un sacré paquet. Je roulais désormais au pas, mes deux pieds assurant un semblant de stabilité.
La sortie de l’autoroute se rapprochait. Je me disais que j’avais sans doute fait le plus dur. Je commençai à sortir, me posant quelques questions en voyant la difficulté que rencontraient certaines voitures pour monter la bretelle d’autoroute. Ce questionnement était pertinent : à peine sorti d’un mètre de l’autoroute, je glissai lamentablement et ne pus cette fois contrôler le mouvement. Mon scooter s’allongea sur la route. Je m’empressai de le relever. Il ne démarrait plus. Je le poussai dans une demi-inconscience vers le bord de l’autoroute, pour m’extraire au plus vite des dangers. J’y parvins et pris rapidement ma décision : je ne ferais pas un mètre de plus ! Je rangeai donc ma machine, non sans inquiétude. Juste avant de la quitter, je tentai de la faire démarrer, ce qu’elle fit sans hésitation. C’était toujours ça.
Je montai à pied la bretelle de l’autoroute en constatant de visu combien celle-ci était impraticable. Ma décision était la bonne ! J’avais 7 km à parcourir encore. Je fis du stop. Un taxi me prit d’abord. Puis une autre voiture. J’avais bien essayé de contacter ma femme, mais les réseaux étaient saturés. On le comprend. J’étais dans ma deuxième voiture qui semblait totalement bloquée dans une file anormale. Le téléphone sonna : une inconnue me dit qu’elle me passait ma femme. Celle-ci avait appris par mon fils que je revenais à pied et, prise elle-même dans les méandres neigeux tout en ayant été abandonnée par la batterie de son GSM, me signalait qu’elle était à un rond-point… quelques centaines de mètres devant moi. Tout était encore à l’arrêt. Je descendis de la voiture et rejoignis à pied celle de ma femme. Il nous restait quatre kilomètres à parcourir, normalement déserts. Nous mîmes 50 minutes pour faire ce trajet qui ne demande d’habitude que quelques minutes.
Notre soirée d’anniversaire prit une autre tournure que nous ne l’avions imaginé, mais enfin, nous étions à la maison, ensemble, et – en ce qui me concerne – en vacances.
Aujourd’hui, vers 10h30, je me suis décidé à espérer pouvoir réduire mon angoisse pour mon scooter. Je suis parti à pied et en stop. J’ai été pris par une charmante dame qui partait à la recherche du GSM perdu par sa fille… juste après que celle-ci ait aidé ma femme à me téléphoner ! Une autre voiture m’amena au-dessus de l’autoroute. Je descendis la bretelle. Je ne voyais pas ma moto parce qu’il y avait 5 ou 6 voitures qui avaient passé la nuit là aussi ! Finalement, je vis mon engin préféré, tout couvert de neige. Il démarra sans difficulté. Après l’avoir dégagé, avoir retiré de la neige glacée qui créait des monticules infranchissables, je pus enfin démarrer et me retrouver sur l’autoroute jusqu’à la sortie suivante. Je ne vais pas dire que tout se passa sans problème, mais je suis arrivé à la maison sans encombre, une heure et demie après en être parti.
Tout est bien qui finit bien ? Non, pas vraiment. Ma voiture est coincée chez nous, au bas d’un chemin impossible à monter. Mon fils vient de partir… en scooter : il n’en pouvait déjà plus d’être enfermé dans la maison. Ma fille doit quitter ce soir son travail pour rentrer chez elle, à Bruxelles et… en scooter ! Bref, les angoisses ne sont pas finies. Normalement, ce soir, nous allons au théâtre. Sera-ce possible ? Je n’en sais rien à vrai dire.
La neige est là. Elle étale son manteau blanc et son profond silence, et c’est bien joli. Mais qu’est-ce que cela me fait ch… !
PS : pour la petite histoire, mon scooter abandonné sur l'autoroute a même eu les honneurs du journal télévisé de BEL-RTL ! Quelle affaire quand même !
Et bien, quelle aventure ! La neige sur la route, et surtout si elle donne du verglas, quelle galère...
RépondreSupprimerVivement le temps sec ! et Noël aux tisons !