vendredi 12 novembre 2010

Un cheveu trop tard

Claude Jones n’était pas un ange. Il avait même été condamné à la prison à vie pour le meurtre d’un co-détenu. En décembre 2000, il a été exécuté en application de la décision d’une cour de justice texane, pour un autre meurtre. L’élément clé de la condamnation était un cheveu qui prouvait sa présence sur le lieu du crime commis en 1990. En 2010, des analyses ADN viennent de montrer que ce cheveu n’appartenait pas à Claude Jones, mais sans doute à la victime. Entre-temps, Claude Jones est mort !

Les analyses ADN n’innocentent pas automatiquement Claude Jones. Mais elles permettent quand même de se poser pas mal de questions. Une fois de plus, un individu a été déclaré coupable sur la base d’un indice qui se révèle obsolète quelques années plus tard. Claude Jones a eu beau clamer sans arrêt son innocence, rien n’y fit. La veille de son exécution, il avait encore déposé une requête pour que des tests ADN soient pratiqués sur ce cheveu. Le gouverneur du Texas de l'époque, un certain George W. Bush, avait refusé. Et Claude Jones est mort.

Le travail de la justice n’est jamais facile et ce serait trop simple de dire qu’une fois de plus elle a fait n’importe quoi. N’empêche, il faut se poser des questions. La plus évidente me semble celle de la peine de mort. Comment des êtres humains peuvent-ils décider légalement d’en tuer un autre ? Que cet autre soit coupable du pire des crimes ne change rien. Comme l’a si bien chanté en 1980 Julien Clerc, sur des paroles de Jean-Loup Dabadie, « Lorsque le couteau est tombé, le crime a changé de côté ! Ci-gît ce soir dans ma mémoire un assassin assassiné… ». En Europe, la peine de mort a été abolie ou n’est plus appliquée. Comment peut-on accepter que de grands États la considèrent encore comme un moyen de rendre justice ? Et Claude Jones est mort.

La société doit se protéger des criminels, c’est l’évidence même. Elle doit rendre aussi justice au nom des victimes. Souvent, la condamnation du coupable est un événement essentiel de l’indispensable résilience de la victime ou de ses proches. N’empêche, comme l’ont montré deux procès récents en Belgique, toute condamnation qui ne se fonde que sur des indices et non sur des preuves pose question. Les condamnés de ces deux procès font appel en Cassation. Au bout du processus juridique, il est possible qu’une autre vérité judiciaire émerge ! En attendant, Claude Jones est mort.

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