jeudi 19 octobre 2017

Moi aussi… j'ai peur d'être homme

Moi aussi. Me too. Un soir, je suis allé au lit avec mon amie. Je l’aimais bien, mais pour plusieurs raisons complexes, depuis le début de notre relation, je n’avais pas envie de faire l’amour avec elle. Elle le voulait. C’est normal. Ce soir-là, elle ne m’a pas laissé le choix. Elle s’est littéralement empalée. Je n’ai rien pu faire. Je me suis senti violé. Je ne dis pas que j’ai été violé. Je l’ai vécu comme tel et je suis marqué à vie, mais je sais que ce n’est rien par rapport à ce que peut endurer une femme.

Les femmes doivent en plus assumer la banalisation du harcèlement viril. La plupart des harceleurs, des condescendants et même des violeurs ne se rendent pas vraiment compte de ce qu’ils font. Pour eux, c’est « normal » et « naturel » de mettre la main aux fesses, de lancer une boutade salace, de prendre possession de ce corps désirable et perçu ouvert. La question du consentement ne se pose même pas : la femme n’est – pour eux – qu’un objet qui ne peut qu’être soumis à leur force, leur pouvoir, leur désir. La société, globalement, ne les contredit pas. Elle se comporte aussi trop souvent comme si c’était normal, comme si cela allait de soi.

Ce qui se passe mondialement pour le moment est important. Je ne suis pas sûr que cela changera fondamentalement les choses. Mais au moins, une parole se sera libérée. Les hommes ne peuvent plus ignorer l’ampleur du phénomène, tant en ce qui concerne l’étendue des femmes blessées qu’au niveau de la douleur que l’arrogance masculine engendre chez elles.

J’ai peur d’être homme. Fondamentalement, je ne me crois pas capable de la moindre parole ni du moindre geste offensants. N’empêche, comme mon ami Robert l’a très bien chanté en 1978, j’ai peur d’être homme.

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J'ai peur d'être homme (Robert©1978)


femme pillée,
violée, souillée
femme je pleure
ma mère ma sœur
ma fille - son âme
son corps - ma femme
perdus en toi
quand aux abois
tu fus ouverte
et recouverte
contre ton gré
contraint, forcée
j’ai peur d’être homme
en sachant comme
un autre moi
usa de toi

car nul n’est île
en soi-même, il
est frère tu sais
si frère de laid
s’il rit encore
la honte mord
mes cœur esprit
ô je t’en prie
toi fracturée
toi déchirée
si tu le peux
pardonne un peu
c’est pour chacun
qu’il fit soudain
- jouant de toi -
sonner le glas

le glas des gens
si bien pensants
qu’ils ne voient que
ce qui est eux
ceux qui « prison »
« ségrégation »
« chambre à louer
sauf étranger »
je ne voudrais
pas juger mais
si fait horreur
le violeur
au nom des femmes
que l’on condamne
à ses côtés
la société

bonnes consciences
avez-vous chance
après chanté
d’aller en paix
vous n’êtes pas
de ces gens-là
mais le voisin
peut-être bien
quant à moi-même
femmes que j’aime
violées ou non
je garde mon
sexe coupable
d’être capable
par un baiser
d’assassiner

lundi 16 octobre 2017

Violence à deux vitesses

« La violence n’est jamais une réponse. Nous condamnons toute forme de violence et réaffirmons notre appel au dialogue politique ». C’est en ces termes que Charles Michel, 1er ministre belge, s’est exprimé le 1er octobre pour condamner les violences policières en Catalogne. En Belgique, ce 15 octobre, les policiers ont appréhendé – non sans une certaine violence – une quarantaine de migrants au Parc Maximilien. Charles Michel n’a pas (encore ?) condamné cette violence !

Il en est même responsable. Bien sûr, le responsable politique de cette rafle est Philippe Close, le bourgmestre de Bruxelles. Encore un de ces socialistes qui ont oublié que l’essence même du socialisme est la solidarité ! Charles Michel, au moins, n’est pas socialiste. Il est libéral. Au nom de la liberté, le libéralisme défend le chacun pour soi, surtout chacun pour les riches. Associé aux nationalistes flamands de la N-VA, Charles Michel se fait l’apôtre de la défense de nos privilèges belges et lutte donc contre cette migration soi-disant invasive.

Je ne pense pas qu’il faille ouvrir nos frontières et accueillir toutes les personnes qui fuient leur pays pour toutes sortes de raisons qui se résument toutes à celle-ci : leur vie est devenue insupportable. Alors, elles cherchent ailleurs, la plupart du temps au péril de leur vie. Elles savent bien que ce ne sera pas une sinécure. Mais c’est leur seul espoir. Même avec la meilleure volonté du monde, ni la Belgique ni même l’Europe ne pourraient toutes les accueillir. Il y a cependant place pour pas mal de ces migrants. Mais la question n’est pas là aujourd’hui.

Qu’on le veuille ou non, des migrants arrivent chaque jour en Belgique. De manière « illégale » pour la plupart d’entre eux. Beaucoup espèrent atteindre l’eldorado britannique et ne cherchent donc pas à légaliser leur présence sur le sol belge. Ils se retrouvent alors au Parc Maximilien, juste de passage. Soutenu par le gouvernement fédéral, Théo Franken, secrétaire d'État à l'Asile et aux Migrations, a décidé que ce n’était pas possible. Le système des rafles policières a donc été mis en place.

Pour éviter celles-ci et surtout pour être solidaires avec ces êtres humains que sont les migrants, des bénévoles belges ont mis en place un accueil de nuit. Ils pallient ainsi l’incurie des responsables politiques qui refusent de mettre en place un hébergement. Alors, des gens comme vous et moi accueillent chaque soir des migrants, pour une ou plusieurs nuits. Ces derniers se retrouvent ensuite au Parc Maximilien et sont ensuite à nouveau accueillis, pour une ou plusieurs nuits. Ce système d’accueil, basé sur l’initiative privée, fonctionne : il n’y a plus de migrants qui traînent la nuit au Parc Maximilien.

Hier, les bénévoles étaient en train d’arriver pour prendre en charge « leurs » migrants. Mais, c’est une autre (prise en) charge qui a eu lieu : les policiers ont débarqué et embarqué une quarantaine de migrants. Non sans violence. Ni sans menaces vis-à-vis des citoyens belges.

C’est inacceptable. En tant que citoyen belge, je clame clairement « Pas en mon nom » ! Ces agissements témoignent d’une absence totale de politique migratoire. Il n’y a aucune gestion de la migration. Juste une répression gratuite et aveugle. Tout ça avec la bénédiction de tous les partis traditionnels. Avec même le relatif silence complice d’Écolo. Bien sûr, il y a là un calcul électoral : lutter contre les migrants se révèle malheureusement gagnant. C’est justement là qu’on est en droit d’attendre de nos responsables politiques un sursaut de conscience. Il ne viendra pas. Seule la violence viendra, prenant – ici comme ailleurs – la place du dialogue politique et de la responsabilité collective.