jeudi 18 novembre 2021

Convaincre ?

 

Dans cette crise sanitaire, s’il y a bien quelque chose dont je suis convaincu, c’est que personne ne peut (plus) convaincre personne de quoi que ce soit. Chacun a beau afficher des arguments construits ou non, ça ne change rien : l’autre reste dans sa position, quelle qu’elle soit. Il essaiera bien de contrer l’argument de l’autre, mais sans vraiment l’écouter. Au bout du compte, rien.

C’est la raison principale qui fait que depuis le début de la pandémie, je n’ai jamais publié quoi que ce soit en essayant de convaincre ceux ou celles qui n’auraient pas le même avis que moi. J’ai bien publié certains billets cherchant à apporter de l’information, à nuancer certaines affirmations, à éclairer les différents regards… sans jamais croire que cela aurait le moindre impact. J’ai souvent été plus incisif en commentant des posts de certains amis sur Facebook. C’est difficile de lire certaines absurdités sans réagir ! J’ai réagi… et je n’ai convaincu personne. Ai-je perdu mon temps ? Peut-être, mais on ne se refait pas…

Ce matin, j’ai reçu ma 3e dose de vaccin. Non pas pour obéir en mouton au discours dominant. J’en ai discuté avec mon médecin traitant, un gars pas vraiment partisan au départ des médecines invasives. Mais un gars qui réfléchit lucidement, en connaissance de cause, et qui prend les réalités telles qu’elles sont. Dans notre discussion, il est apparu que dans mon cas il était préférable d’avoir cette protection supplémentaire. Et voilà.

J’ai réfléchi aussi de mon côté. Dans ma vie professionnelle, j’ai formé beaucoup de personnes à la gestion de projets, y compris l’analyse des risques. Il y a des risques en acceptant d’être vacciné. Pour les deux premières doses, j’ai chaque fois eu deux ou trois jours où je me sentais moins bien, sans gravité heureusement (pour dire les choses comme elles sont, j’ai été bien plus malade et pendant 15 jours lorsque j’ai eu le Covid). Mais oui, les effets secondaires existent. Dont l’effet le plus grave : la mort. Je parlerai ici uniquement de cet effet secondaire, car il est le plus factuel qui soit. Il y a d’autres effets secondaires, ils sont analysés par la pharmacovigilance, mais ils sont plus difficiles à comptabiliser. Parlons donc de chiffres.

En Belgique, il y a actuellement 8 625 656 personnes vaccinées, soit 74,9% de la population. Les observations officielles attribuent 4 cas de morts au vaccin. Traduire ça en pourcentage est illisible, alors disons que cela fait 4,64 décès pour 10 000 000 d’habitants. Ce sont les chiffres belges, mais ils sont sans doute valables plus largement.

Toujours en Belgique, les chiffres officiels donnent 1 540 000 cas de Covid détectés à ce jour. Parmi ceux-ci, il y a eu 26 484 morts. Cela fait 171 974,03 décès pour 10 000 000 de cas.

Certains me diront (mais oui, on me l’a dit) que ça, ce sont les chiffres « officiels » (et donc sujets à caution contrairement aux chiffres « aliternatifs ») et qu’« on sait bien que la plupart des "morts de Covid" ne sont pas morts du Covid » (sic).

Admettons qu’il y ait quelques erreurs d’approximation dans les chiffres, mais enfin, restons réalistes : s’il y a des erreurs, elles ne peuvent être que marginales et ne nous fions donc pas trop aux décimales… Mais enfin, il y a quand même un ordre de proportion. Selon ces chiffres, la maladie Covid-19 est (environ) 37 000 fois plus meurtrière que les vaccins élaborés pour s’en protéger.

N'importe quelle personne sensée conclurait qu’il vaut mieux se vacciner. Mais l’intelligence humaine est pleine de surprises : d’aucuns restent convaincus, en toute bonne fois (et j’insiste sur cet aspect), qu’il vaut mieux ne pas se faire vacciner parce que c’est bien trop dangereux.

Ce ne sont que des chiffres sur une dimension. Je pourrais en fournir bien d’autres, mais cela ne changerait rien. Ceux et celles qui pensent qu’il vaut mieux ne pas se faire vacciner continueront à penser qu’il vaut mieux ne pas se faire vacciner. Point barre.

Et mon billet n’aura convaincu aucun d’entre eux. Triste réalité.

jeudi 11 novembre 2021

Transmettre la mémoire… pour vivre


FMG © 2021

Il faut bien l’avouer : je n’aurais jamais pensé, il y a quelques années encore, assister à une cérémonie de commémoration du 11 novembre 1918. Je n’ai pas beaucoup d’attirance pour le passé et encore moins pour les guerres passées qui n’auraient jamais dû avoir lieu.

Ce matin, j’ai assisté avec émotion à l’hommage qui a été rendu dans mon village, Archennes. Je ne suis toujours pas attiré par le passé et ses guerres, mais deux éléments m’ont amené à me dire que ma place était là.

D’une part, mon père – même s’il n’est plus là physiquement – m’accompagne dans ma vie quotidienne. Il était né durant cette grande guerre et n’en a sans doute pas vraiment ressenti toute la barbarie. Mais lors de la suivante, dès les premiers jours d'invasion de la Belgique, il devint prisonnier de guerre, en captivité pour cinq ans de sa vie. Il n’en parla jamais beaucoup, mais depuis sa mort, à 98 ans, j’ai pris encore plus conscience du poids de ces stupidités guerrières. Ceux et celles qui les ont vécues, de près ou de loin, avec une jeunesse bousillée, voire définitivement disparue, ont bien droit à tout notre respect et notre souvenir. Pour la plupart, ils ou elles n’ont rien demandé. Mais ils se sont retrouvés dans un engrenage monstrueux qui, parfois, leur a pris leur vie, bêtement, sans seconde chance…

D’autre part, l’engagement citoyen que permet mon changement, il y a cinq ans, de région linguistique m’aide à mieux comprendre ce que signifie la mémoire citoyenne. Il ne s’agit pas de glorifier qui que ce soit dans le fatras des bêtises humaines. Il s’agit seulement de ne pas oublier. Et peut-être de revivre un peu, juste par le souvenir, les derniers moments de ces personnes qui fondamentalement ne demandaient qu’une chose : vivre libre.

Lors de la cérémonie de ce matin, après le (court) discours de circonstance de Thierry, porteur du drapeau du souvenir, il y avait deux gerbes de fleurs à déposer devant le monument. La première le fut, logiquement, par le bourgmestre. Pour la seconde, Thierry, maître de cérémonie, invita un enfant qui y assistait avec sa maman, à venir faire ce geste simple. Par cette invitation spontanée, Thierry a donné tout son sens à ce moment. Il s’agit bien de transmettre la mémoire, de garder vivants ces citoyens – nos parents, nos grands-parents, ceux de nos voisin·es… – qui se sont retrouvés dans une situation que personne ne souhaite vivre, mais qu’ils ont assumée. Sans doute avec plus de peur que de courage.

Il n’y a pas de plus grand courage que d’avoir peur de mourir pour ceux et celles qui restent. Il est important que les enfants et les jeunes le sachent et ne l’oublient pas. L’ennemi qui les attaquera n’aura peut-être pas un fusil en mains. Dans cette guerre climatique mondiale, il sera invisible. Certains de nos enfants et de nos jeunes y laisseront sans doute aussi leur vie, sans l’avoir demandé, sans même savoir si cela permettra aux autres humains de continuer à vivre libres. Au moment où la COP26 se termine, avec des effluves nauséabonds d’échec, voir un enfant fleurir ce monument aux morts m’a permis de respirer un parfum – tout aussi éphémère que fondamental – de liberté, d’espoir, de vie.

dimanche 7 novembre 2021

Derrière la saleté


FMG © 2021

La vie est loin d’être un long fleuve tranquille. En réalité, la plupart du temps, on est dans la saleté, de près ou de loin. Il est parfois possible d’utiliser un aspirateur. Ce sont des appareils qui n’arrêtent pas de se perfectionner et qui sont de plus en plus autonomes. Il suffirait donc de leur laisser faire leur job, mais il faut encore leur dire de le faire et surtout les vider de cette saleté simplement déplacée. Et cette souillure prend elle-même tant de formes différentes…

Elle s’immisce là où elle peut, sans trop se poser de questions. Quand elle n’est que poussière externe, ce n’est pas trop grave. Mais lorsque c’est notre corps qui en devient l’hôte, c’est une autre question. Et les aspirateurs, aussi performants qu’ils soient, ne peuvent pas toujours être d’une grande aide.

Prenons mes pieds. Comme écrivait Prévert, dans son poème « Dans ma maison » :

C'est très intelligent les pieds
Ils vous emmènent très loin quand vous voulez aller très loin
Et puis quand vous ne voulez pas sortir
Ils restent là, ils vous tiennent compagnie
Et quand il y a de la musique, ils dansent
On ne peut pas danser sans eux
Faut être bête comme l'homme l'est si souvent pour dire des choses aussi bêtes
Que "bête comme ses pieds", "gai comme un pinson"…

On ne peut pas marcher sans eux non plus. Depuis plus de dix ans, à chaque pas que je fais, j’ai mal. Mal à la plante des pieds. J’ai mal quand je marche, mais aussi quand je ne marche pas. Je suis bien sûr allé voir l’un ou l’autre podologue. Je porte des semelles dont je ne peux plus me passer, mais qui pourtant ne sont jamais parvenues à régler mon problème. J’ai fait de la kiné, mais sans plus de succès. Depuis le temps, je me suis fait une raison. Ça ne m’empêche pas de marcher et de faire des balades à défaut de ballades. Ça fait mal, mais – derrière la saleté – il y a les lumières qui éclairent toujours le chemin de manière sans cesse renouvelée.

Mon problème de pieds me pourrit la vie, mais il n’est de toute évidence qu’un détail, qu’un simple désagrément. Je suis bien placé pour le dire : il y a des saletés bien plus sournoises que ces pépins qui picotent ma base corporelle.

Ces saletés-là ne se posent pas plus de questions que la crasse usuelle. Elles s’installent sans qu’on leur demande ni qu’on les y autorise et pénètrent dans toute ouverture qui s’offre à elles. Sans qu’on puisse y faire grand-chose. Aspirer, inspirer, transpirer, respirer…

Et pourtant, derrière toute cette saleté, il y a des lumières auxquelles on ne s’attend pas, il y a des découvertes qui rapprochent, il y a des forces qui alimentent la vie, il y a des étincelles qui permettent de croire qu’un demain reste possible. Il faut juste regarder…

Il nous faut regarder
Ce qu'il y a de beau
Le ciel gris ou bleuté
Les filles au bord de l'eau
L'ami qu'on sait fidèle
Le soleil de demain
Le vol d'une hirondelle
Le bateau qui revient.

(Jacques Brel)