jeudi 8 avril 2021

Hemmes et fommes, même combat

 

L’affront fait aux femmes par le protocole turc lors de la réception des autorités européennes par M. Erdogan, président turc, est affligeant. Le plus désolant est l’attitude, ou plutôt la non-attitude, de Charles Michel, Président adoubé du Conseil européen qui s’est contenté d’allonger les jambes pour prendre ses aises et faire comme si de rien n’était. Pendant ce temps, Mme Ursula von der Leyen, Présidente de la Commission européenne, s’étonnait de ne pas trouver de siège et se résignait à s’asseoir sur un sofa lui conférant de toute évidence un statut inférieur.

Je ne vais pas ici ergoter sur cet épisode malheureux. Il faut en fait surtout se réjouir de voir une femme à la tête d’une institution aussi importante. Ce n’est pas partout pareil.

La place de la femme en politique, comme en beaucoup de domaines, est souvent minorée et cela pose un réel problème. Les élus politiques sont censés représenter la population. Celle-ci est constituée à parts quasi égales d’hommes et de femmes*. Il serait donc normal qu’il y ait autant de femmes que d’hommes dans les assemblées politiques ainsi que dans les exécutifs. C’est loin d’être le cas, malgré de très rares exceptions.

Pour lutter contre cette situation, plusieurs systèmes ont été mis en place. Singulièrement en Belgique où, pour les élections communales et provinciales, le principe de la « tirette » est de vigueur depuis 2018 : sur les listes, les deux genres doivent être intercalés, que ce soit une femme, un homme, une femme… ou un homme, une femme, un homme…

Pour assurer la parité, il y a aussi des systèmes de quota, avec plusieurs possibilités : dans les élus, ou dans les exécutifs, il faut un minimum d’un genre (par exemple, au moins un tiers de femmes ou au moins un tiers de chaque genre), voire la parité parfaite.

Cette dernière formule semblerait aller de soi et est défendue par de nombreuses personnes. Elle pose cependant des problèmes démocratiques, surtout si la parité n’est pas respectée au niveau des candidatures. Par exemple, j’ai vécu une élection interne à un parti politique dans lequel le principe de parité effective est la règle (même si elle n’est pas nécessairement écrite). L’élection concernait deux postes à pourvoir. Il y avait 4 candidats : 1 femme et 3 hommes. Il ne faut pas avoir fait de hautes études statistiques pour se rendre compte de la difficulté : la femme avait 100% de chances d’être élue, alors que les hommes n’en avaient que 33%. Dit autrement encore : la femme était retenue d’office, l’élection n’ayant lieu que pour les hommes. Dans le cas présent, cela ne représentait pas une réelle difficulté, mais on voit qu’un objectif louable d’assurer une représentation équitable de la population peut conduire à un processus dont la dimension démocratique est en partie niée.

Personnellement, je préfère donc de loin le système de la « tirette » qui assure à la fois la présence égalitaire des deux genres et la liberté de choix aux électeurs. Et cette liberté, ceux-ci la prennent. Dans ma commune, les élections communales de 2018 ont permis de déboucher sur un conseil communal constitué en majorité… de femmes ! Les électeurs ont choisi une majorité de femmes pour trois des cinq listes présentes aux élections (chacune en tirette parfaite). Les deux autres listes n’ont que deux élu(e)s, voire même un seul. On en est même aujourd’hui à une situation tout à fait inédite pour une des listes, ayant obtenu 8 sièges. Actuellement, ces 8 sièges sont tous attribués à des femmes ! Certes, il y a eu des démissions et malheureusement un décès, mais il est quand même extraordinaire – et merveilleux – d’avoir ainsi un groupe politique exclusivement composé de femmes, non pas parce que des règles ou des quotas l’auraient imposé, mais parce que les électeurs ont choisi de porter leurs votes avant tout sur des femmes. On est là bien loin d’une situation artificiellement imposée, mais face à une réelle orientation donnée par les électeurs dont on ne peut que se réjouir.

* En réalité, actuellement, il naît plus de garçons que de filles. Ce n’est que pour la tranche 50-54 ans, que l’égalité est plus ou moins parfaite. Au-delà de cette tranche, il y a plus de femmes.