mercredi 31 juillet 2013

Juillet 2013

Parler du temps est une activité que, globalement, j’essaie d’éviter. Parler du temps qui passe me semblerait assez passionnant, mais pour aller au fond du temps, il en faudrait justement beaucoup. Parler du temps qu’il fait est un passe-temps bien plus répandu, mais d’une affligeante banalité, d’autant plus que la plupart du temps, les gens en parlent pour se plaindre ! À quoi sert-il de se plaindre de quelque chose contre lequel on ne peut rien faire, ou du moins pas à une échelle individuelle ? Bref, ce billet parle – notamment – du temps qu’il fait, mais pas pour se plaindre !

Ce mois de juillet 2013 a été exceptionnel ! Quelque 30% plus ensoleillé que la normale, selon David Dehenauw, météorologue attaché à l’IRM. Mes propres chiffres confirment cette déclaration : la production d’électricité solaire a été 25% supérieure à celle de juillet 2012 et 41% supérieure à celle de juillet 2011 ! Pas assez cependant pour combler le déficit des six premiers mois de l’année 2013, mais ne boudons pas notre plaisir : quel beau mois de juillet !

Il y a eu des tas d’autres événements positifs durant ce mois, tant à l’échelle mondiale que nationale ou familiale :
  • le 1er juillet, la Croatie est devenue membre de l’Union européenne ! Plus on est de fous, plus on s’amuse ;
  • le 13 juillet, au Bhoutan, le Parti démocratique populaire remporte les élections générales ;
  • le 15 juillet, le télescope Hubble découvre S/2004 N 1, le plus petit satellite de Neptune connu à ce jour ;
  • le 21 juillet, le Roi Albert II abdique après 20 ans de règne, en faveur de son fils Philippe lors d’une superbe fête nationale belge. Dans son discours d’intronisation, Philippe reconnaît de manière tout à fait claire la réalité fédérée de la Belgique ;
  • le 24 juillet, mon premier petit-fils – Alexis – voit le jour, adorable et merveilleux. Désolé s’il fait de l’ombre à un certain George, prénom de son arrière-grand-père, né deux jours plus tôt dans l’indifférence générale ;
  • à partir du 23 juillet, les Journées Mondiales de la Jeunesse ont lieu au Brésil, permettant au pape François de répéter son engagement pour une société plus juste et plus solidaire ;
Impossible évidemment d’ignorer que ce mois de juillet fut aussi celui de plusieurs catastrophes liées aux transports publics : Lac-Mégantic (Canada), Brétigny (France), Saint-Jacques-de-Compostelle (Espagne), Naples (Italie), Granges-près-Marnand (Suisse)… Cela fait beaucoup. Beaucoup trop.

Je n’oublie pas non plus, bien sûr, qu’au début du mois, mon papa s’est fait la malle, après 98 années de bons et de loyaux services.

La vie est ainsi faite : des moments chauds, pleins de vie, à côté d’instants où l’on se sent frigorifié.

Ce mois de juillet 2013 restera pour moi marqué par la luminosité. Celle du temps qu’il fait, bien sûr, mais aussi et surtout celle du temps qui passe, qui apporte à chaque instant cette chaleur humaine qui fait la vie. 

mardi 30 juillet 2013

Chansons oubliées : La p’tite tête, par Aimé Duval (1959)

Aimé Duval, plus connu sous l’appellation « Le père Duval ». En 1959, j’avais 5 ans. Pas vraiment l’âge d’écouter et d’apprécier le « Brassens en soutane ». C’était plutôt mon frère aîné qui accrochait, sans doute avec l’assentiment de mes parents bons catholiques. Mais quelque part, ce prêtre chantant était en train de me faire découvrir la chanson française, la chanson de paroles.

C’était quand même un personnage. En d’autres temps. Il ne serait sans doute plus possible aujourd’hui d’avoir un chanteur – seul sur scène, avec sa guitare – qui se permet de délirer musicalement pendant que la salle entière, bourrée, chante en c(h)œur la chanson dans sa version originale. Il serait encore moins possible qu’un chanteur « religieux » ait un tel succès (même si le succès du groupe « Les Prêtres », avec beaucoup moins de charisme, n’est pas à dédaigner).

Cela reste pour moi essentiellement une émotion musicale : à l’âge que j’avais, la dimension religieuse m’importait peu, mais l’énergie et la mélodie m’emportaient.

La vie du bonhomme, au-delà du conte de fée de la chanson, ne fut pas un fleuve tranquille. Inexorablement, le père Duval est devenu alcoolique. Dans la souffrance et la solitude. Il en a témoigné dans un livre – « L'Enfant qui jouait avec la lune: Chanteur, Jésuite, Alcoolique » - et dans une interview encore accessible.

Au passage, il était donc jésuite. Comme le pape François. Mine de rien, le message que celui-ci vient encore de transmettre lors des JMJ au Brésil me semble assez bien dans la ligne de celle chantée par Duval. « Que fais-tu là à m'attendre mon ami ? Ton ciel se fera sur terre avec tes bras ! ».

Peu importe. Ce qui compte, c’est l’émotion. Celle de la chanson. Et plus de 50 ans plus tard, je la ressens encore !


Qu'est-ce que j'ai dans ma p'tite tête
À rêver comme ça, le soir,
D'un éternel jour de fête
D'un grand ciel que j'voudrais voir !

J'ai roulé, j'ai vécu, j'ai aimé,
Et j'ai passé aujourd'hui des moments roses,
Mais j'ose espérer, Seigneur, bien autre chose !

Et j'attends, cœur ouvert, rêvant,
Battant la semelle à la porte de ton ciel,
Je crois qu'un beau jour ton amour l'ouvrira.

Et voici que Jésus m'a surpris :
« Que fais-tu là à m'attendre mon ami ?
Ton ciel se fera sur terre avec tes bras ! »

lundi 29 juillet 2013

Citoyen du monde

Garry Davis est mort ce 24 juillet, à 91 ans. Cette nouvelle est passée quasiment inaperçue, quoi de plus normal pour un homme de cet âge. Mais ce n’était pas n’importe qui : en mai 1948, il rompt symboliquement avec sa patrie en rendant, à Paris, son passeport à l'Ambassade américaine. Il se déclare « citoyen du monde » et revendique, en collaboration avec Albert Camus, la création d’un gouvernement mondial.

Depuis lors, il n’a jamais quitté cette ligne de conduite et créa le « Mouvement des citoyens du monde ». L’idée est simple : nous sommes tous citoyens du monde et nous sommes donc tous solidaires, sans besoin de gouvernements nationaux. Cette idée est cependant bien éloignée de la mondialisation telle que nous la vivons aujourd’hui, à savoir surtout une mondialisation des capitaux, et non pas – malheureusement – des êtres humains. Bref, une machine à broyer plutôt qu’un ferment de paix et de concorde.

L’idée de Davis (et d’autres) est sans doute trop simple. Elle méconnaît la réalité des nationalismes et autres sectarismes qui plus que jamais nourrissent notre monde. Mais n’est-elle pas, sur un plan politique, la seule issue ?

La question n’est pas culturelle : nous naissons tous dans une certaine culture dans laquelle nous allons construire notre identité propre. Celle-ci sera unique, en s’inscrivant intimement dans une certaine culture. Ayant voyagé un peu partout dans le monde, j’ai pu constater que ce qui fait la spécificité d’un lieu, c’est sa culture et son rapport à la religion (ou – autrement dit – aux questions ontologiques fondamentales). Il serait vain de viser une culture universelle. Non seulement ce serait impossible, mais de plus une telle tentative serait fondamentalement un appauvrissement de l’humanité, par formatage de la diversité.

Par contre, sur un plan politique – c’est-à-dire la gestion collective des biens communs – comment peut-on imaginer à terme autre chose qu’une gestion véritablement collective des biens communs et donc un gouvernement mondial ?

Davis s’en est allé poursuivre son chemin. Ses idées restent, peu diffusées il faut bien l’avouer. Mais il restera, à tout jamais, le « premier citoyen du monde » !

dimanche 28 juillet 2013

Une lèvre à la taille de guêpe


Pour fêter la fin du weekend, j’avais décidé d’ouvrir une bonne bouteille de Pinot noir, de Bourgogne. Je m’en étais servi un verre en guise d’apéritif, avant de commencer à cuisiner. Lorsque j’en pris une petite gorgée, j’ai tout de suite senti l’attaque et j’ai recraché le précieux liquide… ainsi que la méchante guêpe qui venait de me piquer dans l’intérieur de la lèvre inférieure. Je sentis bien qu’elle avait laissé un petit cadeau. Heureusement, ma belle était près de moi et a pu retirer rapidement le dard.

C’est là que les choses s’enveniment, c’est le cas de le dire. J’ai toujours eu des réactions allergiques à toute piqûre de plante ou d’insecte. Il n’y a évidemment pas eu d’exception aujourd’hui, et j’ai senti ma lèvre gonfler progressivement ainsi que le bas de mes joues ! Moi qui suis réputé pour la minceur de mes lèvres, j’ai rapidement acquis un nouveau charme bien insolite !

Quant à l’animal coupable, il a été rapidement condamné. Le voici dans ses derniers instants de vie !


Pour le moment, après avoir pris un antihistaminique, je sens que cela se dégonfle petit à petit et j’espère ne pas être trop gêné pour la nuit.

Ce billet est placé dans le libellé « Coups de cœur » ! Il y a deux raisons :
  • d’abord, j’ai pu cuisiner et même manger. Ce n’était pas évident, mais j’ai rempli ces deux missions ! 
  • par ailleurs, j’ai eu de la chance : il aurait suffi que j’avale un peu plus goulûment cette gorgée de vin pour que la guêpe accomplisse son forfait dans le fond de la gorge, voire même plus loin. Je n’ose pas imaginer un seul instant ce qui aurait pu se passer alors. Finalement, je m’en sors très bien ! 
Enfin, tout cela m’a permis de faire rire ma belle. Lorsqu’elle m’a pris en photo, elle n’a pas pu s’empêcher d’éclater de rire ! C’est toujours bon signe quand on fait rire les femmes !

samedi 27 juillet 2013

Moultes moules

Est-ce parce que je suis belge ? Pas sûr de la pertinence de cette explication, mais j’aime les moules ! Aussi alors que nous étions une fois de plus dans un resto crétois spécialisé en fruits de mer, alors que nous avions apprécié les prix réduits de nos précédentes tentatives, je n’ai pas hésité longtemps à choisir des moules, annoncées à 7 EUR.

Je me réjouissais de les déguster et j’avoue ne pas avoir été déçu : elles étaient délicieuses, comme le serveur me l’avait promis (ben tiens !). Donc, point de vue qualité, c’était super.

Par contre d’un point de vue quantitatif, je suis resté sur ma faim. D’abord, les moules étaient servies sans aucun accompagnement. En tant que belge, je suis évidemment habitué à recevoir des frites avec les moules. Sans compter les quelques légumes baignant dans le jus. Mais ici, rien, juste des moules ! Elles ne me semblaient pas nombreuses et je me suis amusé – façon de parler – à les compter. Il y en avait exactement quatorze ! Et 14 moules pour se sustenter, ce n’est pas beaucoup.

Le calcul n’était pas très difficile à faire : la moule me coûtait 0,50 EUR ! Ça fait cher la moule, non ?

De retour en Belgique, nous avons décidé de fêter la vie en allant au restaurant. Il y avait un grand drapeau vantant les moules enfin mûres de Zélande, et je n’ai pas résisté. Elles étaient délicieuses et servies avec d’excellentes frites. Et cette fois, la quantité était au rendez-vous. Je dirais 800 grammes de moules plutôt qu’un kilo, mais je n’ai pas pesé. Soudain, j’ai eu un doute : et si elles étaient aussi chères qu’en Crète ? Il faut dire qu’elles n’étaient pas gratuites : 23 EUR ! On ne vit qu’une fois finalement ! Je ne les ai pas comptées, mais il semble que 800 grammes de moules (= un litre, pour les français) correspondent à environ 60 moules. Ce qui fait 0,38 EUR la moule ! C’était mieux qu’en Crète, mais cher quand même !

On est en plein lancement de la saison des moules. Une grande surface belge fait une promotion : « 2+1 gratis » à 9,98 EUR les 3 kilos, soit 3,33 EUR le kilo (calibre Super), soit environ 0,05 EUR la moule ! Oups ! La conclusion est claire : il vaut mieux cuire ses moules soi-même. Bien sûr, ça n’a pas le charme du resto, mais…

Je cherche désespérément une conclusion pertinente à ce billet, mais je n’en trouve point. Dans ces cas-là, il vaut mieux faire appel à plus grand que soi et je ne résiste pas à emprunter à Pierre Desproges : « Il en est du romantisme fiévreux comme de la moule pas fraîche : quand on en abuse, ça fait mal au cœur ».

vendredi 19 juillet 2013

Là, j'ai tiqué


En début de semaine, le site du journal Le Soir a publié un article intéressant et important sur les tiques : Gare aux tiques assoiffées de sang !  Ces petites bêtes sont en effet sournoises et – dans certains cas – provoquent la maladie de Lyme qui est une sale affaire dont on connaît encore assez peu toutes les complications.

Assez bizarrement, étant donné l’importance d’une information à ce propos, l’article était – et est encore au moment où je rédige ce billet – uniquement accessible aux abonnés du Soir ou sur paiement, alors que c’est le genre d’article qui devrait être diffusé à large échelle.

Tout aussi bizarrement, si l’article donnait de nombreuses informations sur les tiques, leur prévalence et les inconvénients qu’elles provoquent, il n’y avait – dans la version Internet – aucune information sur la manière d’éliminer une tique, alors que cela paraît une information essentielle !

Il faut dire que mon habitation, où je réside depuis plus de 25 ans, est entourée de bois où des chevreuils trouvent leur bonheur. Chaque année, ma famille doit ainsi gérer entre dix et vingt tiques qui s’installent avec délectation sur notre peau pour se gaver de sang. Étant donné cette longue expérience, je me suis permis de publier le commentaire suivant : « Pour enlever une tique, utiliser de la crème Nivea (c'est l'idéal) ou autre crème grasse. En mettre un peu sur la tique, puis tourner avec le doigt dans le sens des aiguilles d'une montre. Après un certain temps, la tique se détachera de la peau, sans y laisser quoi que ce soit. Désinfecter ensuite, et rester attentif sur l'évolution ».

J’insiste sur le fait que ce commentaire se base sur une très longue expérience concrète et qu’en pratiquant de la sorte, jamais nous n’avons eu à déplorer la moindre suite négative, que du contraire. Personnellement, une seule fois j’ai suivi une cure d’antibiotiques à la suite d’une piqûre de tique, justement parce que je ne l’avais pas enlevée assez rapidement. Heureusement, tout se termina bien.

Jusque là, rien d’anormal. Mais j’avoue avoir été étonné par les réactions des internautes. Ils ont la possibilité d’estimer si le message est constructif ou non. Mon commentaire a – à ce jour – recueilli 6 oui et 8 non !

J’avoue ne pas très bien comprendre en quoi ma réaction n’est pas constructive. Je propose une solution facile et efficace, tout en attirant l’attention sur la nécessité de désinfecter et de surveiller la suite. Bien sûr, je n’ai pas recommandé d’utiliser les pinces officielles vendues en pharmacie – sur lesquelles je ne peux donner un quelconque avis étant donné que je ne les ai jamais utilisées ni même jamais vues – mais la méthode proposée est non seulement facile et gratuite, mais de plus totalement efficace. Si quelqu’un peut m’expliquer en quoi ma proposition n’est pas constructive, je suis preneur !

Pour la petite histoire, je termine par une autre méthode, mais que je ne conseille pas ! En 1996, j’étais en vacances chez ma sœur, aux USA, avec toute ma famille. Alors que nous faisions la file pour visiter la Statue de la Liberté, nous avons remarqué que mon fils cadet âgé de 7 ans avait attrapé une tique. Mon beau-frère, médecin urgentiste de son état, n’hésita pas : il prit sa carte de crédit et d’un mouvement brusque et décidé éjecta la tique ! Celle-ci n’avait rien laissé dans la peau. Ce fut l’opération la moins coûteuse – et sans doute la plus efficace – de cette carte de crédit ! Mais je le répète, cette méthode-là, je ne la conseille pas. Par contre, la crème grasse, n’hésitez pas !

mardi 16 juillet 2013

Toujours tout droit


Sauf erreur de ma part, c’est Jacques Higelin qui déclare – dans son excellent live Higelin à Mogador (1981) – quelque chose du genre : « Quand tu tournes toujours vers la gauche, tu reviens inévitablement par la droite ! ».

Il a raison. Nous en avons fait l’expérience. Le premier jour de notre petit séjour dans cette île sublime, nous avons voulu rejoindre une plage tranquille. Nous nous sommes dirigés vers celle jouxtant le village le plus proche, mais celui-ci ne nous semblant pas trop sympathique, nous avons décidé d’aller voir plus loin. Cinq ou six kilomètres de route serpentée pour arriver à un village qui était ce qu’il est, mais dont la plage nous semblait acceptable. Elle était étalée au fond d’une crique bien plaisante. Mais il y avait pas mal de monde et nous avons parcouru toute la plage pour déboucher sur des rochers pas trop peuplés et qui nous ont permis une belle baignade, bien calme. Un bon moment de détente (qui m’a valu mon coup de soleil frontal).

Quelques jours plus tard, nous avons décidé de retourner nous baigner dans cette eau aussi limpide qu’agréable. Cette fois, nous nous sommes arrêtés au premier village. Lorsque nous sommes arrivés à la plage, quels ne furent pas notre surprise et notre fou-rire : c’était exactement la même plage. Sauf que nous étions bien plus proches de notre rocher fétiche qui nous accueillit à nouveau pour une baignade tout aussi rafraîchissante et relaxante.

Bref, la première fois, nous avions fait bien des détours pour nous retrouver au même endroit, arrivant de plus par la droite alors que nous n’avions pas arrêté de tourner (majoritairement) à gauche ! En plus d’être d’une étonnante stupidité, c’est un comble politique !

Cette situation m’a évidemment amené à me poser de nombreuses questions. Moi qui clame toujours « C’est tout droit ! », ne m’encombré-je pas dans de nombreux détours ? La vie elle-même n’est-elle pas un immense détour pour retourner au point de départ ? Se rend-on compte des volutes que l’on emprunte pour construire une vie qui n’est rien d’autre qu’une spirale étroite et conditionnée ?

Ne sachant pas trop que répondre à ces questions ontologiques, j’avoue que je me suis contenté de plonger et de jouir de cette eau qui m’offrait sa sérénité fondamentale.

lundi 15 juillet 2013

Soleil de front


Le soleil, c’est bien gentil. Mais quand on le prend de front et que celui-ci – large et haut – n’est plus trop protégé par des éléments naturels défaillants, les conséquences sont désastreuses. Ce qui normalement est d’un joli rose discret se transforme en une marque rouge infamante.

J’en conviens : il y a plus grave que ça. À vrai dire, cela m’est relativement égal. Si le rouge est bien présent, il ne s’est jamais révélé douloureux, et il devrait – avec un peu de temps – se transformer en un bronzage que m’envieront ceux et celles pour qui la peau hâlée est un signe de beauté.

N’empêche, je vois bien qu’autour de moi, cela crée quelques railleries ignominieuses : « Regardez celui-là qui n’a même pas su se protéger, ce n’est pourtant pas difficile de porter un chapeau ! » ou encore « Oh, la belle tomate ! ». Voilà qu’il faut encore faire front…

Bref, j’en resterai là, non sans dire qu’il me fallait – selon les règles que je me suis données pour ce blog Réverbères – publier un « Coup de blues ». Cela fait plus de 625 messages que je respecte cette règle stupide de rotation entre quatre libellés et ce n’est pas parce que tout baigne que je vais en changer. Je ne suis pas assez effronté pour ça ! Mais rassurez-vous : comme l’écrivait Louis-Antoine-Alexandre Soumet, « Le bandeau des martyrs n'est pas pour tous les fronts ».


dimanche 14 juillet 2013

Un moment d’éternité


Photos : FMG © 2013

Les monuments sacrés m’ont toujours un peu quelque part envoûté. C’est sans doute d’ailleurs surtout une question de voûte. L’architecture religieuse n’a pas son pareil pour créer la beauté sur la base de ces demi-cercles ou autres courbes. Bref, quand je pénètre dans un lieu « divin » (quels que soient le(s) dieu(x) concernés), je me sens toujours rempli d’une mystique envoûtante.

Je ne suis pas trop amateur des grandes constructions. Je préfère les petits lieux qui n’ont que leur fraîcheur et leur simplicité à revendiquer. C’est le cas de l’église orthodoxe de Panayia, à Fodele, en Crète.  Toute petite, datant du 11e ou 12e siècle, elle offre son architecture et quelques fresques peintes, partiellement élimées pour laisser apparaître la majestuosité de la pierre originale.
Jusque-là, rien d’extraordinaire. La visite est éclair tant la pièce est petite. Lorsqu’un groupe de 7 ou 8 personnes entra à son tour, nous nous sommes gentiment esquivés pour leur laisser la place.

Nous fîmes le tour du bâtiment. Arrivé à l’arrière de celui-ci, nous entendîmes soudain un chant. Composé de plusieurs voix. Harmonieux. Mystérieux. Envoûtant. Ce n’était pas de la musique byzantine. Ce n’était peut-être même pas de la musique religieuse. C’était de la musique, celle qui ne sert à rien, mais dont on ne peut se passer.
   
Le groupe de visiteurs, des jeunes pour la plupart, s’était lancé dans ce chant mélodieux. Juste pour le plaisir et pour la magie. J’ai rejoint la porte d’entrée et j’ai joui de ce moment de grâce. Celle-ci n’avait rien de divin. C’était juste la grâce du moment.

Il n’a duré qu’un instant. Mais les frissons qui parcouraient mon corps lui offraient l’éternité. Il ne faut pas lier celle-ci à des rêves imaginaires. L’éternité est parmi nous. C’est nous qui la construisons dans ces petites choses de la vie.

samedi 13 juillet 2013

Quand la crainte s’éclipse


FMG © 2013

Il est des moments qu’on craint. Pour toutes sortes de raisons, des bonnes et des moins bonnes. La crainte est que tout aille mal, que rien ne se passe comme cela devrait. La crainte est une réalité incontrôlable, qu’elle soit fondée ou non. Lorsqu’elle s’infiltre dans notre esprit, elle s’immisce tel un poison atteignant chaque méandre de notre pensée, y créant des ravages sur les rivages de notre existence fragile.

Puis, vint le moment. L’expérience que j’en ai est que – la plupart du temps – la crainte n’avait pas de raison d’être. Tout se passe bien, pas nécessairement comme c’était prévu, mais bien. On reste, jusqu’au dernier moment, avec une pointe d’angoisse. On se dit que tout peut encore basculer, donner raison à la crainte. Rien n’est jamais évident.

J’ai pu vivre plusieurs de ces moments ces derniers temps. Mes craintes se sont révélées infondées. Elles se sont éclipsées. J’en suis bien heureux.

Ce ne furent jamais des moments faciles. Mais ils furent sereins, libérateurs, ouverts et féconds. Ce sont sans doute ces moments-là qui donnent sens à la vie, qui nous font croire que finalement tout est possible, qui éclairent le pénombre d’une lumière ardente faite d’espoir et de lucidité.

Au bout du compte, au-delà de la crainte, il y a la vie !

lundi 8 juillet 2013

Papa

Papa aimait la musique. Je crois bien que c’est la grande passion de sa vie. Toute notre enfance a été animée de son piano qu’il jouait avec beaucoup de brio. Il a essayé, sans jamais nous forcer, de nous l’apprendre à notre tour. Bernard était de loin le plus doué à ce jeu-là. J’ai personnellement préféré la guitare, tout en n’oubliant jamais tout à fait l’instrument de base. Il était certainement fier de nous entendre jouer de la musique, comme je le suis lorsque j’entends mes enfants continuer le chemin.

Papa aimait jouer de la musique, mais il aimait aussi en écouter. Dans les années 60, nous fûmes enchantés de voir arriver à la maison un tourne-disque Teppaz qui nous permit d’écouter nos morceaux favoris, mais qui lui permettait à lui aussi de se plonger dans ses disques de musique classique et parfois de jazz.

Dans cette passion musicale, il fut confronté à deux difficultés majeures : en 1980, il y eut cette embolie cérébrale qui paralysa tout son côté gauche. Il n’avait plus qu’une main pour jouer au piano. Plus tard, ce sont ses oreilles qui l’abandonnèrent petit à petit. Moi qui commence à avoir les mêmes problèmes, je peux imaginer quel drame ce handicap représenta.

Pourtant, il y a à peine un mois ou deux, alors que nous parlions de tout et de rien lors d’une de mes visites du vendredi, je lui demandai : « Et la musique, tu en entends encore ? ». Je vis ses yeux et son visage s’éblouir. Il me répondit, en chantant « Ah, mais oui… La Sol La Do Si Sol La Si La Do Si Sol La Do Si Sol La… ». Les premières mesures de la Valse Opus 64, n°1, de Frédéric Chopin. De toute évidence, la musique continuait à remplir le silence dans lequel il était le plus souvent plongé.

La musique est sans doute ce qui lui a permis de tenir le coup durant une des grandes épreuves de sa vie : ses cinq années de captivité durant la deuxième guerre mondiale. Nous savons peu de choses de ces années. Mais nous savons que cela l’a profondément marqué, pour toute sa vie. Comment pourrait-il en être autrement ? Il me semble savoir qu’il continua à jouer de la musique, plutôt avec un violon. Peu importe l’instrument, ce qui compte, c’est la musique.

Ces cinq ans de captivité – qui séparèrent inévitablement nos parents avant qu’ils puissent se retrouver pour immédiatement se marier – restèrent un sujet tabou, mais omniprésent. Aussi, le jour où je voulus rendre un hommage à Papa avec les moyens qui sont les miens, c’est tout naturellement que me vint à l’esprit cette chanson, cette valse qui fit danser Scott et Kelly lors de leur mariage en 2007.

Aujourd’hui, elle a plus que jamais son sens. Papa, tu es et tu seras à tout jamais – ad vitam æternam – mon père.


Prisonnier de guerre 

T’avais 25 ans en l’an 40
T’avais rencontré la femme de ta vie
Tu t’apprêtais à la surprendre
À l’emmener en blanc à la mairie
T’avais pas prévu qu’il y aurait la guerre
Que tu partirais défendre ton pays
Pour te retrouver prisonnier de guerre
En captivité 5 ans de ta vie
Pendant tout ce temps il t’a fallu survivre
Continuer à croire aux vertus de l’amour
Veiller à ne pas partir à la dérive
Pour exister le jour du grand retour

Et t’es revenu pour épouser ta belle
Faire comme si rien ne s’était passé
T’as fait des enfants en restant fidèle
À celle dont l’amour avait pu te conserver
C’est en silence que tu as encaissé
De voir ton fils devenir immobile
Réduit à rester à jamais allongé
Par la simple faute d’une automobile
T’as connu l’horreur de le voir partir
Vers la mort indicible qui réduit au néant
T’as dû chercher d’autres raisons de vivre
L’homme n’est pas fait pour survivre à son enfant

Et quand tu as pu enfin te reposer
Tu fus victime d’un bête caillot de sang
Qui vint réduire ta motricité
Mais sans t’empêcher de marcher vers les gens
Toi qui m’as fait découvrir la musique
Celle qui enchante les oreilles
Il a fallu que les tiennes abdiquent
T’enfermant dans un monde qui n’est pas pareil
Et t’as maintenant plus de nonante ans
Tu vis dans ton rêve qu’enfin on te libère
En riant parfois avec tes petits enfants
Toi qui seras pour toujours mon père

On ne s’est pas souvent parlé
Ça n’se fait pas d’montrer ses sentiments
Mais sache que ta plus grande liberté
Est d’avoir pu y éduquer tes enfants
T’avais 25 ans en l’an 40
T’as rencontré la femme de ta vie
T’as réussi à la surprendre
À l’emmener en blanc à la mairie

FMG © 2006

mercredi 3 juillet 2013

Juste Belge, ni monarchiste ni républicain

Charles Ier Stuart © 1636 – Anthonis van Dyck

Avec Albert II qui a – enfin – officialisé son abdication, on voit et on verra refleurir les arguments en faveur de la monarchie et, plus souvent, en faveur de la république. Personnellement, je n’ai pas de religion à cet égard. Je pense qu’il y a de très bonnes monarchies comme de très mauvaises… et il suffit de remplacer le mot « monarchies » par « républiques » pour dire une autre vérité.

Certes, les Présidents de républiques trouvent (habituellement) leur légitimité dans un vote du peuple qui pourra, lors de l’élection suivante, révoquer ou confirmer son choix. C’est un élément fondamental, tant la principale caractéristique de la démocratie est l’alternance.

Celle-ci est difficile avec une monarchie. Cela ne signifie cependant pas qu’elle n’a pas été choisie par le peuple. La monarchie belge résulte d’un choix populaire. Il date évidemment de 1831, mais c’est néanmoins un choix. En d’autres termes, les rois belges ne tiennent nullement leur légitimité d’un droit divin, mais du droit populaire. Même si effectivement, on devient roi parce qu’on est né dans la « bonne » famille !

Est-ce un véritable problème ? Tout dépend du pouvoir du roi. On n’en est plus à la monarchie absolue. La monarchie belge est « constitutionnelle », ce qui veut dire que si le roi est bien le chef de l’État, ce n’est pas lui qui le dirige. Le pouvoir est bien dans les mains du gouvernement, dirigé par le Premier ministre. Ce gouvernement dispose d’une majorité parlementaire, avec des députés directement élus par le peuple. À la différence d’autres monarchies, la nôtre n’est pas « protocolaire », limitée seulement au protocole. Le roi a un certain pouvoir qui se manifeste principalement lors de la constitution du gouvernement. Non pas que ce soit le roi qui choisisse celui-ci, mais c’est lui qui décide – sur la base des élections et des négociations – celui qui le formera. C’est un réel pouvoir qui va au-delà de l’influence, mais au bout du compte, c’est quand même la majorité parlementaire, démocratiquement élue, qui prend les réelles décisions.

À quoi sert le roi alors ? Pas à grand chose. Mais il a une fonction symbolique importante. Il est le Roi des Belges (et non pas de la Belgique). Cela signifie qu’il est censé être le roi de tous et toutes, sans discrimination. Dans notre pays où les tensions communautaires sont aussi puissantes que complexes, ce n’est pas rien. Admettons que la Belgique – dans sa structure actuelle – devienne une République. Le Président élu serait inévitablement flamand puisque la majorité des Belges sont flamands. À vrai dire, je ne vois pas qui, dans le paysage politique actuel, pourrait obtenir une majorité de votes et être reconnu par suffisamment de personnes pour être le légitime chef de l’État. En d’autres termes, si la Belgique reste unie, il n’est vraisemblablement pas possible d’élire un Président. Alors, en attendant, le roi fait l’affaire et ne pose finalement pas tellement de problèmes.

Son rôle pourrait évoluer, certes, dans une direction plus protocolaire. La question serait alors de savoir qui, et comment, jouerait le rôle d’« aiguilleur » après des élections, dans la mesure où notre système de vote proportionnel ne peut déboucher que sur des majorités hybrides. On pourrait évidemment passer à un vote majoritaire, comme en France. Mais cela n’apporterait pas de solution à la situation belge, que du contraire. Et je ne suis pas sûr que ce soit un système plus démocratique.

Bref, c’est plus par raison que par conviction que j’estime que la monarchie constitutionnelle est le régime qui convient le mieux à la Belgique. Du moins dans sa structure actuelle, qui me semble la plus adaptée à notre réalité, même si l’évolution vers plus d’autonomie des communautés et des régions est inéluctable.

Albert II fut un bon roi, dans tous les sens de l’expression. Qu’en sera-t-il avec son fils Philippe ? Personne ne peut le savoir. Je ne vois en tout cas pas trop l’intérêt d’avoir des a priori négatifs. Comme on dit, la fonction fait l’homme. Ce n’est pas elle ni lui qui empêcheront la Belgique d’évoluer ni d’exister. Les problèmes auxquels celle-ci est confrontée ne sont pas ces questions de régime. Les solutions que les Belges attendent concernent les réalités sociales, économiques, professionnelles. Les enjeux ne manquent pas. Allons à l’essentiel !