mercredi 20 juin 2018

Nous vivons dans une Belgique merveilleuse

Nous vivons dans une Belgique merveilleuse. La richesse de notre pays s’étale partout, même à la Coupe du Monde de football dont nous serons assurément les champions. Chez nous, le bonheur est permanent et tout le monde en bénéficie. C’est un véritable paradis.

Quand des journalistes de la télévision publique se font arrêter parce qu’ils filment une manifestation contre la construction d’un nouveau centre fermé pour les familles, extension du centre 127 bis, à Steenokkerzeel, notre cher et aimé Premier Ministre Charles Michel rassure tout de suite : «  La Belgique est un État de droit. La liberté de la presse est garantie ».

Lorsque le secrétaire d’État à l’Asile et la Migration, un certain Theo Francken, insiste pour que l’Europe puisse à nouveau réaliser des refoulements (push-backs) de bateaux de migrants et déclare qu’il faudrait pour ce faire contourner l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH), notre cher et aimé Premier Ministre Charles Michel rassure tout de suite : « La Belgique respecte et respectera les conventions européennes et internationales ».

Lorsque le même secrétaire d’État tweete que « Parmi les migrants illégaux qui arrivent en Espagne, beaucoup sont originaires du Bangladesh. » alors qu’il n’y en a que trois et qu’ils étaient travailleurs exploités en Lybie depuis longtemps, il lui suffit de retweeter qu’« il y en a aussi en provenance du Bangladesh » pour recevoir l’absolution de notre cher et aimé Premier Ministre Charles Michel.

Lorsqu’une petite fille de trois ans, Mawda, est tuée par une balle « perdue », notre cher et aimé Premier Ministre Charles Michel parvient à déclarer d’un air décidé et rassurant qu’il veut avant tout « casser "le business model mortel des passeurs" et des personnes qui exploitent la misère humaine en organisant des couloirs légaux de migration ».

Lorsque des milliers de travailleurs voient leurs entreprises aller à vau-l’eau et les licencier parce que les dividendes des actionnaires sont en légère diminution, notre cher et aimé Premier Ministre Charles Michel déclare le plus sérieusement du monde « J'appelle à ce que chacun, avec sérénité, autour de la table, expose son interprétation juridique et pas au travers de déclarations dans la presse ». Bien en accord avec son slogan miraculeux « Jobs, jobs, jobs »…

Nous avons de toute évidence le meilleur cher et aimé Premier Ministre de tous les temps. À défaut d’être Roi des Belges, il est le Roi des Recadrages. Ceux-ci ne servent strictement à rien, mais au moins Charles Michel recadre ! On ne pourra pas lui reprocher ça !

Et quand il y a quelques préavis de grève, irresponsables bien sûr, en tant que grand chef responsable, il n’hésite pas à affirmer « C'est totalement irresponsable. Ce serait un très mauvais signal. Notre pays est aujourd'hui dans une meilleure situation, sa crédibilité internationale s'est améliorée ». Voilà au moins un homme politique qui veille à notre crédibilité internationale, grandement menacée comme on le sait. D’ailleurs, les Diables rouges n’agissent pas autrement !

De toute évidence, nous vivons dans la « Belgique merveilleuse » du 21e siècle ! Alors, qu’est-ce qu’on dit ? « Merci, monsieur le Premier Ministre Charles Michel, cher et aimé » !

lundi 18 juin 2018

Le propulseur

FMG©2018
 
Un récent statut sur Facebook m’a permis de comprendre que certains ne connaissaient peut-être pas ce merveilleux moyen de locomotion : le propulseur ! Même Google ignore tout à fait ce qu’est cet instrument ! Réparons cette ignominie ignare.

Un propulseur est un véhicule à 4 roues, totalement mû par l’énergie de celui qui le conduit, généralement un enfant. Pour cela, il doit pousser, tirer, pousser, tirer un manche relié de manière subtile à l’essieu arrière. Selon la volonté du pilote, le chariot ira vers l’avant ou vers l’arrière, mais l’objectif est plutôt – comme toujours – d’avancer ! Pour se diriger, le conducteur fera appel à ses pieds qui permettent de diriger l’essieu avant. Ce n’est pas plus compliqué que cela.

J’ai découvert cet engin à Namur, dans la cour intérieure vitrifiée de la maison paternelle. Je comptais sur les doigts d’une main mon nombre d’années, tout comme le fait mon petit fils. J’avais des frères, sœur et cousin·e·s bien plus âgé·e·s qui se délectaient avec cette machine dans des courses d’obstacles contre la montre ! J’ai petit à petit, moi aussi, appris à dompter l’ustensile ! Et ce fut le bonheur intégral, toujours intact et inégalé !

Le jour où il est apparu que je pouvais reprendre le propulseur chez moi, je n’ai pas hésité une seule seconde ! Il trône depuis inlassablement dans notre salon. Mes enfants ont eu le bonheur de pouvoir l’utiliser, lorsque nous rénovions la maison, avec de grands espaces dégagés… juste à côté d’un trou béant, future cage d’escalier ! Mes petits-enfants le découvrent à leur tour, heureusement sans trou voisin.

C’est un bel objet, comme on n’en fait plus. Je n’en ai d’ailleurs jamais vu un autre. Mais il intrigue toujours et ceux qui ont pu l’utiliser n’oublient généralement jamais le plaisir que cela leur a procuré. Comme quoi, il ne faut pas vraiment des couleurs vives, des sons divers, de l’électronique ou autres joyeusetés des jouets actuels pour prendre son pied d’enfant !

vendredi 8 juin 2018

Créer les problèmes plutôt que les traiter

Un gars en congé pénitentiaire commet à Liège un attentat horrible. Il apparaît assez rapidement que ce gars aurait dû être identifié comme radicalisé potentiel et qu’il n’aurait sans doute pas dû être en congé. Pour montrer sa force, le Ministre de la Justice, M. Koen Geens, prend une mesure phare : il suspend les congés pénitentiaires de longue durée, qu’il avait lui-même instauré ! Sans aucune logique, si ce n’est sans doute d’apaiser l’aile d’extrême-droite du gouvernement.

Sous conditions, ces congés de longue durée permettent aux détenus de sortir de prison une semaine sur deux, soit nettement plus que les 36 heures mensuelles légales. C’est une manière d’ouvrir les portes des prisons, tout en les désengorgeant. Une mesure qui a fait ses preuves : depuis sa mise en œuvre, la délinquance n’a pas augmenté. Ce n’est pourtant pas une réussite totale : sur 700 détenus concernés par ces congés, 70 seulement ont vu leur procédure s’arrêter en chemin. Dix pourcents d’échec, c’est vraiment infime.

Alors, pourquoi supprimer ces congés de longue durée ? Il n’y a aucune justification rationnelle, que du contraire. La seule explication est la volonté de se montrer fort et d’adopter une position sécuritaire comme un arbre pour cacher la forêt de l’indigence politique face aux enjeux du vivre-ensemble dans la diversité plurielle. Faire croire qu’on résout un problème, alors que la solution avancée n’a strictement rien à voir avec le problème, bien au contraire.

Loin d’apporter une quelconque solution, la suspension de ces congés pénitentiaires de longue durée va entraîner son lot de difficultés.
  • Comment sera géré l’inévitable regain de surpopulation carcérale ? On peut douter du fait que le gouvernement accordera un encadrement supplémentaire à ce niveau.
  • Comment vont réagir les détenus qui espéraient pouvoir bénéficier de ces congés pour engager leur réinsertion dans la société ? Ce n’est en tout cas pas cette suspension qui les réconciliera avec celle-ci.
  • Quelles mesures positives seront adoptées pour favoriser une véritable réinsertion, fondée non sur la peur du gendarme, mais sur la volonté de trouver sa place dans la société dans le respect mutuel ? Une mesure sécuritaire n’a jamais apporté la moindre aide à cet égard.
Malgré les beaux discours des membres de ce gouvernement, et singulièrement ceux de leur Premier Ministre, on voit ici toutes les limites de leur approche politique des grands problèmes sociétaux. Ils gèrent à la petite semaine, de recadrage en recadrage, de petites mesures en renoncements aux quelques mesures porteuses, sans aucune vision d’avenir. Pauvre de nous !