dimanche 30 novembre 2008

La couleur est la gloire de la lumière

FMG © 2008

Nous sommes dans les journées les plus courtes de l’année, où la grisaille rivalise avec la froideur. Pourtant, cette photo a été prise ce vendredi 28 novembre 2008. Simplement, c’était dans la banlieue de Tunis. Et ce jour-là, il y faisait particulièrement beau et chaud. Enfin, tout est relatif : il faisait plus chaud que les jours précédents.

Ce soleil bleu, cette lumière lumineuse, et ces maisons colorées, ça change tout. Comme quoi, il ne suffit pas de grand chose pour transfigurer le monde et lui donner des atouts ensoleillés.

Combien ont-ils eu raison de peindre ces façades avec ces couleurs chaleureuses mais douces ! La vie naît tant de la couleur que de sa variété. On pénètre immédiatement dans un autre univers. Celui de la beauté.

« La couleur est la gloire de la lumière », écrivait Jean Guitton. Lui aussi avait bien raison. Si nous pouvions tous mettre un peu de couleurs dans notre vie, comme ce serait bon !

jeudi 27 novembre 2008

Pas encore pour maintenant

Stephen est mon ami. Nous avons quasiment le même âge (une vingtaine de jours nous séparent). Nous avons fait nos études d’instituteur ensemble. Nous avons habité ensemble. Nous avons été en vacances ensemble. Nous avons commencé à travailler ensemble. Nous avons travaillé pendant des années dans la même école. Nous avons passé des tas de bons moments ensemble. Quand j’ai changé de métier, nos chemins se sont un peu séparés, mais Stephen reste quelqu’un pour moi.

Dans quelques semaines, Stephen prendra sa préretraite. 30 ans de carrière. 55ans. Ça suffit en Belgique pour arrêter de travailler quand on est enseignant. Stephen va prendre sa préretraite et j’avoue que ça me fout un coup de blues.

Si je n’étais pas parti dans une autre direction, nous pourrions fêter une double préretraite. Ça m’aurait bien plu de fêter ça avec lui. Mais ma carrière se déroule désormais dans le privé, et je devrai attendre mes 65 ans pour partir à la retraite. Bon, j’avoue, à partir de 60 ans, je pourrais arrêter, mais avec une pension diminuée.

En réalité, je ne me sens pas prêt à arrêter tout. Et je crois que le jour où je prendrai ma retraite, il ne me faudra pas plus d’une semaine pour me dire « Bon, qu’est-ce que je fais maintenant ? ». Il n’empêche, je commence quand même à ressentir plus difficilement les contraintes du travail. J’aime mon métier et j’y fais des choses extraordinaires. J’y rencontre des personnes lumineuses. J’y découvre à chaque instant de nouveaux horizons. Ce qui me pèse, c’est le côté forcé du travail. Il faut aller travailler. Il faut faire des choses que je n’ai pas envie de faire. Il faut se battre contre soi-même pour animer un groupe difficile ou décrocher un client. Il faut aller au turbin tous les jours. Il faut se lever le matin. Ces contraintes font partie de la vie professionnelle. Elles m’ont très peu pesé jusqu’à présent. Mais je sens bien que ça commence.

Et dire que Stephen, lui, va voir les choses autrement. Tant mieux pour lui. Tant pis pour moi. Enfin, pas tout à fait tant pis : je le redis, j’aime mon métier et je continuerai à m’y investir avec enthousiasme. Mais quand même…

lundi 24 novembre 2008

Vigilante alternance

FMG © 2008

Une démocratie se caractérise fondamentalement par l’alternance. Sans alternance, pas de démocratie. En cela, les États-Unis donnent périodiquement une grande leçon de démocratie : un président démocrate suit un président républicain, sans que cela ne semble poser de véritables problèmes. Au contraire, peut-être plus que dans de nombreux autres pays, le Président américain est reconnu comme tel par l’ensemble des Américains, ce qui ne veut pas dire qu’ils sont toujours d’accord avec lui, mais ils le respectent en tant qu’occupant de la plus haute fonction.

On ne peut pas dire qu’à cet égard, la Tunisie – où je passe une fois de plus quelques jours professionnels – soit un exemple d’alternance. Les fondements de la démocratie sont ici périodiquement bafoués. Bien sûr, il y a de temps en temps des élections, mais les résultats en sont connus d’avance et sont tellement marqués qu’ils ne peuvent en aucun cas être la véritable expression du peuple.

Ce pays en est-il pour autant une négation de la démocratie ? Difficile à dire. Il y a ici tant d’éléments dont se réclament les régimes démocratiques. Une liberté de penser, ce qui ne veut pas dire – malheureusement – une liberté de s’exprimer. De nombreux débats peuvent cependant avoir lieu ici dans le respect de la parole des acteurs. Quand on voit par exemple les ouvertures possibles dans le monde de l’éducation, on se dit qu’un certain Darcos aurait quelques leçons à recevoir de ce pays. Liberté aussi par rapport à l’Islam. Toutes les visions de cette religion se côtoient ici, apparemment sans grandes tensions et sans extrémisme. On me dira que celui-ci est étouffé dans l’œuf. Peut-être. Mais en attendant, ce qui transparaît pour un observateur occasionnel comme moi, c’est la liberté religieuse.

Bref, je n’oserais pas lancer de jugements péremptoires sur le niveau démocratique de ce pays. Globalement, je dirais plutôt que ce pays aux maisons si blanches est dans le noir et que l’horizon démocratique s’y limite à des lumières balisées dont on ne peut sortir. Mais dans ce noir global, et sans tendre vers l’horizon, il y a par ci par là des poches lumineuses telles des étincelles de liberté. Celles-ci existent, mais ne doivent pas conduire à se laisser endormir. Au contraire, la vigilance est de mise. Quand l’alternance ne peut exister, c’est la vigilance qui crée le reflet de vie.

samedi 22 novembre 2008

La ballade de nulle part

J’imagine que tous les lecteurs de ce billet connaissent Maxime Le Forestier. J’imagine par contre que tous ne savent pas que Maxime a une grande sœur qui s’appelle Catherine et qui a fait une belle carrière – avec notamment la sulfureuse chanson Le pays de ton corps – tout en l’interrompant en pleine gloire par soif de liberté. J’imagine que ceux qui connaissent l’existence de Catherine ne savent pas pour autant que frère et sœur ont commencé leur carrière, en 1966, par un duo appelé Cat & Maxim. Ce duo a enregistré deux 45 tours. On trouve quelques traces du premier « Emmène-moi » quand on navigue sur la toile. Trouver des traces du deuxième est plus rare, même s’il est cité dans quelques biographies de Maxime.

Amateur de Catherine, je lui consacre une page sur mon site personnel. Cette page est d’ailleurs très visitée. Il faut dire que les informations sur cette chanteuse extraordinaire ne sont pas légion. Bref, je faisais depuis la création de la page état du premier 45 tours, dont j’avais finalement obtenu des versions mp3. J’avoue que j’ignorais l’existence du deuxième 45 tours. Il a surgi brusquement dans ma vie, en venant de nulle part.

J’ai soudainement reçu un message de Pascal me demandant si j’étais intéressé par ce disque. Nous avons ainsi noué contact et – le plus simplement du monde – Pascal m’a fourni les images de la pochette et les 4 chansons en fichiers mp3.

Ces chansons n’ont rien d’extraordinaire. À les écouter, on se dit que Cat & Maxim ont bien fait de (re)devenir Catherine Le Forestier et Maxime Le Forestier tant ce qu’ils ont fait tous les deux par la suite est mille fois mieux que ces chansons de jeunesse. Mais là n’est pas l’important. Ce que je trouve de merveilleux, c’est qu’un collectionneur de disques de Maxime est arrivé sur ma page et a eu la simplicité de me contacter immédiatement. Il a ensuite eu la générosité de me partager ses trésors. Cela ne lui a rien coûté évidemment. Mais il l’a fait en m’expliquant qu’il ne sert à rien d’être collectionneur si ce n’est pas pour en faire profiter les autres ! Quelle superbe leçon de la part de Pascal, corse à la retraite.

Je n’ai plus moi-même qu'à partager avec vous cette chanson La ballade de nulle part, dont – si j’en crois les crédits indiqués sur le disque - Georges Moustaki a composé la musique, les paroles étant dues à un certain B. Varanges (même si partout sur la toile, le texte est attribué à Moustaki…).

Quoi qu’il en soit, avec tant de générosité, laissons-nous porter, le monde nous appartiendra…



J'ai longtemps marché,
J'ai longtemps cherché
Ici ou là.
J'allais dans le noir,
J'allais sans savoir
Vers qui, vers quoi.

Ensemble nous irons de ville en ville,
De ville en ville.
Nous marcherons d'un même pas tranquille
Et rien ne nous arrêtera.

Je t'ai attendu,
Je t'ai entendu
Venir de loin.
Je t'ai reconnu
Quand tu es venu
Prendre ma main.

Ensemble nous irons de ville en ville,
De ville en ville.
Nous marcherons d'un même pas tranquille
Et rien ne nous séparera.

Laissons-nous porter,
Laissons-nous guider
Par le hasard.
Allons jusqu'au bout
à ce rendez-vous
De nulle part.

Ensemble nous irons de ville en ville,
De ville en ville.
Nous marcherons d'un même pas tranquille.
Le monde nous appartiendra.

vendredi 21 novembre 2008

Justice en déliquescence

Jean-Marc roulait en voiture dans une zone limitée à 30 km/heure. Souhaitant tourner à gauche, il ralentit et se positionna à gauche. Il entendit à ce moment un bruit de chute et constata qu’une moto était tombée derrière lui, jetant à terre ses deux passagers, dont l’un fut blessé. La moto n’a pas touché la voiture de Jean-Marc. Des traces d’une longueur de 6 mètres montrent que la vitesse de la moto était certainement supérieure à 50 km/heure. La police a fait les constats nécessaires.

L’affaire passe en justice : les motards prétendent que la voiture s’est soudainement déportée et les a fait chuter. Alors que tous les éléments objectifs montrent qu’il n’en est rien, le juge décide de condamner Jean-Marc. La philosophie pénale aujourd’hui est de protéger les victimes à risque : les piétons, les cyclistes, les motards… C’est une logique comme une autre et, en tant que motard occasionnel, je la trouve assez cohérente. Sauf lorsqu’elle consiste à condamner quelqu’un qui n’a rien fait de mal sous le prétexte fallacieux que s’il n’avait pas été là, la chute de la moto n’aurait pas eu lieu.

Qu’à cela ne tienne, il suffit d’aller en appel. C’est la base du fonctionnement de la justice. Mais en appel, Jean-Marc est condamné, plus sévèrement même encore. En réalité, sur trois magistrats qui ont œuvré en appel, il y en a deux qui avaient déjà sévi en première instance. Pourquoi se seraient-ils déjugés ?

Cette histoire vraie me laisse pantois. Non seulement la justice, on ne sait pas trop bien pourquoi, condamne un innocent, mais en plus son fonctionnement va à l’encontre même de ses principes de base. Le fondement d’un tribunal d’appel est de permettre à un autre juge de reconsidérer les choses. Si c’est le même juge qui intervient en première instance et en appel, celui-ci n’a pas de sens. En bonne logique, on devrait pouvoir casser un tel jugement. Il semble que ce ne soit pas le cas. Le système entérine sa propre négation.

Comment voulez-vous, face à de telles absurdités, que les gens aient encore confiance dans la justice ?

mercredi 19 novembre 2008

Opérationalisation

FMG © 2008

J’ai pris une décision importante aujourd’hui, mais qui me désole, même si son importance est somme toute assez relative.

Désormais, je n’écrirai plus « opérationalisation », mais « opérationnalisation », avec deux n au lieu d’un seul ! Vous voyez, ça change tout !

C’est le résultat d’un long processus. En réalité, ne cherchez pas : le mot « opérationnalisation » avec 1 ou 2 n n’existe pas ! C’est un néologisme, créé sur la base de l’adjectif « opérationnel » qui existe bel et bien, avec 2 n.

Ce néologisme est cependant abondamment utilisé dans les langages opérationnels (c’est le cas de le dire) tels que la pédagogie ou la gestion de projets. Si vous utilisez ce bon Google, il nous fournit 47 400 occurrences (avec 2 c et 2 r) pour « opérationnalisation » avec 2 n, alors qu’il propose pas moins de 144 000 pages pour « opérationalisation » avec 1 seul n.

Pourquoi alors opter finalement pour 2 n ? Il faut dire qu’en anglais, le choix est vite fait : c’est automatiquement avec un seul n. Si, toujours dans Google, vous vous limitez aux pages francophones, on se retrouve immédiatement avec seulement 10 700 « opérationalisation ».

Y a-t-il un débat ? Oui. Les linguistes officiels vous diront que les deux possibilités existent dans le cas d’une nominalisation d’un adjectif en « nnel », mais qu’il vaut mieux préférer la double consonnalisation. Il y a différentes raisons à cette préférence, sur lesquelles je ne m’étendrai pas, parce qu’elles sont en réalité boiteuses.

Personnellement, j’ai – jusqu’à présent – été beaucoup plus empirique. Il me semblait qu’ « opérationalisation » était beaucoup plus proche de « rationalisation » que de « institutionnalisation ». Et donc, par analogie, j’optais pour un seul n. Malheureusement, j’ai bien dû constater que la majorité des personnes optait pour 2 n.

Aujourd’hui encore, dans un document que j’avais préparé et que je projetais en formation, j’étais ennuyé de voir que mon « opérationalisation » était souligné de rouge par mon traitement de texte. Je reçus le coup fatal lorsque j’ai projeté un document réalisé par des participants, avec un bel « opérationnalisation » que le traitement de texte s’obstinait à ne marquer d’aucune manière ! Bref, je me suis avoué vaincu… et j’écrirai donc désormais « opérationnalisation ». Un point, c’est tout. Mais croyez-moi, c’est une décision difficile : cela fait près de 20 ans que je me bats contre des moulins à vent. Tout ça pour rien. Rassurez-vous : je ne pleurerai pas. Il y a des choses bien plus graves.

Par exemple, des problèmes de chauffage. Eux, ils me pourrissent (avec 2 r et 2 s) vraiment la vie. C’est pour ça que j’ai choisi une photo qui n’a rien à voir avec le contenu de mon coup de blues : ça me permet de penser à autre chose… et j’ai encore plus le blues !

Toute la musique que j'aime,
Elle vient de là, elle vient du blues.
Les mots ne sont jamais les mêmes
Pour exprimer ce qu'est le blues.

mardi 18 novembre 2008

Le bal des gens bien

À vrai dire, je ne suis pas un fan d’Adamo. Mais il faut bien reconnaître qu’il a réalisé une carrière admirable et que, durant cette carrière, il a pu faire quelques chansons qui sont de petits bijoux.

La plupart de celles-ci sont reprises dans cet album de duos. Le genre n’est pas nouveau et en soi, cela n’a rien d’extraordinaire. Mais c’est vrai que réunir autour d’un vieux briscard des « jeunes » comme Olivia Ruiz, Julien Doré, Renan Luce, Jeanne Cherhal ou Thomas Dutronc, c’est déjà pas mal !

Ce sont de vrais duos, où il y a un véritable apport du comparse. Dix-huit chansons qui sont presque toutes des coups de cœur. Je retiendrai pourtant ce qui pour moi a toujours été la meilleure chanson d’Adamo : Le ruisseau de mon enfance, interprétée ici avec Raphaël qui donne à cette chanson pleine de tendresse toute sa finesse et sa sincérité.

Dans un autre univers, il y a ces chansons surréalistes d’Adamo, des chansons bien belges tant elles sont en réalité délirantes : Vous permettez Monsieur, avec un Bénabar en pleine forme, Mes mains sur tes hanches, avec Julien Doré bien sage en réalité, et puis – avec deux anciens – l’improbable Les filles du bord de mer, avec un Souchon égal à lui-même, et l’amusante Ma tête, où Yves Simon apporte son phrasé et son sens du mot.

Les joyaux classiques d’Adamo sont bien sûr de la fête, même si ce ne sont pas mes interprétations préférées : Inch’Allah, avec Colagero, C’est ma vie, avec Isabelle Boulay, Tombe la neige, avec Laurent Voulzy, La nuit, avec Jeanne Cherhal…

Je retiendrai encore les deux dernières chansons, qui sont aussi les plus récentes, et qui sont fondamentalement des duos liées à tout jamais à leur co-interprète : toute la profondeur de Tant d'amour qui se perd, avec une Maurane toujours aussi planante, et puis l’humour joyeux de Ce George(s), avec la définitivement sublime Olivia Ruiz, resplendissante de beauté et d’énergie.

J’en reste là… mais c’est vraiment un album à découvrir, avec des chansons à redécouvrir. Finalement, cet Adamo, c’est un grand monsieur !

mardi 11 novembre 2008

Hêtre pourpre, être de pouvoir

FMG © 2008

Inévitablement, l’automne apporte son faisceau de couleurs. Comment ne pas se ravir devant tant de grâce, de luminescence, de profondeur ?

Et parmi toutes ces merveilles, le hêtre pourpre - Fagus sylvatica purpurea – prend plus que jamais toute sa force et tout son pouvoir.

Sa couleur rouge transfigure l’horizon. Ce n’est pas pour rien que la langue française rend compte, dans ses sens figurés, de la gloire passée et de l'excellence de la couleur rouge. Pourpre a désigné, par métonymie, le pouvoir, la puissance, la richesse.

En attendant, c’est un être qui sait prendre son temps. Au printemps, il est parmi les derniers à se recouvrir de ses plus beaux appâts. Mais lorsque les feuilles surgissent, cet arbre au port majestueux domine par sa force tout ce qui l’entoure. La forêt ne connaît pas d’être plus solennel. Où qu’il soit, il attire le regard et pousse à la modestie.

Et lorsque l’automne pointe ses froidures et ses ventures, le hêtre pourpre finit par laisser couler son sang, rougissant de son auguste force une dernière fois la verdure de la vie, avant de feindre s’endormir pour mieux nous dominer.

dimanche 9 novembre 2008

Mieux vaut un petit feu qui chauffe qu’un grand feu qui brûle

FMG © 2008

Finalement, un feu, ça a du bon par les temps qui courent. Imaginez que votre installation de chauffage tombe en panne. Une bête fuite d’eau qu’on ne peut pas trop localiser facilement. Imaginez que tous les chauffagistes du monde soient surchargés de travail et indisponibles pendant une période indéterminée. Imaginez, bien sûr, que tout cela se passe plutôt quand il fait froid que quand il fait chaud. (Cette dernière phrase est stupide : pourquoi le chauffage devrait-il fonctionner s’il fait chaud ?). Bref, imaginez que le froid s’installe progressivement dans votre « foyer ». Qu’est-ce que vous faites ?

On pourrait déménager, évidemment. C’est une solution efficace, mais pas si simple que ça à mettre en œuvre. On pourrait installer plein de chauffages électriques un peu partout. Je ne suis pas sûr que ce soit très efficace, mais ça doit surtout être très coûteux. On pourrait se couvrir de plusieurs couches, mais ça rend les mouvements moins fluides. Enfin bref, on pourrait sans doute des tas de choses, mais encore faudrait-il les pouvoir réellement.

Première hypothèse, simple : au moment où vous vous êtes installés, vous avez pensé à remplir un trou dans une cheminée par une cassette à bois. Deuxième hypothèse, tout aussi simple : au même moment, vous avez eu la bonne idée de vous installer dans une maison sise à côté d’un bois. Troisième hypothèse, plus complexe : ce bois est à l’abandon et périodiquement le vent fait tomber l’un ou l’autre arbre qu’il suffit de découper pour constituer un stock de bûches. Quatrième hypothèse, simpliste : il suffit de mettre des bûches dans la cassette et d’allumer un feu pour chauffer quelques pièces de la maison. Ça marche.

J’en reste là. Ce billet manque de toute évidence d’un quelconque intérêt. « Mieux vaut un petit feu qui chauffe qu’un grand feu qui brûle » disait Rowland Watkins. Il avait bien raison.

samedi 8 novembre 2008

Apprendre où à l'essai ?

La manière de concevoir l’erreur dans un processus d’apprentissage a fortement évolué. Il n’est pas loin le temps où se tromper constituait pour tout élève une faute pour laquelle il devait être puni. Cette idée assez immorale a conduit certains pédagogues à envisager un enseignement sans erreur : le courant néobéhavioriste a montré qu’en proposant des tâches limitées et progressives, on pouvait amener l’élève à progresser sans erreur d’autant plus que chaque réussite était récompensée par un renforcement positif. Cette conception a cependant été largement critiquée d’une part parce qu’elle consistait à modeler l’individu sans lui laisser beaucoup de liberté et d’autre part parce qu’elle permettait difficilement à apprendre à gérer la complexité. À la suite des travaux de Piaget qui a montré qu’apprendre consistait à franchir une série d’obstacles, l’erreur a acquis un nouveau statut : inutile d’essayer de la contourner, mais au contraire considérons-la comme une ressource au service de l’apprentissage. C’est en se plantant qu’on fait ses racines ! La plupart des pédagogues d’aujourd’hui s’inspirent du constructivisme et confèrent à l’erreur un rôle actif et positif dans l’apprentissage.

Même si je suis plutôt réticent aux thèses constructivistes quand celles-ci se transforment en vérité infaillible rejetant aux oubliettes toute autre démarche, j’ai toujours considéré que l’erreur était sans doute le meilleur moyen d’apprendre à ne plus en faire. Prenant connaissance – grâce un article d’Elise Dubuisson paru dans Le Soir du 8 novembre 2008 - d’une étude menée par une certaine Eveline Crone, psychologue de l’Université de Leiden, je me laisse cependant interpeller.

« Eveline Crone a observé au moyen de la technique de résonance magnétique fonctionnelle l’activation des zones cérébrales lors d’exercices d’apprentissage. D’après ces images, les mêmes aires cérébrales s’activent quel que soit l’âge. En revanche, l’intensité de cette activation varie fortement en fonction du type de commentaire reçu après l’exercice. Ainsi, chez les enfants de 8 à 9 ans, les aires responsables du contrôle cognitif réagissent fortement à des commentaires positifs, mais peinent à s’activer si les remarques sont négatives. À l’inverse, des enfants de 12 à 13 ans réagiront plus à un commentaire négatif. »

En d’autres termes, ces résultats indiquent qu’il est difficile pour de jeunes enfants d’apprendre de leurs erreurs. Cette observation est évidemment très importante pour les pratiques pédagogiques : mettre un élève de 8 ans dans une situation d’apprentissage où l’on sait bien qu’il se trompera n’est vraisemblablement pas aussi productif qu’on le pensait, ou du moins que certains voulaient bien le penser. Je ne crois pas que cela signifie qu’il ne faille pas confronter les jeunes élèves à des situations complexes ou à des défis. Mais ceux-ci doivent venir à un moment où l’élève a suffisamment appris pour réussir le défi ou résoudre la situation complexe.

Somme toute, c’est mettre en œuvre une pédagogie de la réussite en abordant la complexité uniquement au moment où celle-ci peut être abordée avec une probabilité de réussite suffisamment élevée. Cela n’a l’air de rien, mais en réalité, cela va à l’encontre de beaucoup de discours pédagogiques actuels. Et comme ces discours sont souvent prononcés par des personnes qui n’arrêtent pas de parler, il y a possiblement et malheureusement peu de chances qu’elles entendent les implications des travaux d’Eveline Crone !

mercredi 5 novembre 2008

Repos dévirginalisé

Jean-Louis Humblet © 1978

il est toujours un moment
inattendu et inquiet
où il convient de s'arrêter
de regarder devant et derrière soi

lorsqu'on s'y installe inévitablement
le soleil acquiert de nouvelles teintes
qui n'ont de l'étoile que l'essence
et il faut s'en réchauffer

on voudrait bien en ce moment
s'évader de ses propres rêves
s'encourir vers des montagnes
où la douceur se caresse des mains

peut-être un jour en sortirons-nous
mais pourra-t-on alors se taire parfois
et se laisser bercer par des mélopées
qui s'étirent au seuil de la vie.

FMG © 1978

lundi 3 novembre 2008

Ça, c’est bête !

FMG © 2008

Je sais que je vais me faire des ennemis, mais – que voulez-vous ? – il faut parfois regarder la vérité en face et oser la dire : je n’aime pas les animaux. Et les bêtes ne sont pas mes amies, loin de là !

Ça ne veut pas dire que je n’ai jamais eu un brin d’affection pour l’une ou l’autre bête. Dans ma vie communautaire, il m’est arrivé de cohabiter avec l’un ou l’autre chat, voire l’un ou l’autre chien. Comme je n’avais finalement rien contre eux, on a fini par bien s’entendre. Quand je rentrais à la maison, Kidu me faisait autant la fête qu’à son vrai maître. Comme quoi…

Cela ne m’empêche pas de ne pas trop comprendre la place qu’on donne dans notre société aux animaux. Ils font bien sûr comme nous partie des êtres vivants et à ce titre, ils méritent tout mon respect. Quand je vois dans le jardin un lièvre, un chevreuil, un pic-vert, un écureuil, ou tout autre animal sauvage qui profite du calme des lieux, je les observe toujours avec plaisir. Ils sont chez eux comme je suis chez moi. On partage la même terre, mais nous avons chacun nos espaces et surtout nos libertés.

Finalement, j’aime bien les animaux qui sont libres et indépendants. À une seule condition : qu’ils respectent les êtres humains ! Quand j’apprends aujourd’hui que deux chiens errants ont déchiqueté une femme qui se promenait sur le bord d’une route, près de Montpellier, et que celle-ci est décédée à la suite de ses blessures, je suis révolté. Ces chiens devraient être tués. Tous les chiens errants devraient l’être. Je n’ose pas dire « tous les chiens », mais peut-être le pensé-je quand même.

J’ai parfaitement conscience que de nombreux animaux sont les seuls à manifester quelque affection à de nombreuses personnes seules. N’est-ce pas inquiétant ? Notre société est-elle tombée si bas ? Quand on voit les sommes colossales qui sont consacrées à ces animaux domestiques, n’y a-t-il pas d’autres utilisations possibles de tout cet argent qui bénéficieraient plus à l’humanité ?

Je vais en rester là ! Inutile de risquer de mettre ma vie en danger… on ne sait jamais ce qui peut arriver à quelqu’un qui ose dire que les animaux, ce n’est pas son truc ! Tant pis, c’est dit.

samedi 1 novembre 2008

La vaine conquête de l’autonomie

Gaston Chaissac © 1961

Qu’est-ce qui fait qu’un individu devient autonome ou non ? Même si les scientifiques n’arrêtent pas de trouver des gènes de toutes sortes, censés expliquer pourquoi on devient alcoolique, violent ou névrosé, j’ai du mal à croire que l’autonomie serait inscrite dans un gène ou l’autre. Ce déterminisme ne convient pas trop à l’idée que j’ai de l’être humain.

Mais j’ai du mal à croire aussi que ce soit uniquement une question d’éducation. Si c’était le cas, tous ceux qui reçoivent la même éducation devraient atteindre le même degré d’autonomie, ce qui est loin d’être le cas. Il est bien sûr impossible de recevoir la même éducation, car celle-ci est faite non seulement par les éducateurs officiels que sont les parents, enseignants et autres éducateurs professionnels, mais aussi par tous les éducateurs informels liés aux événements que l’on vit, aux personnes qu’on rencontre, etc. N’empêche, je ne parviens pas trop à me dire que notre autonomie ne serait que le résultat des circonstances dans lesquelles on s’est trouvé.

Construirait-on tout seul notre autonomie ? Difficile à croire aussi. Pour cela, il faudrait être autonome… Comment quelqu’un qui ne l’est pas pourrait-il décider seul d’être autonome ou de ne pas l’être ? On entre là dans le domaine des injonctions paradoxales. Comment dire à quelqu’un « Sois autonome » s’il ne l’est pas ?

En attendant, force m’est de constater que certains n’arrivent jamais au degré d’autonomie nécessaire pour trouver pleinement leur place dans notre société. Pourquoi ? Comment ? Qu’y faire ? Je n’en sais rien (ce qui est peut-être, finalement, une preuve de ma propre non-autonomie…).

L’autonomie est trop souvent confondue avec l’indépendance. On peut être autonome sans être indépendant. Un enfant, inévitablement dépendant, peut être tout à fait autonome. Et ce n’est pas parce qu’on est indépendant qu’on est autonome.

Être autonome, c’est pouvoir avancer sans être enfermé par les contingences de la dépendance. C’est, finalement, être responsable de soi, quelles que soient les contraintes dans lesquelles on se trouve. N’est-ce pas finalement une vue de l’esprit ? Et l’esprit est-il quelque chose qui se conquiert ?