mercredi 30 avril 2014

Une exécution horrible

Il suffit d’une injection létale non testée – comment pourrait-elle l’être ? – achetée à on ne sait trop quelle entreprise plus appâtée par le gain que par la « qualité » de son produit. Normalement, « tout se passe bien » : on injecte et quelques minutes plus tard, le condamné meurt, sans souffrance. Hier, en Oklahoma, après 13 minutes, Clayton Lockett a levé la tête et a commencé à marmonner. Le médecin (?) a décidé d’arrêter la procédure. Finalement, Lockett est mort d’une crise cardiaque, après une quarantaine de minutes de souffrance.

Et tout le monde s’offusque de l’atrocité de cette mort. Comme si la mort n’était jamais atroce. Comme si l’exécution d’une peine de mort pouvait être une partie de plaisir, surtout pour celui qui la subit.

La peine de mort est la sanction la plus détestable, la plus inhumaine que l’homme ait jamais inventé. Elle est le plus souvent appliquée contre quelqu’un qui a lui-même tué. Et pour le punir, on le tue. Tuer légalement est-il donc plus vertueux que le crime initial ? Quelle valeur ou quel principe pourraient justifier ce qu’il faut bien qualifier d’assassinat, c’est-à-dire un meurtre avec préméditation ?

Les États-Unis aimeraient bien qu’on exécute sans « traitement cruel ou inhabituel ». C’est marqué dans leur Constitution. Y a-t-il un seul traitement qui ne soit pas cruel lorsqu’on fait passer, de sang-froid, un individu de vivant à mort ?

Ce n’est pas la méthode utilisée qui est atroce. C’est le fait de tuer.

vendredi 18 avril 2014

Oubliés, les francophones ?

N’ayant jamais été un obsédé linguistique, je n’en ferai pas un drame. Mais quand même, j’ai la méchante impression que les principaux oubliés de la campagne électorale actuelle (en Belgique) seront les Francophones de Flandre. C’est finalement assez logique : la 6e Réforme de l’État règle beaucoup de questions et il n’y a plus trop matière à revendication. Pourtant, ces Francophones – dont je suis – sont toujours là.

Ils ne sont d’ailleurs pas une petite minorité qu’on pourrait ignorer. Les recensements linguistiques étant interdits en Belgique, il est impossible de savoir combien de personnes parlent français, comme première langue, tout en habitant en Flandre. Les estimations tournent entre 300 000 et 370 000. Ce qui fait quand même 5,9% des Flamands !

Bon nombre d’entre eux habitent dans des « communes à facilités » et bénéficient donc d’un régime spécial, même si les autorités flamandes ont plutôt tendance à ignorer celui-ci. Mais je ne veux pas parler ici de ces facilités, dont je ne bénéficie pas. Je souhaite simplement attirer l’attention sur ces milliers de gens qui – comme moi, je le reconnais – parlent avant tout français tout en habitant en Flandre, en s’y trouvant fort bien d’ailleurs.

Ils n’ont aucune revendication particulière parce qu’avant tout ils savent très bien qu’ils vivent dans une région dont la langue principale n’est pas la leur. Quoi de plus normal donc de s’exprimer en néerlandais lorsqu’ils sont en contact avec les autorités ou les administrations publiques. Depuis plus de 27 ans que je vis en Flandre, cela ne m’a jamais posé le moindre problème, même si je fus confronté à différentes situations cocasses. Il faut dire que – comme beaucoup de ces francophones – je vis dans une région « frontalière » et que les langues se mélangent sans problème quand il le faut.

Alors, de quoi me plains-je ? J’ai simplement peur que les Francophones de Flandre soient définitivement oubliés, qu’on fasse comme s’ils n’existaient pas ou plus, qu’on tourne la page. Je n’entends plus aucun politique demander que la Flandre avalise enfin la « Convention-cadre pour la protection des minorités nationales ». Ce n’est bien sûr ni essentiel ni vital. Les Francophones continueront à exister sans cela. Mais ce serait mieux si c’était le cas.

Je ne vais pas en faire un plat. Je ne suis même pas sûr de voter pour l’« Union des francophones », tellement cela me semble peu important eu égard aux grands défis auxquels les Belges sont confrontés, dont tout simplement celui de maintenir le concept de « solidarité » comme base première de notre société. C’est loin d’être gagné ! Pourtant, cela seul compte !

N’empêche, j’ai un peu l’impression d’être ignoré dans une dimension elle aussi essentielle, celle de ma culture.

Si vous êtes arrivé jusqu’ici, vous vous demandez peut-être encore pourquoi ces trois jolies jeunes-filles servent d’illustration à ce billet, sans aucune prétention ! Ce sont simplement trois candidates lors de l’élection 2014 de Miss Belgique. Aucune des trois n’a gagné, mais elles avaient ceci en commun : Coralie, Anissa et Morgane sont des Francophones de Flandre. La bizarrerie était qu’elles figuraient parmi les 12 candidates francophones – sur les 24 candidates admises en finale – tout en habitant respectivement Dilbeek, Dworp et Strombeek. Mais finalement, tout le monde s’en fout…

mercredi 16 avril 2014

Le bon sens

FMG © 2014

Derrière chez moi, devinez ce qu’il y a ? Vous vous en moquez bien, et vous avez bien raison. Alors, disons que près de chez moi, il y a une route qui a été refaite. Elle le méritait bien : on l’appelait le « chemin creux », mais c’était un vrai coupe-gorge. Bref, comme elle aboutissait à une grande entreprise nouvellement installée, elle a eu droit à quelques améliorations.

Dont celle de disposer désormais d’un trottoir. L’espace étant ce qu’il est, la route a aussi perdu en passant un peu de largeur et il n’est désormais plus question que deux voitures se croisent : c’est une voie unique, quel que soit le sens que vous prenez.

Lorsque la route a été enfin réouverte – après de très longs mois de travaux – il y avait des panneaux routiers partout : une vraie pépinière ! Comme on ne peut se croiser et que la route est ouverte dans les deux sens, il y a des zones de croisement. Il y avait donc des tas de panneaux qui indiquaient aux chauffeurs qui avait la priorité et qui ne l’avait pas. Dans la pratique, c’était catastrophique, car c’était impossible de savoir à partir de quel endroit on était prioritaire ou non. J’ai ainsi pu assister à plusieurs scènes tendues où deux chauffeurs campaient sur leur position et refusaient de faire le moindre geste puisqu’ils avaient le droit pour eux.

Quelques mois plus tard, les autorités ont eu – chose rare ! – une idée de génie : ils ont retiré tous les panneaux. Du coup, il n’y a plus aucun droit ni devoir. Il ne reste plus que le bon sens des usagers et leur courtoisie.

Et ça marche très bien. Enfin, plutôt, ça roule très bien ! Je suis même souvent frappé de voir qu’au moment où je me dis que je devrais m’arrêter dans le dégagement prévu à cet effet, je vois l’automobiliste qui vient d’en face se garer lui-même pour me laisser passer. Tout cela se termine par un signe réciproque de remerciement et de politesse. Vraiment, ça fonctionne très bien.

Voilà donc une nouvelle preuve – s’il en fallait encore – que lorsqu’on fait confiance aux gens, ils sont parfaitement à même de gérer les situations potentiellement conflictuelles qu’ils rencontrent. Simplement par bon sens.

PS : je m’en voudrais si qui que ce soit voyait dans ce billet un quelconque soutien aux politiciens qui utilisent le slogan du « bon sens » pour leur campagne électorale actuelle. Pas sûr justement que ce soient ceux-là qui aient le monopole du « bon sens ». Mais ça, c’est une autre histoire !

samedi 5 avril 2014

Le temps d'une pause

FMG © 2014

Juste le temps d’une pause. Le temps d’une balade, à vélo, à pied. Le temps d’une rêverie. Le temps d’une gaufre chantilly et d’une Duvel. Le temps d’un bain de soleil. Le temps de décompresser, de vivre à un autre rythme, d’oublier – un peu – la monotonie ou la violence du quotidien. Le temps de flâner, de regarder les enfants qui jouent dans le sable, de s’imaginer être encore à la place de ces jeunes parents s’émerveillant devant leur progéniture ou ne s’émerveillant plus du tout. Juste le temps. Le temps d’une pause.

C’est le genre de moments qui ne bouleversent pas une vie. Mais qui lui donnent un peu de sel, un peu de lumière, un peu de tendresse. On arrête de penser. Enfin, presque. On se redécouvre, s’étonnant – quoique – de cette âme d’enfant qui est toujours présente, prête à saisir la moindre occasion pour rattraper le temps, pour se figurer qu’on y est encore, qu’on peut encore faire comme si… Et s’y croire !

La vraie vie n’existe plus tout à fait. Ou alors, elle est différente. Elle se décline en soleil, en repos, en sourires, en saine ivresse. On sait que ce n’est qu’une parenthèse. Mais, souvent, ce sont les parenthèses qui donnent leur sens aux choses. Il est bon de goûter ce sens.

La parenthèse se refermera. On redécouvrira les réalités quotidiennes, les espoirs déçus ou accomplis. On continuera à construire sa vie, à créer ce chemin qui est notre vérité et notre destin. Mais, quelque part, on gardera ce souvenir et il nous nourrira. Juste ce temps. Ce temps d’une pause.