vendredi 24 mai 2013

Le prosélytisme athée

Je suis toujours étonné de voir l’énergie et le temps que certains athées consacrent à critiquer les religions et les événements qui y sont liés. C’est assez difficile à expliquer, mais on peut supposer qu’ils se sentent – dans leur athéisme déclaré – menacés par ceux qui professent leur Foi, alors que ceux-ci ne me semblent pas adopter la même attitude vis-à-vis des premiers.

Que les choses soient claires : je n’appartiens personnellement ni à l’une ni à l’autre des deux catégories. Je me qualifierais d’« agnostique positif ». En d’autres mots, sachant qu’il est impossible de prouver ni l’existence de Dieu ni son inexistence, je dis que je ne sais pas si Dieu existe ou non, mais qu’il est donc possible qu’il existe, ce qui apporterait des réponses à certaines questions fondamentales. Mais il est donc aussi possible qu’il n’existe pas, sans avoir alors les réponses à ces questions. Dans les deux cas, cela ne change finalement rien à ma vie. Je suis vivant et j’essaie de vivre ce court moment de la meilleure manière possible, dans le respect du monde et des personnes qui sont dans le même bateau que moi. Il m’arrive de participer à des événements religieux et cela ne me pose aucun problème. Au contraire, ça me va. Sans pour autant que cela ne constitue une nécessité impérieuse.

Lorsque je vois les réactions et commentaires qui ont été exprimés lors de l’élection du pape François – notamment sa condamnation sans appel pour ses supposés liens avec la dictature de Videla en Argentine, alors que cette soi-disant complaisance vis-à-vis de ce sinistre régime politique n’a pu être confirmée en aucune manière – je me demande en quoi l’élection d’un pape atteint à ce point ces athées déclarés.

Bien sûr, le pape est un personnage public jouissant d’un pouvoir d’influence important. Il est assez clair que l’Église catholique essaie partout où elle est présente d’influencer la sphère politique. Il suffit de voir encore ce qui s’est passé en France lors du processus d’adoption du mariage pour tous. Mes positions dans ces grandes questions morales sont la plupart du temps différentes de celles de l’Église, mais je peux comprendre que dans la continuité logique de son approche, celle-ci défende fermement ses idées. Ce faisant, elle ne me menace en rien. Elle essaie d’intervenir dans le débat démocratique et elle en a bien le droit. Au bout du compte, les décisions sociétales sont prises par ceux qui sont mandatés pour les prendre… et la Terre continue à tourner.

Au-delà des différences d’opinion eu égard à ces grands débats moraux et sociétaux, il ne me semble pas y avoir de menaces pour l’un ou l’autre. Sauf bien sûr quand certains intégristes – de quelque camp qu’ils soient – choisissent d’associer leur vision à une attitude violente et destructrice. Ceux-là sont pour moi non seulement de dangereux personnages dont il faut se prémunir, mais aussi des personnes qui s’inscrivent en faux avec leurs propres croyances (ou non-croyances). Une « conscience morale », quel que soit ce qui l’anime, ne devrait jamais être en soi destructrice.

La Foi est une affaire de conviction personnelle. Que quelqu’un croie en Dieu ou non ne change jamais rien à la vie d’un autre. Chacun me semble libre de penser ce qu’il veut à cet égard et d’animer sa vie en fonction des références qui lui semblent les plus correctes. Je peux comprendre que lorsqu’on croit profondément quelque chose, on ait envie que les autres adhèrent à la même conviction. Mais il me semble absurde de critiquer, voire de condamner, celui qui ne pense pas comme moi sur des éléments qui de toute façon ne dépendent que d’une vision personnelle des choses, que d’un vécu personnel. Euh… n’est-ce pas ce que je suis en train de faire moi-même ?

La seule chose nécessaire n’est-elle pas finalement de vivre dans un respect mutuel ? Pour le reste, taisons-nous ! Tais-moi !

2 commentaires:

  1. Si ton article part d'une intention honnête et louable, je voudrais cependant rebondir sur une de tes phrases :
    "Que quelqu’un croie en Dieu ou non ne change jamais rien à la vie d’un autre."
    Là, je ne peux absolument pas être d'accord. Le fait qu'il y ait des croyants en 2013 est complètement dépendant du fait qu'il y ait eu des croyants depuis presque 4000 ans. Chaque croyant authentique est en lui-même un germe de foi pour autrui. Les Juifs ont reçu leur foi de leurs pères et mères, les chrétiens ont reçu leur foi du témoignage des premiers chrétiens qui s'est perpétué, arrosé d'ailleurs du sang des martyrs à travers les âges (preuves historiques existantes). C'est la force de la foi de ceux-là, depuis saint Etienne, qui a encouragé la foi de leurs contemporains et des générations suivantes. Moi-même, je peux dire que j'ai été profondément marquée dans mon itinéraire de foi par le don jusqu'au bout de soi des moines de Tibhirine.

    La vocation d'un baptisé, c'est de témoigner de sa foi. C'est par l'appel au témoignage de la foi au Christ ressuscité que se terminent les Evangiles. Si la foi des chrétiens en Europe est si tiède, ce n'est pas qu'ils ont raison d'être tièdes, c'est qu'ils ont été en quelque sorte "formatés" à l'être, en particulier en France.
    Je peux témoigner de mille manières que tout mon entourage s'est employé à "déconstruire" ma foi à la fin de mon adolescence. En soi ce n'est pas un mal, car elle n'en est ressortie que plus forte. Mais j'ai enduré pour la retrouver pleinement et oser l'affirmer les pires souffrances.

    Il y a encore un autre aspect que tu n'évoques pas : c'est l'expérience mystique. A ce niveau-là, il y a abondance de preuves du passage de Dieu dans des milliers de vies. Il suffit de ne pas vouloir les voir pour les ignorer.
    Pour ne prendre qu'un exemple, les oeuvres complètes de sainte Thérèse d'Avila - qui a beaucoup écrit - sont disponibles n'importe où. Il faudrait être malhonnête intellectuellement pour dire que c'était une malade mentale, et que sa vie n'a pas porté de fruit - il y a des carmels partout.
    Je n'ai jamais compris comment les athées pouvaient balayer d'un revers de la main les vocations religieuses. Passer toute une vie dans un monastère pour une "idée" serait pour le moins étrange. Je mets au défi les athées d'en être capables pour leur athéisme - qui lui est une idée.

    Trouver la foi, c'est aussi, à un moment, poser un acte de confiance : confiance en autrui qui a expérimenté et compris avant soi.

    Et plus tard, quand on est vraiment habité par la foi, quand on a intimement "rencontré" Dieu, la foi n'est plus une conviction, elle est une connaissance.
    Et c'est blessant de sentir que même les plus proches autour de soi considèrent cette connaissance comme moindre qu'une connaissance purement humaine et rationnelle.

    On est là, on pourrait être source jaillissante de foi pour autrui, mais autrui ferme les écoutilles, parce que c'est plus confortable, plus satisfaisant pour l'ego, ou plus politiquement correct.

    En toute amitié


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    1. Je ne sais pas si mon billet part ou non d'une intention honnête et louable ! Pour moi, pas plus qu'un autre billet en tout cas. J'écris ce que je sens devoir/vouloir écrire… Pour le reste, c'est au lecteur de décider si c'est honnête ou louable ! :)

      La phrase que tu relèves est effectivement trop absolue. Comme en toute circonstance, il ne faut jamais écrire "jamais" ! Ce que je voulais dire, c'est qu'en soi "Que quelqu’un croie en Dieu ou non ne change rien à la vie d’un autre." Que cela puisse changer sa vie, j'en conviens aisément. Tout comme cela peut ne rien changer. Mais il est clair que la "contagion" de la Foi contribue au fait que celle-ci existe.

      Je n'ai effectivement pas abordé l'expérience mystique (qui n'est pas en lien direct avec mon propos). C'est une question complexe et non résolue. Les neurosciences cherchent bien à localiser dans le cerveau une "zone de dieu" qui se trouverait dans la région temporale de l’écorce cérébrale. Les recherches dans le domaine en sont encore à leur balbutiement et donnent des réponses diverses. Si l'existence de cette zone était "prouvée", cela apporterait certaines réponses à ces expériences mystiques. Pourrait-on pour autant les réduire à une activation chimique des circuits concernés ? Pas sûr.

      Mais toutes ces expériences mystiques, aussi fortes soient-elles, ne prouvent jamais le "passage de Dieu" dans la vie de ceux qui l'expérimentent. Qu'ils vivent une expérience très forte, c'est une évidence. Que celle-ci soit le fait du passage de Dieu, c'est un acte de foi. Je te crois aisément quand tu dis que cela débouche pour la personne concernée sur une "connaissance" de Dieu, mais je comprends tout aussi aisément que pour les athées cela ne représente qu'une idée, intense sans doute, mais "vue de l'esprit" quand même. Certains athées balaient effectivement cela d'un revers de la main et le clament bien haut. C'est bien ce que je voulais dénoncer dans mon billet. Tu les mets au défi d'être capables de passer toute leur vie dans un monastère pour leur "idée athée"… mais c'est justement ce qu'ils ne comprennent pas, à savoir consacrer toute leur vie à ce qu'ils ne considèrent qu'une "idée" parmi d'autres, qui est de plus effectivement parfois et malheureusement nuisible.

      Pour finir, en toute amitié, je me garderai bien de juger que certains "ferment les écoutilles" pour leur confort ou leur ego. Cela, c'est le chemin de chacun et - si je suis convaincu d'une seule chose - c'est bien que chacun a droit à son chemin !

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