mercredi 26 septembre 2007

Conscience professionnelle

FMG © 2007

J’entends souvent des plaintes selon lesquelles un des plus grands maux de nos entreprises serait la disparition de la conscience professionnelle. Les gens ne s’intéresseraient à leur boulot que parce qu’il leur fournit l’argent, peu ou prou, qui leur permet de vivre, plus ou moins bien. Fournir un service de qualité ne serait plus à l’ordre du jour.

Je n’oserais pas affirmer le contraire, pour la bonne et simple raison que je ne sais pas comment les gens vivent leur boulot. Je suis convaincu qu’il doit y en avoir pas mal qui s’en foutent du tiers comme du quart, mais je suis tout aussi convaincu qu’il y en a d’autres, sans doute plus même, pour qui il importe de se donner à fond dans leur travail, en exécutant celui-ci de la meilleure manière qui soit.

C’est sans doute une bonne chose, tant pour les entreprises, privées ou publiques, que pour les clients de celles-ci, individuels ou collectifs. Mais à vrai dire, je me demande si c’est toujours une bonne chose pour l’individu lui-même. Bien sûr, tant qu’il s’agit de bien faire son boulot, cela ne peut que lui être profitable. Le problème survient quand cette foutue conscience professionnelle pousse à faire un peu plus que bien faire son boulot. Inévitablement au détriment d’autres choses.

Comment expliquer que le premier dimanche matin que je passe chez moi depuis quatre semaines, enfin en week-end, j’ai la folle idée de dépouiller mon courrier électronique professionnel et la mauvaise surprise d’y trouver un message d’un collègue appelant à l’aide pour un travail qu’il aurait pu tout aussi bien faire lui-même ? Et, surtout, comment expliquer que je décide ni une ni deux de réaliser ce travail séance tenante, rien que pour satisfaire le client qui n’en demandait sans doute pas autant ?

Comment expliquer ma réaction, il y a une dizaine d’années, lorsque, étant en mission au Vietnam, j’ai commencé à ressentir une douleur importante dans le pli du genou accompagnée d’un gonflement de la jambe. Moi qui avais déjà fait, à la même jambe, une thrombophlébite quelques années auparavant, il ne fallait pas me faire un dessin pour savoir ce que j’avais ni ce que je risquais. Mais voilà, à l’époque, cette mission était importante pour mon entreprise. Alors, j’ai continué à la réaliser, en limitant au mieux – sans doute au pire – les quelques mouvements que j’avais à faire pour aller travailler. J’ai fait toute la mission. J’ai pris l’avion du retour, alors que je savais bien que mon mal s’appelait le « syndrome de la classe économique ». J’ai juste demandé à ma tendre et chère de me prendre un rendez-vous chez le médecin dès mon retour… et j’ai abouti – bien sûr – à l’hôpital pour soigner cette veine folle. Je m’en suis sorti – sans doute aussi une question de veine -, mais avec le recul, quelle folie !

Des exemples comme ça, j’en ai d’autres. Il faut être fou. Je m’apprête à partir à Beyrouth, où on ne peut pas dire que tout soit calme, et puis à Batna, en Algérie, où une bombe humaine a fait des ravages il y a peu. Pourquoi ? Parce que mon travail me conduit à aller là-bas. Et que j’ai envie de faire mon travail convenablement.

Conscience professionnelle. Oui, sans doute. Mais n’est-ce pas aussi la science d’être con ? Sans doute aussi. En attendant, je suis comme ça !

2 commentaires:

  1. C'est vrai que le prix est souvent lourd à payer, surtout pour toi qui parcours des endroits à risque... et que l'on peut parfois légitimement se demander si tout ça en vaut la peine, notamment quand la santé entre en jeu...
    Quant à ton collègue, puisqu'il apparait qu'il aurait probablement pu s'en sortir lui-même, c'est peut-être la question de sa propre conscience professionnelle qui se pose. C'est déjà compliqué de mener sa barque alors si en plus il faut conduire celle des autres...

    Pas facile de trouver le juste milieu, le juste équilibre entre tenter de satisfaire ce que l'on est (impliqué, consciencieux...) et tenter de préserver un peu de soi pour ne pas tout sacrifier sur l'autel du sacro-saint boulot.

    Est-ce con d'avoir une conscience professionnelle qui pousse à aller au bout de ses limites ? Je ne le crois pas. Dangereux, oui.

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  2. Ahaha ! Sans avoir lu Franck, voici ce que je voulais dire :
    être consciencieux n'est pas être con, je ne crois pas.
    Quand on a des responsabilités, c'est normal et louable d'avoir à coeur de les assumer au mieux.
    Mais au prix de ta propre santé ?
    la réponse est contenue dans la question : c'est trop cher payer !
    Ne mérite-t-elle pas autant de soin(s) que ton travail ?
    En être conscient, c'est pas con non plus !
    ;-)

    27 septembre 2007 08:09

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