En 1990 déjà, l'Académie française, ainsi que le Conseil de la langue française du Québec et le Conseil de la langue de la Communauté française de Belgique, ont adopté un certain nombre de rectifications orthographiques dans le but louable de simplifier notre langue française. Il est vrai que celle-ci est particulièrement difficile et contient de nombreuses aberrations ou autres bizarreries : pourquoi écrire « chariot » alors qu’on écrit « charrette » ?
De toute évidence, il n’est pas simple d’apprendre et de maîtriser l’orthographe française. D’autres langues présentent moins de difficultés – l’espagnol par exemple – et certaines ont réussi de belles réformes facilitant la vie des gens, notamment le néerlandais.
Il y a donc bientôt 20 ans que ces propositions ont été faites – elles n’ont jamais eu le statut d’obligations : juste des recommandations – et il faut bien avouer qu’elles sont relativement peu passées dans la pratique de la langue écrite. Pas plus que d’autres tolérances déjà retenues en 1901 !
A priori, j’aurais plutôt tendance à appuyer cette réforme. Autant simplifier ce qui peut l’être, surtout quand ce qui est compliqué n’a aucune raison de l’être. Et peut-on espérer faire évoluer le monde si on n’est pas capable de participer à l’évolution de sa propre langue ?
Néanmoins, j’ai fini par m'interroger non pas sur son utilité, mais sur celle de la promouvoir. Face au constat que quasiment personne ne suivait ce chemin, si ce n'est bien sûr quelques intellectuels ou quelques organismes spécialisés, j’ai surtout été conduit, de par ma profession, à voyager dans de nombreux pays francophones et à agir pour le développement de leur système éducatif, notamment eu égard aux manuels scolaires. Ce sont vraisemblablement les nombreux contacts que j'ai eus dans ce cadre qui m'ont amené à oublier ces rectifications orthographiques de 1990 et – très concrètement – à renoncer à les utiliser ici ou ailleurs.
Pour différentes raisons, il faut en effet bien constater que ces rectifications ont une caractéristique fondamentale : celle d'être complètement inconnues de la plus grande majorité des utilisateurs de la langue française. Un exemple parmi d'autres, très interpellant : j’ai participé pendant plusieurs années à la formation des nouveaux inspecteurs de l'enseignement, en France. Je n'en ai jamais rencontré un qui savait que des rectifications avaient été proposées, même parmi les inspecteurs de français. Si les inspecteurs eux-mêmes ne sont pas au courant, vous imaginez ce qu'il en est au niveau de la base. Et vous imaginez aussi la situation dans les nombreux autres pays francophones.
Inévitablement, celui qui tient compte des recommandations apparaît surtout comme quelqu'un qui ne maîtrise pas l'orthographe.
Promouvoir ces rectifications n'est-il pas dès lors une démarche « impérialiste » qui ne tient aucunement compte de la réalité des utilisateurs de la langue française ? N'est-ce pas de toute façon un combat perdu d'avance lorsqu'on a un peu mieux conscience des canaux d'information et d'éducation qui caractérisent la plupart des pays francophones ? Comment ces nouvelles règles pourraient-elles être appliquées dans les pays francophones africains qui ont déjà tant de difficultés à disposer d’un personnel éducatif maîtrisant suffisamment le français pour pouvoir l’enseigner ? Comment croire qu’il serait possible qu’une telle réforme arrive dans les écoles de brousse, alors que les réels besoins de formation des enseignants sont tout autres et ô combien plus importants ?
Constatant que les recommandations ne sont utilisées que dans quelques milieux très privilégiés, essentiellement belges et suisses, n’est-on pas en droit de penser que leur promotion est une forme comme une autre de néo-colonialisme ? Au bout du compte d’ailleurs, l’important n’est-il pas que l’Allium cepa soit une de ces belles et bonnes choses que l’on trouve notamment ici, à Madagascar, qu’il soit connu ou non comme oignon ou ognon ?
Très intéressante réflexion. Il me semble d'ailleurs que l'évolution de la langue ne se décrète pas dans les académies (malgré toutes leurs compétences et qualités), mais se vit, se fait à la base, par le peuple qui la parle.
RépondreSupprimerOn peut se demander si le langage-sms des ados restera limité ou prépare une (autre) évolution de l'orthographe ?
Aaaaaaaaaaah! C'était donc ça "évènement"! (hahaha!)
RépondreSupprimerFlûte alors....euh! Flute alors!
Je les aimais bien mes nénuphars, surtout ceux du mois d'août!
Pomiculteur? Ils n'ont pas changé pomiculteur?