jeudi 15 septembre 2022

Foutu coronavirus

 

Il y a deux ans, Brigitte – réputée pour ne jamais être malade – ne se sentait pas en super forme. Elle se fit tester pour la Covid-19. Le résultat tomba le jeudi 17 septembre 2020 : positif. Ce fut pour nous le début de la mouise. Je fus testé le vendredi avec résultat le samedi : positif. À ce moment-là, ce fut plus dur pour moi : deux bonnes semaines de souffrance, difficile, mais sans gravité heureusement. En une semaine, Brigitte était quant à elle rétablie. C’est ce que nous croyions du moins.
 
Elle ne retrouva jamais sa forme et son énergie légendaires. Au contraire, elle se plaignit vers la fin du mois d’octobre de douleurs dans le dos. Je choisis mes mots : si les plaintes n’arrivèrent que vers la fin du mois, c’est sans doute qu’elles étaient présentes plus tôt. Avant que Brigitte ne se plaignît de quelque chose, il fallait vraiment qu’un certain temps ne se passât et que la souffrance fût difficile à supporter. Personne ne savait encore grand-chose sur la Covid-19, pour autant qu’on en sache plus aujourd’hui alors que l’OMS annonce pour la première fois une possible victoire sur ce coronavirus. Toujours est-il que notre réaction fut de mettre ces maux sur le compte de cette maladie devenue le quotidien de nombreuses personnes. Nous entendions partout que les effets négatifs pouvaient durer, apparaître plus tard, se manifester de différentes manières. Bref, nous prîmes – surtout Brigitte – notre mal en patience.
 
Quand les douleurs devinrent de plus en plus lancinantes et insupportables, nous appelâmes à l’aide la médecine, y compris les urgences. La Covid-19 continuait à faire des ravages et les seules réponses que nous obtînmes étaient que c’était vraisemblablement les suites de la maladie…
 
Noël 2020 : comme beaucoup, nous avons bravé les interdits et fêté ce réveillon en famille, quasi en cachette. Nous ne savions pas que c’était pour la dernière fois. Le 26 décembre, alors que Brigitte et moi, nous prolongions la fête en accueillant nos deux petits-enfants, la douleur devint intenable. Il fallut aller aux urgences. Sans avancement : la Covid-19 continuait à avoir bon dos, c’est le cas de le dire. Brigitte revint à la maison, avec juste quelques petits antidouleurs.
 
La perspicacité, la ténacité et la compétence de notre médecin traitant l’amenèrent, début janvier, à demander – enfin – la bonne analyse de sang, celle qui aurait dû être faite depuis longtemps. Le vendredi 8 janvier 2021, le médecin appela Brigitte : « Vous devez aller aux urgences directement, je les préviens… ». Le 12 janvier, le verdict tomba, sans grande surprise : cancer du poumon gauche. Impensable. Illogique. Inexplicable. Le 12 décembre, Brigitte nous quittait après onze mois de combat inégal.
 
Nous ne savons pas et nous ne saurons jamais quel rôle a joué le coronavirus dans cette histoire. Normalement, le cancer n’est pas la conséquence de la Covid-19. Normalement. Cette maladie a-t-elle réveillé, activé, provoqué… le cancer ? Normalement, non. Par contre, ce qui est certain, c’est que le fait que Brigitte ait fait cette maladie et celui que la pandémie faisait alors rage ont contribué à retarder le diagnostic. Deux ou trois mois de perdus. S’ils ne l’avaient pas été, cela aurait-il changé quelque chose au résultat final ? Sans doute non. Peut-être aurions-nous eu la chance de vivre quelques semaines, quelques mois, voire – pourquoi pas, on peut rêver – quelques années supplémentaires avec Brigitte. On peut spéculer, mais cela ne change rien. Brigitte n’est plus là. En écrivant cela, je pense avant tout aux 6,5 millions de personnes qui de par le monde sont définitivement parties à cause de la Covid-19.
 
Brigitte n’est pas de celles-là. Mais, aujourd’hui, je ne peux m’empêcher de penser que sans ce foutu coronavirus, tout cela aurait peut-être pu être différent. Et que…


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