Ayant publié sur mon mur FB une vidéo montrant à quoi devrait ressembler, en 2026, la cathédrale Sagrada Familia, dessinée par Gaudi, un de mes amis – dont j’avoue ne pas toujours suivre le cheminement intellectuel, mais néanmoins ami – a commenté : « Dieu en demandait-il autant ? ». Bien sûr que non. Dieu n’a rien demandé. C’est l’homme qui lui offre.
Cette question reflète bien ce qui me semble une conception tout à fait erronée de Dieu, et faussant donc fondamentalement la compréhension que l’on peut avoir de la « chose religieuse ». Cette conception est anthropomorphique. Elle se représente Dieu à l’image de l’homme ! Et donc, dans ce cas-ci, d’un « quelqu’un » qui demanderait quelque chose !
Quel orgueil en fait de penser que Dieu – s’il existe – ressemblerait d’une manière ou d’une autre à l’homme ! Si la Genèse (1:26-27) déclare que « Dieu dit : ’’Faisons l'homme à notre image, selon notre ressemblance’’ », elle ne dit évidemment pas l’inverse. Si nous sommes éventuellement à l’image de Dieu, c’est justement dans notre part immatérielle, et certainement pas dans toutes nos contingences et nos limites liées à notre statut d’être humain, simple animal parmi les animaux.
Chaque fois que l’homme imagine que Dieu lui ressemble, il réduit celui-ci à ses propres turpitudes et enferme l’humanité – sans parler de l’univers – dans une vue totalement étriquée. La fanatisme religieux trouve son origine dans cette conception : comme « l’homme est un loup pour l’homme », certains s’imaginent que Dieu est aussi un loup qui ne souhaite que la destruction de ceux qui ne le reconnaissent pas comme l’Être supérieur par excellence. Cette conception fausse aussi la réflexion en cas de catastrophe, naturelle ou humaine : « Comment Dieu peut-il permettre cela ? ». À nouveau, si Dieu existe, il ne permet rien du tout. Ce n’est pas lui qui décide de ce qui est ou n’est pas.
Mais alors, qui est Dieu et à quoi sert-il ? À vrai dire, je n’en sais rien et je ne cherche pas à le savoir, puisque de toute façon c’est impossible. Étant de culture chrétienne, je retiens que « Dieu est Amour ». S’il sert à quelque chose, ce ne peut donc être qu’à une seule chose : à aimer ! En disant cela, je suis loin de le réduire à une image anthropomorphique, car si l’homme peut lui aussi effectivement aimer – et ne cherche sans doute que ça – il faut bien reconnaître qu’il le fait de manière très imparfaite.
Au bout du compte, fallait-il construire à Barcelone cette cathédrale invraisemblable (que je n’ai jamais vue en vrai) ? Pourquoi pas ? C’est une manière comme une autre de se rapprocher – ou de croire se rapprocher – d’un amour divin. Et tout ce qui élève l’homme est, selon moi, bon à prendre, pour autant bien sûr que cela ne l’amène pas à se détourner de la vraie réalité humaine, avec toutes ses vicissitudes et ses limites.
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